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Loi Climat et Résilience : ce qu'il faut retenir des mesures sur l'alimentation

Localtis poursuit sa série d'articles récapitulatifs des principales dispositions de la loi Climat et Résilience du 22 août 2021 intéressant les collectivités territoriales. Après le titre "Consommer" et les mesures de verdissement de la commande publique, troisième volet de ce décryptage avec les dispositions sur la restauration collective, cantines scolaires en tête, et la promotion d'une "alimentation saine et durable pour tous peu émettrice de gaz à effet de serre".

Titre VI Se nourrir

Chapitre 1er - Soutenir une alimentation saine et durable pour tous peu émettrice de gaz à effet de serre

Menus végétariens et restauration scolaire (art.252 et 254). À la suite de l'expérimentation qui était initialement prévue par la loi Egalim jusqu'au 1er novembre prochain, les gestionnaires, publics et privés, des services de restauration collective scolaire ont désormais l'obligation de proposer au moins une fois par semaine un menu végétarien dans les cantines scolaires. La loi propose en outre aux collectivités territoriales volontaires d'expérimenter la mise en place d'un menu végétarien quotidien dans les services de restauration collective dont elles ont la charge pour une durée de deux ans à compter de la date de promulgation de la loi. Cette expérimentation doit faire l'objet d'"une évaluation, notamment sur son application territoriale, sur son impact sur le climat, sur l'évolution de l'approvisionnement des établissements concernés en produits de qualité (…), sur le gaspillage alimentaire, sur les taux de fréquentation, sur le coût des repas et sur la qualité nutritionnelle des repas servis". Le bilan de cette évaluation sera présenté par le gouvernement au Parlement et rendu public "au plus tard six mois avant le terme de l'expérimentation". Une concertation entre les collectivités territoriales, leurs groupements et le représentant de l'État dans la région est organisée pendant la durée de l'expérimentation afin de veiller à sa mise en œuvre, notamment dans le cadre des comités régionaux pour l'alimentation.
Dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi, le gouvernement doit proposer aux personnes morales de droit public et aux entreprises privées chargées de la restauration collective publique faisant partie des collectivités territoriales volontaires participant à l'expérimentation "des outils d'aide à la décision, à la structuration des filières d'approvisionnement sur leur territoire, à la formulation des marchés publics et à la formation des personnels concernés, nécessaires à la proposition quotidienne d'un menu végétarien." Les opérateurs de restauration collective devront de leur côté mettre en œuvre "l'ensemble des moyens nécessaires pour garantir la qualité et l'équilibre nutritionnel des repas et l'atteinte des objectifs prévus au présent chapitre, y compris par la formation de leur personnel. Ces formations concernent notamment la diversification des protéines dans les menus, la lutte contre le gaspillage alimentaire, les approvisionnements durables et de qualité et la substitution du plastique."
Il est par ailleurs prévu d'interdire le recours à des denrées issues de cultures cellulaires ou tissulaires dérivées d'animaux ou qui sont isolées ou produites à partir de cultures cellulaires ou tissulaires dérivées d'animaux dans les services de service de restauration scolaire et universitaire (art. 254).

Réservation de repas dans les cantines (art.256). Afin de limiter le gaspillage alimentaire, les gestionnaires, publics ou privés, des services de restauration collective dont les personnes morales de droit public ont la charge pourront proposer sur la base du volontariat et à titre expérimental, pour une durée de trois ans à compter de la promulgation de la loi, une solution de réservation de repas afin d'adapter l'approvisionnement au nombre de repas effectivement nécessaires, y compris pour chacune des alternatives lorsque des choix sont possibles. Cette expérimentation, dont les modalités d'application doivent être précisées par décret, fera l'objet d'une évaluation portant principalement sur l'évolution du gaspillage alimentaire, l'évolution des taux de fréquentation et la satisfaction des usagers des services concernés. Les résultats seront transmis au Parlement au plus tard six mois avant son terme.

