Logement des agents publics : un rapport au gouvernement sonne la "mobilisation générale"

Il est urgent de bâtir "une vraie politique du logement pour les agents publics", plaide le député David Amiel, dans son rapport sur le logement des "travailleurs des services publics", remis le 17 avril. Parmi 25 propositions, il préconise de nouvelles constructions, plus de fléchage au bénéfice des agents publics et une mutualisation des ressources existantes.

"Une mobilisation générale" doit être lancée "pour mieux loger les agents publics", assure le député (Renaissance) David Amiel dans un rapport qu'il a remis mercredi 17 avril aux ministres en charge de la Fonction publique et du Logement. Stanislas Guerini et Guillaume Kasbarian présidaient le troisième comité interministériel au logement des agents publics, au centre hospitalier universitaire de Bordeaux, en présence d'employeurs publics et d'acteurs du secteur du logement.

Les agents publics n'échappent pas à la pénurie de logements qui touche les zones les plus tendues. En 2021, pour 90.000 demandes de logement d’agents de l’État, 14.000 auraient été satisfaites. Et "les autres versants sont touchés par un défi de la même ampleur", estime le député en mission. Pour qui la situation est "insoutenable".

Étendre la garantie Visale

Avec le gel du point d'indice depuis 2010, les agents publics ont vu leur pouvoir d'achat s'éroder, d'autant que les prix de l'immobilier ont grimpé. Parfois, ils ne peuvent pas se loger à proximité de leur lieu de travail, ce qui les oblige à effectuer des trajets longs et fatigants. Les zones concernées deviennent de ce fait moins attractives pour les agents et certains services publics sont dès lors "dans une situation périlleuse", s'alarme le député de Paris. Quand les agents parviennent à se loger, c'est au prix de conditions de vie dégradées. "Je suis deux fois en prison. Dans la journée, quand je travaille. Le soir, quand je rentre chez moi", relate un gardien de prison en poste à Paris cité dans le rapport.

Face au problème, "l’action des administrations publiques en faveur de leurs agents reste inégale et dispersée malgré une tendance récente à la hausse", constate-t-il. Dans la fonction publique territoriale, des employeurs ont pris des initiatives qui demeurent "mal connues". En particulier, des communes et intercommunalités réservent des logements sociaux au bénéfice de certains de leurs agents.

"Un sursaut est possible immédiatement pour mieux mobiliser le parc existant" en faveur des agents publics, estime David Amiel. Pour faciliter l'accès de ceux-ci au marché locatif privé, il propose notamment d'attribuer le bénéfice de la garantie Visale - dispositif de caution gratuite géré par Action Logement - aux agents de plus de 30 ans, dans les mêmes conditions que pour les salariés du privé. Les agents respectant cette condition d'âge et qui gagnent moins de 1.500 euros nets par mois, ou qui sont en mobilité professionnelle, pourraient ainsi voir leurs candidatures plus facilement retenues par les propriétaires bailleurs. L'extension à la fonction publique territoriale, "qui devrait faire l’objet de discussions avec les associations représentatives" de ses agents, "pourrait se faire sur la base d’une adhésion volontaire, à la décision de chaque collectivité", précise le rapport.

Action Logement du secteur public

En outre, des logements intermédiaires peuvent être "fléchés" vers des agents publics, et ce dans le cadre de "partenariats entre les bailleurs et de grands employeurs publics", suggère-t-il aussi.

Le député pousse pour aller plus loin, à savoir ce qu'il appelle "la reconstruction d’une vraie politique du logement pour les agents publics". Il s'agirait d'accélérer la construction de logements sociaux et intermédiaires pour les agents publics, notamment par une mobilisation renforcée du foncier public. Ces logements construits sur des terrains de l'État, des collectivités ou des hôpitaux seraient fléchés en priorité vers les agents publics. Le député préconise aussi qu'il soit possible d'attribuer les logements concernés à certains agents du fait de la nature de leur métier (par exemples des aides-soignants).

Par ailleurs, le député appelle à la mise en place d'"une structure professionnalisée capable d’élaborer une stratégie d’ensemble pour le logement des agents publics, de porter des projets communs aux différents employeurs publics et d’apporter une aide en ingénierie sur le terrain". Il la baptise "Action Logement du secteur public", en référence à la structure qui, grâce aux cotisations des entreprises de plus de dix salariés, aide les salariés à se loger. "Sa mise en place progressive se ferait en concertation avec les représentants des personnels et les employeurs publics des trois versants", souligne le rapport.

Des moyens supplémentaires

Mais toutes ces actions ne suffiront pas si les employeurs publics ne consacrent pas davantage de moyens financiers dans le logement de leurs agents. Demeurant libres de fixer leurs objectifs, les employeurs territoriaux pourront se référer utilement aux pratiques mises en place par l'État et les hôpitaux, juge le rapport. Qui, alors que le gouvernement recherche activement 10 milliards d'euros d'économies pour 2024, plaide pour une augmentation d'une centaine de millions d'euros par an des aides de l'État en faveur du logement de ses agents. Pour indication, celles-ci ont atteint 216 millions d'euros en 2022. L'idée est de parvenir à rejoindre le niveau d'effort réalisé par le secteur privé (entre 122 et 162 euros par salarié en 2023).

Les propositions du rapport "feront l’objet de groupes de travail dédiés avec les partenaires sociaux dès les prochains jours", indique le gouvernement. En sachant que les propositions de nature législative pourront être inscrites dans le projet de loi pour l’efficacité de la fonction publique qui sera présenté à la rentrée.

La délégation interministérielle au logement des agents publics (Diloap) sera la cheville ouvrière des améliorations voulues par le gouvernement. Ce dernier lui a remis mercredi sa feuille de route. D'ici juin, elle devra piloter "un travail de simplification visant à accélérer et sécuriser les opérations créant de l'offre de logements sur du foncier public". À la même échéance, elle devra aussi proposer au gouvernement "une stratégie pluriannuelle définissant les objectifs et priorités de la politique interministérielle du logement" des fonctionnaires.