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Développement des territoires - Les pays, tremplins pour l'économie sociale et solidaire ?

Avec le projet de loi de modernisation de l'action publique, voté par le Sénat le 8 octobre, les pays reviennent sur le devant de la scène. Le développement de l'économie sociale et solidaire, intégrée d'office dans leur stratégie, leur donne aussi l'occasion de se mettre en avant.

Les pays devraient revenir sur le devant de la scène, avec le projet de loi de modernisation de l'action publique, voté par le Sénat le 8 octobre. Ce texte reconnaît leur action et leur donne la possibilité de se transformer en "pôles ruraux d'équilibre et de solidarité territoriale", sous forme de syndicat mixte, avec un projet de territoire. "Ce projet de loi devrait redonner un nouvel élan aux dynamiques territoriales portés par les pays, grâce à un cadre juridique précis et renouvelé", détaille l'Association de promotion et de fédération des pays (APFP) dans son panorama des pays publié le 2 octobre 2013.
Les pays ont aussi une carte à jouer en matière d'économie sociale et solidaire (ESS). Certains d'entre eux se sont déjà mis en ordre de bataille pour répondre à l'appel à projets lancé mi-juillet 2013 par le ministère délégué en charge de l'ESS pour soutenir la dynamique des pôles territoriaux de coopération économique (PTCE). Des pôles qui seront renforcés par la future loi sur l'ESS qui arrive au Sénat le 6 novembre.
Pour Catherine Sadon, directrice de l'APFP, le lien entre l'ESS et les pays est très clair. "Les pays sont particulièrement intéressés par l'ESS du fait de leur ancrage territorial, a-t-elle signalé lors d'un colloque organisé le 23 septembre sur les pays et l'ESS. Cette économie est porteuse de développement d'emplois et de dynamique économique sur les territoires ruraux notamment."
Patricia Andriot, vice-présidente du conseil régional de Champagne-Ardenne, partage cet avis. "Il y a une connexion évidente entre l'ESS et les statuts des pays", a-t-elle déclaré à cette occasion.
Dans le même temps, l'ESS peut être vitale pour certains territoires. "Souvent les entreprises de l'ESS maintiennent les services et les liens et permettent d'assurer l'attractivité des territoires à travers des offres complémentaires à celles des entreprises classiques", estime Jean-Louis Cabrespines, le président du Conseil national des chambres régionales de l'économie sociale et solidaires (CNCRES). Le développement des services et de l'attractivité des territoires font justement partie des missions des 365 pays qui encouragent les démarches de concertation et de coordination avec un rôle fédérateur et constitue un niveau d'impulsion pour élaborer et conduire une stratégie de développement territorial.

Un enjeu de taille

"Nous agissons sur les services à la population, à adapter en fonction de l'évolution démographique, et de fait cela se fait avec les acteurs de l'ESS", explique à Localtis Christophe Bidaud, directeur du pays de Redon-Bretagne Sud. Dans son pays, une "coordination des acteurs de l'ESS" (Cades) s'est mise en place très tôt, en 1995, regroupant maintenant une centaine d'acteurs de l'ESS sur le pays. Depuis 2007, elle travaille sur la problématique des services à la personne. Le pays de Redon finance certaines de leurs actions et leur donne aussi de la crédibilité. "Ils font du bon travail mais ces actions ne sont pas toujours bien comprises par les élus, car c'est un territoire très industriel qui n'est pas habitué à ce genre de développement économique", précise Christophe Bidaud. L'enjeu est pourtant de taille : dans ce territoire, l'ESS pourrait créer quelques milliers d'emplois…
Les stratégies de développement de l'ESS sont souvent - d'office et depuis longtemps - intégrées aux projets de territoire des pays. Ainsi, la charte du pays de Coutances, en Basse-Normandie, fixe au pays comme objectif de favoriser l'insertion par l'économie et la création d'emploi, de soutenir les complémentarités entre l'ESS et l'économie marchande et de répondre aux besoins non solvables en matière de services aux personnes et de protection de l'environnement. "Pour ce faire, le pays doit mener une politique d'expérimentation sur les possibilités de développement de l'économie mixte en fonction des besoins et des ressources disponibles", indique le document.

Un temps d'avance

Dans ce pays, une union d'économie sociale s'est créée pour explorer le marché de l'économie sociale. C'est l'association Ressol, qui regroupe les acteurs de l'ESS et les initiatives, qui est chargée de ce travail, en lien avec le pays de Coutances, mais aussi avec le pays du Saint-Lois et le parc naturel régional des marais du Cotentin et du Bessin. Ses objectifs : structurer et promouvoir l'ESS sur le territoire, favoriser et développer l'émergence des initiatives des porteurs de projets. Tout un travail de diagnostic a été réalisé en 2012. L'ESS occupe une place importante dans ce territoire avec 14,3% des emplois contre 12,4% à l'échelle régionale. La part que représentent les établissements de l'ESS est légèrement supérieure à la moyenne régionale (10,6% contre 10,1% en Basse-Normandie). "L'association regroupe un certain nombre d'acteurs de l'ESS et réfléchit à la création d'un pôle ESS à l'échelle des deux pays, explique Anne Schnitter, la démarche vient du terrain mais avec l'appui, au niveau de la coprésidence, des élus locaux."
Autre atout de l'appui des pays pour ce type de démarche : l'ingénierie. "Il y a peut-être une question d'échelle pertinente de territoire, mais aussi le fait que les pays disposent d'ingénierie. Nous sommes habitués à travailler à divers échelons, on travaille avec de multiples acteurs dans des secteurs très différents. Du coup, notre façon de travailler nous donne peut-être un temps d'avance en matière d'ESS", détaille Anne Schnitter.

Emilie Zapalski


Panorama des pays
D'après le panorama des pays publié le 2 octobre 2013 par l'Association de promotion et de fédération des pays (APFP), au 1er janvier 2013, la France compte 365 pays. Trois ont disparu à la suite de la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales. Ils couvrent actuellement 80% du territoire français et concerne 49% de la population. Leur budget moyen est de 600.000 euros, essentiellement dédié au financement de l'ingénierie. Il est issu à 34% des établisements publics de coopération intercommunale (EPCI), à 31% des régions, et à 5% des départements. Parmi leurs domaines d'action : les démarches de Scot (près de deux tiers des pays sont couverts en tout ou partie par un Scot), le développement de l'emploi en milieu rural, les services à la population, la mobilité, la santé, et la transition énergétique.
E.Z.

 

 

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