Archives

Congrès AMF - Les acteurs locaux débattent des conséquences du Grenelle sur les documents d'urbanisme

Utilisation économe des espaces naturels, lutte contre l'étalement urbain, maîtrise de l'énergie pour limiter les émissions de gaz à effet de serre : autant d'objectifs du Grenelle de l'environnement que les documents d'urbanisme vont devoir traduire concrètement. Dans le cadre du Congrès de l'AMF, un atelier était consacré à ce sujet ce 18 novembre au cours duquel les acteurs locaux ont pu interroger les représentants de l'Etat et témoigner des difficultés qu'ils peuvent rencontrer dans la mise en œuvre de ces orientations.
Les débats ont d'abord porté sur le contenu des documents d'urbanisme d'orientation - directives territoriales d'aménagement (DTA) et schémas de cohérence territoriale (Scot) - après le Grenelle. Thierry Lemoine, sous-directeur de l'aménagement durable au ministère de l'Ecologie, a reconnu que les DTA telles qu'elles ont existé jusqu'à présent n'apportaient rien par rapport aux Scot. "Elles sont difficiles à décliner sur les territoires concernés. Ce sont des documents opposables mais extrêmement rigides car ils ne sont pas révisables. Leur élaboration par l'Etat prend plus de dix ans et le processus prévoit une phase partenariale limitée."
Le projet de loi Grenelle 2 devrait apporter plus de souplesse à ces outils. Tout d'abord, les six DTA existantes vont devenir révisables et les nouvelles DTA, dénommées directives territoriales d'aménagement et de développement durable (DTADD) ne seront plus opposables. Elles ne couvriront pas forcément tous les champs de l'urbanisme et pourront se focaliser sur une thématique – la mobilité et les transports, par exemple, dans le cas du premier projet de DTADD, celui de la métropole lilloise. Autre changement : leur élaboration conjointe par l'Etat et les collectivités territoriales, dans un délai raisonnable (un an entre la phase de diagnostic et l'approbation par décret en conseil d'Etat, a assuré Thierry Lemoine). Dans certains cas, qui seront selon lui l'exception, l'Etat se réserve la possibilité de les mettre en œuvre par le biais d'un projet d'intérêt général (PIG).

 

Les Scot en voie de généralisation

Les Scot de leur côté sont appelés à monter en puissance. 100 sont aujourd'hui approuvés ou en voie de l'être et 200 en projet. Sur ce total de 300 Scot, plus de 200 concernent des territoires dont la ville centre compte moins de 20.000 habitants. Le projet de loi Grenelle 2 prévoit à la fois de compléter les objectifs assignés aux Scot en y ajoutant la lutte contre l'étalement urbain et les émissions de gaz à effet de serre, la création de logements, le développement des communications numériques et la préservation et la remise en bon état des continuités écologiques. Surtout, il entend généraliser à l'ensemble du territoire au 1er janvier 2017 le principe selon lequel toute zone AU ou N d'un plan local d'urbanisme (PLU) ne pourra être ouverte à l'urbanisation en l'absence de Scot.
"Il y a une volonté forte de l'Etat de couvrir la totalité du territoire avec des Scot mais cela risque de poser de sérieux problèmes d'ingénierie et de moyens financiers, notamment pour les territoires ruraux, vu l'importance des études à réaliser", a prévenu Cédric Lejeune, président du Club des Scot, l'association nationale des techniciens maîtres d'ouvrage des Scot. Il pointe aussi certaines incohérences ou lacunes du texte. "Le Grenelle 2 impose au Scot de préciser des objectifs de réhabilitation du parc de logements privé ou public mais cela risque d'être difficile à faire pour les EPCI non couverts par un plan local de l'habitat et pour les grands territoires." Par contre, le texte aurait dû imposer, selon lui, l'obligation d'une densité maximum de construction dans certains secteurs car "les Scot existants le font déjà". Cédric Lejeune craint aussi que l'obligation de faire un bilan du Scot au bout de 6 ans soit "techniquement impossible sur certains territoires". "Le temps de réponse du territoire aux orientations du Scot dépasse souvent cette échéance, pour que tous les documents d'urbanisme se mettent au diapason. Ce nouveau délai de 6 ans "ne correspond pas à la philosophie du Scot, qui est au départ un document de long terme", a-t-il estimé.
Face aux inquiétudes des élus concernant la densification, Philippe Baffert, chef du bureau de la législation et de la réglementation du ministère de l'Ecologie, s'est voulu rassurant : "Il faut arrêter de faire de l'urbanisme avec de l'arithmétique, le COS étant la règle la plus idiote qui existe. Se fixer comme objectif la réduction de la consommation d'espaces naturels est indispensable mais c'est à partir de projets urbains que l'on voit comment les atteindre et les traduire dans les documents d'urbanisme."

 

Difficultés des PLU communautaires

Autres interrogations : quels sont les avantages et les limites des PLU communautaires que le projet de loi Grenelle 2 entend encourager ? Pour Alain Merly, maire de Prayssas et président de la communauté de communes du canton de Prayssas (5.000 habitants, 10 communes) dans le Lot-et-Garonne, le PLU intercommunal, qui sera effectif en mai 2010, a beaucoup d'avantages. "Nous avons fait du Grenelle avant le Grenelle : notre objectif était de remédier au mitage agricole de notre territoire qui risquait de porter atteinte à sa qualité paysagère. En nous plaçant à l'échelon intercommunal, nous avons donné une vraie carrure à notre projet." Mais cela ne va pas sans embûches, comme l'a relaté Jean-Luc Rotureau, adjoint au maire d'Angers et vice-président d'Angers Loire Métropole, chargé de l'urbanisme. "Dans un PLU communautaire, nous nous dotons de règles uniques sur tout un territoire, ce qui est beaucoup plus compréhensible pour des intervenants extérieurs. Mais cela suppose un partage des objectifs politiques et induit de la lourdeur, des coûts de procédures et des temps de mise au point plus lourd. En outre, la concertation n'est pas facile à mener quand on a une ville centre de 160.000 habitants et des communes de 10.000 habitants dans le même périmètre". Dans la continuité du Grenelle, Thierry Lemoine a aussi rappelé qu'une réflexion était en cours depuis plusieurs mois avec les associations d'élus et les fédérations professionnelles pour faire évoluer la fiscalité de l'urbanisme. L'objectif est à la fois de simplifier le système actuel des taxes d'urbanisme et des participations à l'aménagement et d'inciter à la densification des constructions en vue de freiner l'étalement urbain. Ainsi, chaque construction dépassant un certain seuil de consommation foncière pour une densité donnée serait pénalisée fiscalement. Cette réforme s'inscrit dans le calendrier de la loi de finances pour 2011, a indiqué le sous-directeur de l'aménagement durable ministère de l'Ecologie.

 

Anne Lenormand
 

 

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis