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PLF 2011 - Le projet de budget sort du Sénat très modifié - y compris sur la péréquation

Le Sénat a adopté le 7 décembre un projet de loi de finances pour 2011 qu'il n'a cessé de détricoter. Les articles concernant les collectivités ont eux aussi connu des évolutions majeures. Mais attention, la commission mixte paritaire qui se réunit le 13 décembre dans l'après-midi pourrait revenir sur un certain nombre d'entre elles. Dans les dernières heures de l'examen, les sénateurs ont encore revu la copie des députés, concernant cette fois les dispositifs de péréquation financière entre les collectivités.

Le Sénat a voté le 7 décembre par 177 voix contre 153, après l'Assemblée nationale, le projet de budget pour 2011 (PLF). Sur 900 amendements déposés, 200 ont été adoptés. Au terme de l'examen par la chambre haute, le projet de loi a donc profondément évolué. Les sénateurs ont en effet fait preuve de nombreuses initiatives - et parfois contre l'avis du gouvernement, qu'ils n'ont pas toujours cherché à ménager. Du coup, comme à l'Assemblée en première lecture, le gouvernement a dû passer en force avec une deuxième délibération sur l'une des mesures : la suppression de l'abattement de 15% de cotisations sociales sur les emplois à domicile que les sénateurs voulaient maintenir (lire ci-contre notre article de ce jour consacré à cette disposition). C'est "l'économie la plus importante du PLF avec près de 460 millions d'euros", a tonné le ministre du Budget.
Malgré cette mise au point, les sénateurs peuvent se réjouir que le gouvernement n'ait pas eu la main plus lourde. Car ils se sont attaqués à quasiment toutes les mesures, tranchant dans les unes, en supprimant d'autres, renforçant certaines. Au chapitre des finances locales, les sénateurs ont également fait preuve de pas mal de volontarisme. L'une des preuves les plus manifestes est la mesure votée le 6 décembre qui donne la possibilité aux communes de plus de 5.000 habitants de moduler à la hausse le taux de la taxe additionnelle communale aux droits de mutation. Un dispositif qui n'a pas eu l'agrément du gouvernement... La réunion de la commission mixte paritaire (CMP) chargée de trouver un texte commun à l'Assemblée et au Sénat, sera à suivre de très près.

Péréquation communale : les fonds régionaux disparaissent

Pour ce qui est des derniers articles adoptés le 7 décembre par le Sénat, on retiendra surtout ceux qui concernent la péréquation entre les collectivités. S'agissant de la péréquation à l'échelle du bloc local, les sénateurs sont revenus au texte du gouvernement en supprimant les fonds régionaux de péréquation qui avaient été créés par l'Assemblée nationale. Selon le projet de loi voté par les députés, des fonds régionaux devaient en effet regrouper 1% des recettes fiscales des groupements et communes de chaque région (lire notre article du 18 novembre). Le même objectif de 1% était assigné au Fonds national de péréquation entre les communes et les intercommunalités. Un amendement du rapporteur général du budget, Philippe Marini, conduit au maintien du seul fonds national, dont la mise en œuvre débuterait, comme prévu, en 2012. L'objectif global de redistribution des recettes fiscales resterait de 2%, en 2015.
Les sénateurs n'ont pas cru à des fonds régionaux, estimant que les régions sont "trop disparates entre elles" pour que la péréquation puisse fonctionner à cette échelle, comme l'a expliqué Philippe Marini. Les experts en finances locales sont eux aussi perplexes. Lors d'une rencontre sur les finances intercommunales organisée récemment par l'Assemblée des communautés de France (ADCF), plusieurs d‘entre eux soulignaient qu'un fonds régional serait viable uniquement en Ile-de-France. Dans les autres régions, les fonds seraient insuffisamment alimentés.
Contrairement aux intentions de départ du rapporteur général du budget, l'Ile-de-France contribuerait au fonds national de péréquation. La région capitale disposerait en même temps d'un fonds régional, qui serait l'héritier de l'actuel fonds de solidarité des communes de la région Ile-de-France (FSRIF). D'ici à 2015, ce fonds disposerait d'un montant de ressources supérieur à 1,5 fois les ressources actuelles du FSRIF.
Les communes et groupements contributeurs aux fonds, de même que les intercommunalités bénéficiaires, seraient déterminés en fonction du potentiel financier par habitant moyen national. Conformément aux intentions de l'Assemblée nationale, les intercommunalités qui percevraient les ressources de la péréquation devraient reverser au moins 50% de celles-ci à leurs communes. Mais elles seraient libres de choisir les critères qu'elles souhaitent pour cette répartition, alors que les députés avaient décidé que le critère du potentiel fiscal serait "prioritaire".
La part "communes défavorisées" des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP) serait maintenue et n'entrerait pas en compte pour le respect, en 2015, de l'objectif de 2% de ressources redistribuées. A compter de 2012, les FDPTP percevraient "chaque année une dotation de l'État dont le montant est égal à celui qui leur a été versé en 2011 au titre des communes défavorisées", soit 419 millions d'euros.

Plus de stabilité pour la péréquation des droits de mutation

Confirmant les choix de la commission des finances, les sénateurs ont validé de nouvelles règles pour le Fonds national de péréquation des droits de mutation départementaux. Inspirées par le gouvernement, ces règles doivent rendre ce fonds plus stable dans le temps que le fonds imaginé par les députés. Ses ressources seraient redistribuées en fonction du potentiel financier par habitant et du montant des droits de mutation par habitant (voir l'amendement correspondant). Le fonds serait doté de 382 millions d'euros dès l'année prochaine.
S'agissant des fonds départementaux et régionaux de péréquation de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), les sénateurs ont remplacé le critère du potentiel fiscal par celui du potentiel financier. Ce critère qui sert à la détermination des collectivités contributrices aux fonds, ainsi que des bénéficiaires, serait "plus représentatif de la richesse réelle des collectivités territoriales". Selon un amendement de Philippe Adnot, les prélèvements servant à alimenter les fonds de péréquation seraient fondés non pas sur l'évolution du produit, comme initialement prévu, mais sur "le produit même évalué à l'aune du produit moyen par habitant". Le sénateur de l'Aube a voulu empêcher qu'"une collectivité pauvre dont la situation s'améliorerait" soit "plus mal traitée qu'une riche dont la situation serait stable". Ce choix en faveur d'une péréquation fondée sur le "stock" marque indéniablement une rupture par rapport aux dispositifs traditionnels fondés sur les flux. Sur ce point là comme sur d'autres, les sénateurs ont fait preuve d'une certaine audace. Contre l'avis du gouvernement.

 

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