Possibilité pour les collectivités de donner des instructions en matière de restauration scolaire aux intendants des collèges et des lycées (art.258). La collectivité de rattachement d'un établissement public local d'enseignement doit faire connaître au chef d'établissement qui gère le service de demi-pension "les objectifs fixés en matière d'approvisionnements de produits agricoles et de denrées alimentaires définis".

"Chèque alimentation durable" (art.259). Dans un délai de deux mois à compter de la promulgation de la loi, le gouvernement doit remettre au Parlement un rapport intermédiaire sur les modalités et les délais d'instauration d'un "chèque alimentation durable" ainsi que sur les actions mises en place en la matière.
Puis dans un délai de six mois, il doit fournir au Parlement un rapport sur les conditions de mise en œuvre de ce chèque - personnes bénéficiaires, produits éligibles, valeur faciale, durée, modalités d'évaluation et de suivi, de distribution, mesures à mettre en œuvre pour assurer une bonne adéquation entre l'offre et la demande des produits éligibles, dispositifs d'accompagnement de ce chèque concernant la sensibilisation à une alimentation de qualité et financement du dispositif.

Objectifs environnementaux sur le maintien des prairies permanentes et sur le linéaire de haies (art.263). "L'État veille à la promotion de la préservation et de l'implantation des haies et des alignements d'arbres intraparcellaires, en prenant en compte les besoins constatés dans les territoires, dans le but de stocker du carbone, de préserver les abris des auxiliaires de cultures, de lutter contre l'érosion des sols et d'améliorer la qualité et l'infiltration de l'eau dans le sol", indique le texte. Il revient aussi à l'État de veiller "à la promotion de la préservation des surfaces agricoles en prairies permanentes et de leur gestion durable, associant production agricole et externalités positives en termes de stockage de carbone et de biodiversité".

Ajout d'objectifs au plan national de l'alimentation et de la nutrition (art.265). Cet article, qui entre en vigueur le 1er juillet 2023, stipule que le programme national pour l'alimentation "prend en compte notamment la souveraineté alimentaire, la justice sociale, l'éducation alimentaire de la jeunesse, notamment la promotion des savoir-faire liés à l'alimentation et la lutte contre le gaspillage alimentaire. Pour assurer l'ancrage territorial de cette politique, il précise les modalités permettant d'associer les collectivités territoriales à la réalisation de ces objectifs. Il propose des catégories d'actions dans les domaines de l'éducation et de l'information pour promouvoir l'équilibre et la diversité alimentaires, l'achat de produits locaux et de saison ainsi que la qualité nutritionnelle et organoleptique de l'offre alimentaire, dans le respect des orientations du programme national relatif à la nutrition et à la santé."

Projets alimentaires territoriaux (art.256). Une section 2 intitulée "Politique alimentaire territoriale" est créée au sein du code rural et de la pêche maritime, comprenant les articles L. 111-2-1 et L. 111-2-2. Le rôle des projets alimentaires territoriaux (PAT) est complété. S'ils ont toujours vocation à participer "à la consolidation de filières territorialisées, à la lutte contre le gaspillage et la précarité alimentaires et au développement de la consommation de produits issus de circuits courts, en particulier relevant de la production biologique", ils pourront le faire "dans le cadre d'une démarche collective de certification environnementale". Les PAT doivent aussi "favorise[r] la résilience économique et environnementale des filières territorialisées pour une alimentation saine, durable et accessible et contribue[r] à la garantie de la souveraineté alimentaire nationale." Dans les espaces densément peuplés, ils doivent en outre participer au renforcement de l'autonomie alimentaire locale et concourir au développement de l'agriculture urbaine.
À l'initiative de l'État et de ses établissements publics, des collectivités territoriales, des associations, des groupements d'intérêt économique et environnemental, des agriculteurs et d'autres acteurs du territoire, ces projets sont formalisés sous la forme d'un contrat entre les partenaires engagés."
Les PAT sont compatibles avec les objectifs définis dans le plan régional de l'agriculture durable et prennent en compte la stratégie nationale pour l'alimentation, la nutrition et le climat, précise encore le texte. Un réseau national des PAT doit suivre leur déploiement, mettre en avant les bonnes pratiques et construire des outils méthodologiques au service des collectivités territoriales. 
Enfin, "au plus tard le 1er janvier 2023", l'État doit veiller à ce que soit déployé "au moins un projet alimentaire territorial par département".

