L'encadrement des loyers progresse, selon la fondation Abbé Pierre

La troisième édition du baromètre de l’encadrement des loyers publiée ce 5 octobre par la Fondation Abbé Pierre montre la progression de ce dispositif, que ce soit à Paris ou dans certaines villes telles que Montpellier. La fondation appelle le gouvernement à autoriser davantage de villes à le mettre en place.

C'est d'abord à Paris, en 2019, qu'a été mis en œuvre l'encadrement des loyers. Dans la capitale, la part des annonces locatives qui dépassent le loyer-plafond légal est en baisse, s'établissant à 28% selon le baromètre de la fondation Abbé Pierre rendu public ce 5 octobre, alors que ce taux était de 31% l'an dernier et de 35% en 2021.

Ce baromètre de l’encadrement des loyers, qui repose sur l'analyse de 25.000 annonces recensées entre août 2022 et août 2023 et inclut pour la deuxième fois d'autres villes que Paris, témoigne partout de "la progression de ce dispositif". Et montre "que de nouvelles villes s’en emparent et cherchent à le promouvoir".

A Lyon-Villeurbanne, 34% des annonces dépassent le plafond légal (en baisse de 2 points sur un an), à Lille 37% (contre 43% en 2022) et à Montpellier 16%, en baisse de près de moitié (37% l'an dernier). "Les tendances sont encore difficiles à dégager à Plaine-Commune, Est-Ensemble ou Bordeaux, où l’encadrement est très récent", précise la fondation. A l'échelle nationale, la part est de 30% avec un loyer qui dépasse de 198 euros en moyenne le plafond.

L'encadrement des loyers a été rendu possible à titre expérimental par la loi Elan de 2018. Il interdit aux propriétaires de demander aux locataires un montant supérieur à une somme donnée, variant selon les quartiers en fonction de l'état du marché. Il s'applique dans des zones de plus de 50.000 habitants "où existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements". En rappelant, comme le fait la fondation, qu'un logement "peut dépasser les plafonds de loyers prévus par la loi sans être illégal pour autant" avec la pratique du complément de loyer, "si le logement possède des atouts particuliers, en le justifiant et en le faisant apparaitre de manière explicite dans l’annonce".

L'outil mis en place par la fondation permet de mesurer "le taux de respect de l’encadrement par typologie de logement, taille ou quartier". Ainsi, s'agissant des quartiers, à Paris, sans grande surprise, les arrondissements "situés à l’ouest et au centre, là où la pression du marché est la plus forte, concentrent les taux d’annonces non conformes les plus élevés" (48 % dans le 16e, contre 15% dans 13e). On constate aussi que "les plus petits logements sont surreprésentés" : "85% des logements entre 10 et 15 m² font apparaitre des valeurs supérieures aux taux légalement fixés, alors que ce taux baisse à 16% au-dessus de 70 m²". Pour la fondation, cela montre "qu’une application plus efficace de l’encadrement profiterait avant tout aux occupants de petits logements, qui sont principalement des jeunes, des étudiants, des célibataires et des ménages modestes". Autre constat : les locations meublées respectent moins les plafonds que les locations nues ou vides, alors même qu'elles ne cessent de "grignoter le marché".

"Le simple fait que l'encadrement des loyers existe a déjà un effet sur les propriétaires honnêtes", certains utilisant également la norme comme "repère de l'état du marché" pour fixer un prix, a estimé le directeur des études de la fondation, Manuel Domergue. En revanche, le fait qu'il y ait "très peu de sanctions, qui restent abordables, incite certains à tenter le coup", constate-t-il, soulignant que le manque d'information peut également permettre de "bafouer la loi sans que le locataire soit au courant". Actuellement, le contrôle des dépassements de loyers repose sur le signalement par les locataires. Or "trop peu de locataires ont connaissance de la procédure et reculent souvent face à l’ampleur administrative et judiciaire".

La fondation plaide par conséquent pour "la facilitation des recours des locataires abusés, l’augmentation du montant des amendes et leur versement aux collectivités concernées", ainsi que "la possibilité pour celles-ci de moduler le niveau du plafond de loyer".

Elle appelle par ailleurs le gouvernement à valider la candidature des villes qui ont déposé des demandes, telles Marseille ou Bayonne. "L’encadrement devrait s’appliquer de manière pérenne (…) à toutes les agglomérations tendues, à commencer par celles qui sont volontaires (Grenoble, Grand-Orly, Grand Paris Sud Seine-Essonne-Sénart, Cergy-Pontoise, Annemasse…) mais auxquelles le gouvernement n’autorise toujours pas la mise en œuvre de l’encadrement", écrit-elle.