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Patrimoine - Les députés plafonnent la déduction fiscale pour les travaux sur les monuments historiques

A l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2009 (PLF), les députés ont adopté, contre l'avis du gouvernement, un amendement plafonnant le mécanisme de déduction fiscale pour les travaux sur les monuments historiques. Ce plafonnement s'inscrit dans le cadre des mesures générales d'écrêtement des niches fiscales, qui a fait l'objet d'un accord entre le gouvernement et la majorité parlementaire. S'il prévoyait bien de plafonner les déductions au titre de la loi Malraux pour les investissements dans les secteurs sauvegardés (voir encadré ci-dessous), cet accord excluait en revanche les monuments historiques. A l'initiative de Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, les députés ont finalement choisi d'aller plus loin.
L'amendement adopté par l'Assemblée prévoit de distinguer désormais deux cas de figure. Lorsque le monument historique est ouvert au public, la déduction fiscale continue de ne faire l'objet d'aucun plafonnement. Dans ce cas, les membres de la mission d'information ont considéré que "les propriétaires entretiennent et valorisent un patrimoine national. Ce faisant, ils peuvent être considérés comme des auxiliaires de l'Etat. S'ils ne le faisaient pas, l'Etat devrait prévoir des crédits à cet effet". Mais ce maintien du dispositif actuel est assorti d'une double condition. D'une part, un engagement du propriétaire de conserver la propriété du bien pour une durée d'au moins quinze ans (sauf licenciement, invalidité ou décès du contribuable, l'obligation de détention étant en revanche transférée en cas de donation). D'autre part, au fait que l'immeuble n'est pas mis en copropriété ou que cette mise en copropriété a été agréée par les pouvoirs publics. L'objectif du délai de quinze ans est d'éviter de faire financer par la communauté des travaux de rénovation juste avant une vente, ce qui permet au propriétaire du bien d'en augmenter la valeur vénale. Le second cas de figure concerne les monuments historiques non ouverts au public, pour lesquels l'amendement prévoit de plafonner l'avantage fiscal à 200.000 euros par an (ce qui représente toutefois le double de l'avantage prévu pour le dispositif Malraux). Pour éviter des situations kafkaïennes, le texte prévoit cependant d'exonérer de l'obligation d'ouverture au public les monuments labellisés dont la visite des intérieurs ne présente pas nécessairement d'intérêt historique ou artistique ou n'est pas systématiquement possible. L'interprétation de cette disposition ne devrait pas manquer de susciter contestations et contentieux...
Lors de l'examen de cet amendement, le 17 novembre, la ministre de l'Economie s'est montrée favorable aux conditions générales posées à la déduction pour travaux sur les monuments historiques. Elle a en revanche émis un avis défavorable au plafonnement à 200.000 euros pour les travaux sur des monuments non ouverts au public. Christine Lagarde a notamment fait valoir que les monuments historiques, "qu'ils soient ouverts ou non au public, [...] astreignent leurs propriétaires à des sujétions lourdes et à des contraintes particulières en matière de réparations, de respect de l'environnement, d'autorisations préalables ou de conformité des matériaux utilisés. Dès lors, et aux fins d'attractivité du territoire [...], il [lui] paraît légitime que ces dépenses bénéficient d'une déduction non plafonnée, que les monuments soient ou non visités par le public". Des arguments qui n'ont pas été entendus face au mouvement général de plafonnement des niches fiscales.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Références : Projet de loi de finances pour 2009 (en cours d'examen par l'Assemblée nationale).

 

Plafonnement de 100.000 euros pour le régime Malraux
Un autre amendement de la commission des finances est venu plafonner le dispositif fiscal du régime Malraux. Les modifications apportées sont beaucoup plus consensuelles, car elles résultent de l'accord entre le gouvernement et la majorité parlementaire et s'inscrivent dans le droit fil des recommandations de la mission d'information de la commission des finances sur les niches fiscales. Les modifications apportées au régime Malraux sont d'une double nature. D'une part, l'avantage fiscal ouvert au titre des restaurations complètes d'immeubles est converti en réduction d'impôt, assise sur le montant des charges déductibles effectivement engagées. Ces dernières ne seront en revanche pas déductibles du revenu foncier et l'assiette de la réduction d'impôt sera plafonnée à 100.000 euros. Le taux de la réduction d'impôt ainsi accordée est de 25% pour les opérations en ZPPAUP (zone de protection du patrimoine architectural urbain et paysager) et de 35% pour celles en secteur sauvegardé. D'après les calculs de la commission des finances, "ces taux permettraient de maintenir, en moyenne, l'avantage fiscal actuellement constaté dans la mesure où le taux moyen d'imposition des contribuables bénéficiant du régime Malraux est évalué à 31,2%" (abstraction faite de l'effet du plafonnement de l'assiette). Le bénéfice de la réduction d'impôt sera conditionné par un engagement locatif de neuf ans à compter de l'achèvement des travaux (et non plus de leur engagement). L'amendement de la commission des finances sur le régime Malraux ayant fait l'objet d'un avis favorable du gouvernement, il peut donc être considéré comme définitif.