Communication de données aux collectivités territoriales dans le domaine de l'alimentation (art.267). "Pour la mise en œuvre de leurs actions dans le domaine de l'alimentation et sous réserve du respect du secret des affaires, l'État peut communiquer aux collectivités territoriales qui en font la demande les données de nature technique, économique ou socio-économique relatives à la production, à l'importation, à la transformation, à la commercialisation et à la consommation de ces produits transmises par les producteurs, transformateurs et distributeurs de produits alimentaires, quelle que soit leur forme juridique", stipule le texte.


Chapitre II - Développer l'agroécologie


Interdiction d'engrais de synthèse (art.269). Au 1er janvier 2027 au plus tard, le texte interdit à l'État, aux collectivités territoriales et à leurs groupements ainsi qu'aux établissements publics d'utiliser ou de faire utiliser des engrais de synthèse pour l'entretien des espaces relevant de leur domaine public ou privé, hors terrains à vocation agricole. La mise sur le marché, la délivrance, l'utilisation et la détention de ces engrais pour un usage non professionnel sont interdites, de même que leur utilisation non agricole dans les propriétés privées.
Cette interdiction ne s'applique pas aux équipements sportifs, "y compris aux hippodromes et terrains d'entraînement de chevaux de courses, pour lesquels l'utilisation d'engrais de synthèse est nécessaire afin d'obtenir la qualité permettant la pratique sportive", précise le texte. "Au plus tard le 1er janvier 2025, sous l'égide des ministres chargés des sports et de l'environnement, en concertation avec les acteurs concernés, est élaborée une feuille de route, basée sur un bilan de l'utilisation d'engrais de synthèse pour l'entretien des équipements sportifs et de ses impacts, qui définit une trajectoire, avec des échéances et des objectifs chiffrés, permettant une généralisation de bonnes pratiques environnementales en matière de gestion de la fertilisation des équipements sportifs", ajoute-t-il. Les interdictions ne s'appliquent pas non plus aux engrais utilisables en agriculture biologique et pour l'entretien de monuments historiques. Un décret doit définir les modalités d'application de cet article et un rapport est attendu dans les deux ans suivant la promulgation de la loi pour évaluer les conditions de mise en œuvre de l'interdiction des engrais de synthèse.

Lutte contre la déforestation importée (art.270). Le titre Ier du livre Ier du code de l'environnement est complété par un article L. 110-6 qui stipule que l'État élabore et met en œuvre une stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée, actualisée au moins tous les cinq ans. Cette stratégie, qui a été lancée fin 2018, vise à "mettre fin à l'importation de matières premières et de produits transformés dont la production a contribué, directement ou indirectement, à la déforestation, à la dégradation des forêts ou à la dégradation d'écosystèmes naturels en dehors du territoire national". La plateforme nationale de lutte contre la déforestation importée mise en place dans le cadre de cette stratégie "vise à assister les entreprises et les acheteurs publics dans la transformation de leurs chaînes d'approvisionnement au profit de matières plus durables, traçables et plus respectueuses des forêts tropicales et des écosystèmes naturels, ainsi que des communautés locales et des populations autochtones qui en vivent", précise le texte. Dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi, le gouvernement doit remettre au Parlement un rapport sur la mise en œuvre de cette plateforme et sur les conditions de mise à disposition des données économiques et cartographiques qu'elle contient.

 
Référence : loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, JO du 24 août 2021, texte n°1.