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Développement local - Les freins au développement du commerce de proximité persistent

Malgré les efforts des uns et des autres, commerces et services de proximité connaissent "un équilibre très précaire". Notamment en milieu rural. Les premières Assises de la proximité, organisées ce 10 février, en ont témoigné. Parmi les freins mis en avant par les maires, la complexité des dispositifs de financement. Résultat : les outils sont nombreux mais restent sous-utilisés.

Les premières Assises de la proximité se sont tenues ce 10 février à Paris, sous le patronage de Frédéric Lefebvre, le secrétaire d'Etat chargé du Commerce. L'occasion pour les représentants des élus locaux, des commerçants et des réseaux consulaires de faire le point sur l'état actuel des commerces et services de proximité. Un secteur qui, malgré les velléités du gouvernement qui a lancé un plan d'actions du développement du commerce de proximité en 2008, est encore à la peine et vit dans un "équilibre très précaire", comme l'a souligné Vanik Berberian, président de l'Association des maires ruraux de France (AMRF), durant le colloque.
D'après l'Insee, au 1er janvier 2008, 600.000 commerces, sur un total de 830.000, pouvaient être qualifiés de "commerces de proximité". Un nombre important et en légère augmentation depuis 2002, mais qui diminue dans les territoires ruraux, où une commune sur deux ne dispose pas de ce type de commerce. En parallèle, la production de surfaces commerciales se poursuit à un rythme soutenu. En 2010, plus de 4,1 millions de mètres carrés de nouvelles surfaces commerciales ont ainsi été autorisées par les collectivités, après un précédent record à 4 millions en 2009, d'après les chiffres du Procos, la fédération pour l'urbanisme et le développement du commerce spécialisé. 582 projets sont déjà prévus pour les cinq prochaines années.

"Cesser la dictature des normes"

"Quand on examine les politiques publiques, on constate que les outils sont nombreux mais sous-utilisés en matière de commerce de proximité", a estimé Michaël Pouzenc, maître de conférences au département de géographie et d'aménagement à l'université de Toulouse-Le Mirail, citant notamment les pôles d'excellence rurale dont certains sont focalisés sur les services et l'accueil aux populations (santé, services à l'enfance ou aux personnes âgées...) mais peu sur les commerces de proximité. Citant, encore, la politique européenne de développement rural, jusque-là consacrée principalement à l'agriculture, l'universitaire a conseillé : "Commençons par donner au commerce de proximité la place qui devrait être la sienne dans les instances existantes."
Autre frein identifié au développement du commerce de proximité : les normes (sécurité, hygiène...) qui lui sont imposées. "Il faudrait cesser la dictature des normes", a affirmé Vanik Berberian, qui revendique une clause d'appréciation locale pour traiter les problèmes de sécurité et de normes. La complexité des dossiers à remplir pour obtenir des soutiens financiers, que ce soit auprès des fonds européens ou auprès du fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (Fisac), a également été mise en avant. Un phénomène qui expliquerait peut-être la sous-consommation des budgets. "Les crédits sont souvent non consommés parce que les dossiers demandés sont très difficiles à remplir et les délais impossibles à respecter", a affirmé Vanik Berberian. Sur ce point, le gouvernement, par la voix de Pierre Brunhes, sous-directeur du commerce, de l'artisanat et des professions libérales au ministère de l'Economie, a une autre explication : le "formidable succès" de ce fonds qui permet de revitaliser le tissu commercial et artisanal en milieu rural et urbain, avec une augmentation de 35 % des demandes depuis 2008.

Retards

"Le succès se heurte à la réalité budgétaire", a assuré Pierre Brunhes. Pour 2011, le budget du Fisac sera ainsi revu à la baisse, mais une baisse moins forte que prévu avec 64 millions d'euros de paiement, comme en 2010, et une baisse de 18 % des autorisations d'engagement qui atteignaient 78 millions en 2010. "En 2010, 48 millions d'euros issus de ce fonds ont été consacrés à des opérations territoriales, 27 millions d'euros à des opérations rurales et 19,6 à des opérations urbaines. Il y a une très forte demande depuis 2008, qui explique des retards dans le traitement des dossiers", a détaillé Pierre Brunhes.
Autre point de blocage pour le développement du commerce de proximité : le très haut débit. "C'est capital pour maintenir l'activité dans les territoires", a souligné Vanik Berberian, confiant à Localtis qu'il s'agit vraiment de "l'urgence des urgences". "Nous sommes un peu entendus mais pour cela, il faut ramer." Le fonds d'aménagement numérique des territoires (Fant), mis en place par la loi Pintat, est doté de 2 milliards d'euros, bien loin des 20 à 25 milliards jugés nécessaires par l'AMRF pour mettre en place un réseau de très haut débit couvrant au minimum 98 % de la population.
Le président de l'AMRF reste toutefois optimiste. En matière de sauvegarde et de développement des commerces de proximité, "l'intention du gouvernement est là, même si on bloque encore à cause de l'inertie et des cloisons qui existent encore entre les opérateurs, signale-t-il. L'approche de l'échéance électorale va relancer ces questions d'aménagement du territoire."

 

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