Archives

Services déconcentrés de l'Etat - Les Dreal à l'épreuve du terrain

Fruits de la fusion des DRE (équipement), des Drire (industrie et recherche) et des Diren (environnement), les premières directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) ont été constituées le 1er janvier dans neuf régions. Le point sur les conséquences pratiques de cette nouvelle organisation pour les collectivités qui comptent parmi les principaux interlocuteurs de ces structures.

Déconcentration, regroupement puis mutualisation des services : la Révision générale des politiques publiques (RGPP) rebat les cartes de l'organisation des services territoriaux de l'Etat. Dans le cadre de la réforme des services régionaux dictée par la circulaire Fillon du 15 mai 2008, neuf directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) (1) ont été constituées le 1er janvier sur arrêté préfectoral. Onze nouvelles Dreal suivront en 2010, puis six en 2011. L'outre-mer et l'Ile-de-France feront quant à elles l'objet de dispositions juridiques spécifiques.
Ce nouvel échelon régional est issu de la triple fusion des directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (Drire), de l'équipement (DRE) - lesquelles constituent le gros du bataillon - ainsi que des directions régionales de l'environnement (Diren). "Regrouper ces trois directions va faciliter le travail commun déjà engagé de manière ponctuelle entre celles-ci, et ce avec d'autres acteurs comme les établissements publics, les collectivités ou les services préfectoraux sur certains dossiers nécessitant des compétences multiples, à l'image du schéma de carrières. Ce rapprochement permet de formaliser le partage d'informations et de rendre plus efficace notre action sur le terrain", justifie André Crocherie, directeur régional et départemental de l'équipement, chargé de la construction de la Dreal Midi-Pyrénées.
Pierre angulaire de la refonte des services déconcentrés du ministère de l'Ecologie, de l'Energie, du Développement durable et de l'Aménagement du territoire (Meeddat), la création des Dreal vise à mieux traduire les enjeux nécessairement transversaux du développement durable, à "grenelliser" les politiques publiques locales, à faciliter la lisibilité de l'action du ministère pour les collectivités. Autres bénéfices attendus : un poids, une légitimité, une puissance de communication, une efficacité budgétaire (mutualisation d'achats et de fonctions supports) renforcés.
Avant tout, les Dreal assurent l'expression des besoins territoriaux de l'Etat. Ce dernier ayant réuni en leur sein des compétences auparavant cloisonnées, le bénéfice le plus évident dont profiteront les interlocuteurs habituels de ces structures - au premier rang desquels les associations, entreprises et collectivités - est d'y trouver un interlocuteur, un guichet unique. Ce qui facilitera a priori leurs démarches. "Pour des citoyens et élus locaux, faire face à un seul et non plus trois directeurs régionaux simplifie la vie et permet de mieux identifier les responsabilités", illustre Didier Lallement, secrétaire général du Meeddat. Mais, concrètement, à qui et dans le cadre de quelles missions les collectivités doivent-elles s'adresser à ces services réorganisés ?

 

Une continuité de missions

Selon la circulaire Fillon, un maximum de six services est désormais prévu par Dreal. Conséquence logique des synergies dégagées entre les ex-Drire et Diren : les Dreal conservent les missions régaliennes de contrôle des sites naturels et des installations classées, ainsi que celle de mise en oeuvre des procédures d'autorisation des industriels. Ce qui devrait constituer un apport non-négligeable dans le cas du traitement de dossiers sensibles localement, par exemple ceux ayant trait à l'éolien. "Mais sur le fond, le contact qu'ont les élus et citoyens avec ces dossiers relatifs à la surveillance des installations classées, notamment à travers le rôle d'interface joué par les comités locaux d'information (CLI), reste inchangé et peu impacté par la refonte des services", tempère Nicolas Incarnato, secrétaire général du Syndicat national des ingénieurs des industries et des mines (Sniim), principal corps d'encadrement des Drire.
Nullement exclues des missions de police de l'environnement, les Dreal vont agir dans ce secteur en étroite coordination avec les autres services qui en auront directement la charge : les services de la police de l'eau, assumés par les directions départementales de l'équipement et de l'agriculture (DDEA), et les services de la police de la chasse, de la pêche et la nature exercés par les agents de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage et de l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (Onema). "Les ex-Diren avaient déjà une mission de coordination régionale des politiques eau. Elles l'auront toujours sous la forme unifiée des Dreal : celles-ci vont continuer à fixer des missions, à décliner des objectifs à atteindre en fonction des objectifs ministériels. Mais concrètement, ce sont les DDEA qui mettront ces politiques en œuvre sur le terrain", éclaire Nicolas Incarnato.

 

De nouveaux champs d'action

La plupart des services fusionnés des Dreal font entrer la thématique de l'aménagement durable au cœur de leur action. Ils rempliront donc par exemple des missions de défense de projets de territoire économes en ressources et de lutte contre l'étalement urbain. Il leur reviendra la charge d'articuler ces missions avec des objectifs de développement régional des transports collectifs et de réduction de la pollution de l'air. La préservation de la biodiversité régionale, le développement des énergies renouvelables et la sécurité de l'approvisionnement en énergie entrent aussi dans leur giron.
Le transfert des compétences logement au sein des Dreal va aussi les conduire à prendre en main le développement du logement social et à y promouvoir notamment l'aide à l'accès au logement, l'amélioration de l'offre de logement et le développement des constructions de type HQE. Par ailleurs, un document de la Diren Languedoc-Roussillon ajoute que le champ d'activités de la future Dreal (opérationnelle en 2010 dans cette région) va couvrir aussi deux autres domaines : la sécurité et la circulation routières et, plus généralement, les infrastructures et services de transport.
En résumé, les six grands services que devraient comporter les Dreal - avec des variantes à prévoir selon chacune d'elles (un septième service pourrait être exceptionnellement constitué dans la Dreal Midi-Pyrénées, aux missions historiquement élargies) - seront peu ou prou les suivants : transports, logement, maîtrise d'ouvrage (compétence route de l'ex-DRE), milieux et ressources naturels (ex-Diren), risques industriels et naturels (ex-Drire) et aménagement durable.
Enfin, le volet du développement industriel ayant été transféré aux directions générales des entreprises, de la concurrence et de la consommation, du travail et de l'Etat (Direccte), certains redoutent que les Dreal ne se coupent quelque peu des réalités économiques du territoire. Un écueil à éviter et à surveiller de près.
Un certain retard a été pris sur le terrain dans la mise en place de cette nouvelle organisation et le changement d'identité n'est pas encore entièrement opéré. D'autant qu'un décret en Conseil d'Etat fixant précisément le cadre d'intervention des Dreal est attendu. Les prochains mois seront donc déterminants pour affiner les synergies et amplifier la communication aux élus sur le sujet.

 

Morgan Boëdec / Victoires Editions

 

(1) Les cinq régions pilotes (Nord-Pas-de-Calais, Picardie, Haute-Normandie, Paca et Corse) et les régions Pays-de-la-Loire, Rhône-Alpes, Champagne-Ardenne et Midi-Pyrénées.