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Edition spéciale - Les réformes territoriales à la croisée des chemins

Comme chaque année, notre petite parenthèse hivernale liée aux fêtes de fin d'année nous donne l'occasion de geler un moment le fil continu de l'actualité. Parfois, cela ne fait pas de mal. Nous vous laissons avec une bonne petite pile de lecture constituée à la fois d'articles fraîchement rédigés et de reprises d'articles récents, comme autant de points de repères sur l'actualité des dernières semaines voire des derniers mois.

Au moment où nous interrompons ainsi la publication de nos éditions quotidiennes, bien des dossiers sont en suspens. A commencer par le premier des dossiers 100% collectivités, celui de la réforme territoriale. Le projet de fusion des régions a été définitivement adopté par le Parlement, suite à un ultime vote de l'Assemblée mercredi 17 décembre. Comme le veut le fonctionnement parlementaire, c'est la version des députés qui a eu gain de cause, avec une France à 13 régions. Mais tout n'est pas encore tout à fait joué, puisqu'un recours devant le Conseil constitutionnel vient d'être déposé. Principalement parce que le texte serait en "contradiction avec le principe de libre administration des collectivités territoriales" dans la mesure où "aucune procédure de consultation des conseils régionaux et généraux concernés n’a été organisée".
On attend le verdict avec curiosité. Car il faut bien l'avouer, on a encore du mal à croire que cette nouvelle carte de France, que personne n'aurait dessinée de la sorte il y a six ou sept mois, ait été votée "malgré tout" et soit en passe de devenir réalité. Lorsqu'en juillet dernier, Localtis retraçait le film des événements de la réforme sur la première partie de l'année 2014, on était encore tenté de parler de politique-fiction. Aujourd'hui, les communicants en sont à proposer leurs services pour trouver de nouveaux noms aux nouvelles régions… pendant que les élus des territoires risquant de perdre "leur" capitale régionale font cause commune et demandent au gouvernement une évaluation précise des conséquences de la réforme en termes de réorganisation des services de l'Etat.

Les départements dans le virage

Et puis il reste l'autre gros morceau de la réforme territoriale, le projet de loi Nouvelle Organisation territoriale de la République (Notr) sur les compétences. Là, les choses ne font que commencer puisqu'on en est au stade de la première lecture au Sénat, où seule la discussion générale a eu lieu, après passage en commission. L'examen des articles en séance doit démarrer le 13 janvier 2015, selon la procédure accélérée, ce qui raccourcira les délais de la navette.
Les amendements adoptés en commission des lois notamment ont clairement montré les divergences de vues entre sénateurs – y compris de gauche – et gouvernement sur les principales dispositions du texte. Dont le transfert aux régions des routes, des collèges et des transports scolaires. Des compétences que les départements estiment logique de conserver… et dont les élus régionaux ne sont pas franchement demandeurs. En commission des affaires sociales, il s'est entre autres agi pour les sénateurs de s'opposer au transfert systématique des services départementaux d'action sociale aux métropoles.
Les débats vont forcément être complexes et tortueux. On n'oubliera pas que ce projet de loi "Notr" avait été élaboré et présenté alors que la suppression pure et simple du département, après une phase de dévitalisation, était d'actualité. Logique, alors, que le texte ait prévu d'attrophier les compétences départementales.
Or depuis, les choses ont bien changé. Manuel Valls indiquait à la mi-septembre qu'il imaginait désormais trois scénarios selon les départements - autrement dit qu'ils ne seraient pas supprimés partout. Puis, fin octobre, venant réexpliquer devant les sénateurs le sens de sa réforme, le Premier ministre confirmait qu'en fin de compte, le département avait "toujours un avenir", y compris après 2020. Des propos qu'il a ensuite à nouveau tenus début novembre devant les présidents de conseils généraux réunis en congrès.

Pour les régions, l'épreuve du feu

Paradoxe de la réforme territoriale, tout se passe comme si c'était les relations entre l'Etat et les régions qui s'étaient crispées ces dernières semaines : baisse des dotations, amputation des crédits d'animation des pôles de compétitivité, volte-face sur la régionalisation de l'emploi... Le tout en pleine négociation autour des contrats de plan Etat-régions dotés de 12,5 milliards d'euros, soit, à périmètre équivalent, beaucoup moins que lors de la précédente programmation.
Nantes, Dijon, Brest… Manuel Valls a pris son bâton de pèlerin pour un tour de France des régions afin d'y signer des "protocoles d'accord" préfigurant les futurs contrats. Car ces derniers ne seront signés qu'au printemps, après les élections départementales. Si les contrats de plan ont du retard, la France peut en revanche se féliciter d'être l'un des premiers Etats membres à pouvoir commencer la programmation des fonds européens 2014-2020. En effet, Bruxelles a donné son feu vert à tous les programmes opérationnels régionaux Feder/FSE  pour la période 2014-2020. Pour les régions, c'est l'épreuve du feu : elles géreront elles-mêmes une grande partie de la manne des 27,5 milliards de fonds européens attribués à la France.
Alors que le schéma régional d'aménagement et de développement durable du territoire va être rendu prescriptif par la loi Notr, la politique d'égalité des territoires de l'Etat, elle, commence enfin à se dessiner. Au terme des assises de la ruralité de cet automne, Sylvia Pinel a présenté, le 17 décembre, les onze priorités assignées au futur comité interministériel à l'égalité des territoires qui se tiendra le 13 février. Cinq ans après le précédent comité de ce genre ! Mais ce catalogue d'actions, dont le financement n'est pas précisé, fait davantage figure de cache-misère que de "changement de regard" vis-à-vis des territoires, comme s'en sont émus les maires ruraux. Toutefois, l'une de leurs grandes revendications - le rééquilibrage des dotations - pourrait enfin se concrétiser, après avoir été écartée du budget 2015.

Ca chauffe...
Après de nombreux reports, le projet de loi sur la transition énergétique, qui fait l'objet d'une procédure accélérée au Parlement, a été adopté par l'Assemblée nationale le 14 octobre dernier. Il ne sera pas examiné en séance publique au Sénat avant février prochain. Le texte devra en tout cas être définitivement adopté au cours du deuxième trimestre 2015, selon " l'agenda des réformes" arrêté par le Premier ministre le 12 décembre. Le gouvernement a fait de cette loi qui s'appuie largement sur les initiatives des territoires une réforme emblématique dans la perspective de la COP 21, que Paris accueillera du 30 novembre au 11 décembre 2015. Cette conférence des Nations Unies sur le climat dont la finalité est de parvenir à un accord des 195 Etats représentés pour limiter à 2°C le réchauffement climatique d'ici la fin du siècle sera d'ailleurs précédée par deux événements internationaux pilotés par les régions, le sommet "Medcop" à Marseille et le sommet mondial Climat et territoires à Lyon.

 

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