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Politique du vélo - Les villes cyclables réclament un changement de braquet

Le Club des villes et territoires cyclables souhaite que le prochain projet de loi de finances comporte des incitations économiques à l'usage du vélo. Il demande à ce que ces mesures (crédit d'impôt ou chèque vélo, indemnité vélo versée par l'employeur) s'accompagnent d'un plan national pour accroître la part du vélo dans les déplacements.

Dans le débat actuel sur l'utilisation de la contribution climat-énergie, ou taxe carbone, le Club des villes et territoires cyclables, qui regroupe un millier de collectivités, veut faire entendre sa voix. Il a présenté ce 8 septembre deux nouvelles mesures d'incitation à l'usage du vélo qu'il souhaite voir inscrites dans le projet de loi de finances pour 2010. La première consiste en une aide à l'acquisition d'un vélo par un crédit d'impôt ou un "chèque vélo". "Comme il existe une prime à la casse pour l'achat de voitures non polluantes, nous réclamons que chaque primo-accédant au vélo bénéficie d'une aide car le vélo n'a que des bénéfices en termes de santé publique, d'environnement et sur le plan économique car il ne consomme pas d'énergies fossiles", a justifié Jean-Marie Darmian, président du Club des villes et territoires cyclables, maire de Créon et conseiller général de Gironde. Le montant du crédit pourrait être fixé soit en fonction du coût du vélo (40% du prix, par exemple) avec un plafond, soit selon un montant forfaitaire (par exemple 200 euros pour un vélo ordinaire et 400 euros pour un vélo à assistance électrique ou VAE). De telles mesures existent déjà dans des pays proches. En Italie, par exemple, chacun peut acheter son vélo (VAE compris) avec une remise de 30% et le gouvernement compense le manque à gagner au vendeur du vélo. Aux Pays-Bas, tout un éventail de mesures incitatives est déployé : exonération de taxe si l'on achète un vélo par l'intermédiaire de son employeur, un vélo offert tous les deux ans par les employeurs à leurs salariés, acquisition de lots, sur le modèle des miles aériens, en fonction des kilomètres parcourus, etc.

La deuxième mesure proposée par le Club des villes et territoires cyclables vise les salariés. Il s'agit d'une indemnité versée par l'employeur à tous ceux qui choisissent leur vélo personnel comme mode principal de déplacement. L'abonnement à des services publics de location de vélos est déjà pris en compte dans la participation des employeurs aux frais de transports de leurs salariés depuis l'adoption de la loi de financement de la Sécurité sociale en octobre 2008. La nouvelle indemnité proposée par le Club serait plafonnée à 200 euros comme c'est déjà le cas pour les frais de carburant, dans le cadre de la prime transport. Le montant de l'aide pourra être défini lors de la mise en place d'un plan de déplacements d'entreprise (PDE). Si le salarié réside hors du périmètre de transport urbain (PTU), l'indemnité doit pouvoir être couplée au remboursement de son transport public. S'il habite dans le PTU et utilise à la fois son vélo et les transports publics pour aller travailler, il doit pouvoir être remboursé en partie de ses frais liés au vélo. "Le vélo prend de plus en plus d'importance dans les déplacements des salariés, dans les rabattements vers les gares, l'accès aux entreprises et les PDE et PDA [plans de déplacement d'administration, NDLR] en tiennent compte, a expliqué Jean-Marie Darmian. Mais la moitié des déplacements de proximité (moins de trois kilomètres) continuent à se faire en voiture. Plutôt que des mesures coercitives, il faut encourager l'usage du vélo dans le cadre de démarches collectives."
"Face au défi climatique et énergétique dans nos villes, il y a urgence à changer de braquet", a souligné Alain Jund, vice-président du Club et maire-adjoint de Strasbourg. Il a rappelé que même dans la capitale alsacienne, pourtant présentée comme un modèle pour sa politique d'aménagements cyclables, la part du vélo dans les déplacements plafonne à 10% alors que de l'autre côté du Rhin, à Karlsruhe, elle avoisine les 30%. "Il y a une marge de progression énorme et nos propositions arrivent à point nommé".

 

Dans l'attente d'un signal fort

 

Pour le Club, les collectivités territoriales ont déjà fait beaucoup pour le vélo, qu'il s'agisse de la réalisation d'infrastructures, d'aménagements de voirie, de mise en oeuvre de services vélo (stationnement, location, libre-service), de promotion dans les écoles et auprès des habitants. Il demande maintenant au gouvernement d'accompagner cette dynamique. "Nous avons besoin d'un signal fort pour encourager un développement massif du vélo, à travers des incitations économiques et un plan national du vélo, à l'instar de l'Allemagne, de l'Italie ou de l'Espagne", a souligné Jean-Marie Darmian. L'enjeu n'est pas seulement de répondre aux besoins des citadins. "La politique du vélo doit s'inscrire dans une démarche intermodale et partenariale", a-t-il rappelé. C'est par une meilleure articulation avec les transports urbains et régionaux qu'il peut constituer une véritable alternative à la voiture, y compris en zone périurbaine ou rurale, pour permettre de se rapprocher d'une gare ou d'une station. Si la prise en compte du vélo dans les politiques de déplacements s'est améliorée ces dernières années, il reste encore des obstacles à surmonter : le vandalisme et le vol, le manque de places de stationnement pour les vélos, le franchissement des routes à quatre voies, de plus en plus nombreuses en périphérie des villes. Le Club attend aussi des évolutions plus rapides du Code de la route pour que de nouvelles règles comme l'autorisation du tourner à droite au feu, aujourd'hui expérimentées dans les communautés urbaines de Strasbourg et Bordeaux, puissent être généralisées.

Toutes ces questions seront débattues les 8 et 9 octobre à La Rochelle lors du 18e Congrès du Club sur le thème "Vélo = liberté, égalité et fraternité". Une dimension citoyenne que le Club entend promouvoir auprès de tous ceux qui rechignent encore à l'usage du vélo.

 

Anne Lenormand