Urbanisme - Le vendeur d'un bien préempté garde une possibilité de recours même après le transfert de propriété
Le Conseil d'Etat a récemment jugé que, à la suite de l'exercice du droit de préemption par une commune, le vendeur dispose d'un intérêt à agir pour exercer un recours en excès de pouvoir à l'encontre de cette décision même après le transfert de propriété. En effet, pour la Haute Juridiction, toute décision de préemption d'un bien apporte une limitation au droit de propriété du vendeur et affecte à ce titre les intérêts de celui-ci qui a, dès lors, toute légitimité pour en demander l'annulation pour excès de pouvoir. Tel est le cas aussi bien lorsque le prix de l'expropriation fixé par le juge est inférieur à celui figurant dans la déclaration d'intention d'aliéner, que dans le cas où la préemption s'est faite à ce dernier prix.
Le fait que le transfert de propriété ait lieu à la date à laquelle le vendeur introduit un recours pour excès de pouvoir contre la décision ne fait pas disparaître l'atteinte portée à ses intérêts et se retrouve de fait sans effet sur son intérêt à agir.
En l'espèce, le Conseil d'Etat a considéré que la Cour administrative d'appel de Versailles n'avait ni commis d'erreur de droit, ni inexactement qualifié les faits de l'espèce en jugeant que les consorts C avaient intérêt à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 22 août 2000 par laquelle la Commune de Houilles avait exercé son droit de préemption sur un terrain leur appartenant, alors même qu'à la date à laquelle ils ont introduit la demande de première instance, le transfert de propriété était déjà intervenu au profit de la commune.
Cet arrêt a pour but de préciser les différentes hypothèses selon lesquelles le propriétaire initial d'un bien préempté a intérêt à agir.
Il est à rapprocher d'un arrêt récent du Conseil d'Etat relatif à la recevabilité d'une demande de suspension (CE, 23 juin 2006, Sté Actilor, req. n° 289549 ; JCP A 2006, act. 566 ; JCP G 2006, IV, 2578 ; JCP N 2007, 1012 ; Dr. adm. 2006, comm. 143).
Ainsi, la Haute Juridiction a jugé que l'acquéreur évincé est fondé à demander la suspension de la décision même si la promesse de vente qui le liait au vendeur comportait une clause de caducité en cas d'exercice du droit de préemption.
Antony Fage, Cabinet de Castelnau
Référence : Arrêt du Conseil d'Etat du 21 mai 2008, Commune de Houilles, requête n° 296156.