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Loi Macron : trois ans après, un bilan en demi-teinte

L'objectif principal de la loi Macron de 2015 a été atteint mais des difficultés persistent, constate un rapport parlementaire. Il avance de nombreuses propositions comme la création à Paris d'une zone touristique internationale unique (ZTI), absorbant les 12 existantes.

Trois ans après son adoption, la loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, dite "loi Macron", "a atteint son objectif principal, visant à libérer les énergies créatrices et à déverrouiller certains blocages d'ordre réglementaire ou professionnel" mais de nombreuses difficultés persistent. C'est le constat du rapport de la mission d'information commune sur l’application de cette loi préparée par l’ancien ministre de l’Economie Emmanuel Macron et adoptée par l’usage de l’article 49.3, après de vives contestations. Des conclusions présentées le 28 novembre 2018 devant les commissions des affaires économiques, du développement durable, des affaires sociales et des lois de l'Assemblée nationale. Exemple pour l'ouverture dominicale des commerces objet de fortes oppositions d’élus et de salariés. D'après la mission, présidée par le député LREM Yves Blein, la persistance et l'élargissement du travail dominical dans les zones touristiques internationales (ZTI) ont permis un développement notable du chiffre d'affaires et de l'emploi. Pourtant, reconnaissent les parlementaires, "les données en ce domaine demeurent imprécises". La réforme entre cependant dans les mœurs et les "personnels semblent aussi y trouver leur compte". Ainsi, dans la capitale, 28,2% des commerces situés dans une ZTI ouvrent désormais le dimanche, contre 17,5% avant l'adoption de la loi. Mais le bilan dans les régions est plus mitigé et des différences d'impact sont notées selon la taille des commerces. Ainsi, les grands magasins ont tiré bénéfice de la réforme, tandis que les petits commerces, souvent familiaux, qui bénéficiaient déjà d'une dérogation pour l'ouverture du dimanche, doivent maintenant accorder à leurs salariés des compensations. Les auteurs avancent plusieurs propositions dans ce domaine : faire de Paris une ZTI unique, contre douze actuellement, étendre le nombre de gares où les commerces peuvent ouvrir le dimanche, disposer d'études statistiques et économiques complètes pour juger de l'impact de ces mesures en matière de chiffre d'affaires et d'emplois, et créer de nouvelles ZTI dans les stations et villes touristiques où se manifeste un consensus local. Les parlementaires se sont aussi penchés sur la montée en puissance des plateformes de réservation en ligne de type Airbnb sur le marché de la location, qui pose "de graves problèmes de déséquilibres"  et provoque "un effet d’éviction des locataires modestes, très inquiétant". Ils proposent d'instituer un taux d’imposition forfaitaire de 5% de leur chiffre d’affaires, déductible de l’assiette de l’impôt sur les sociétés.

Une évaluation précoce pour la privatisation des aéroports de Nice et Lyon

Autre exemple positif de l'impact de la loi Macron : la libre installation des notaires, qui a permis à partir de plus de 36.000 dossiers de candidatures, de nommer 1.620 notaires libéraux. 700 nouveaux notaires devraient en outre pouvoir s'installer d'ici 2020. Enfin, l'ouverture à la concurrence du transport par autocar a permis d'augmenter largement le nombre de voyageurs : les autocars ont transporté 7,1 millions de passagers en 2017 contre 770.000 en 2015. "Le maillage territorial s'étoffe, précise le rapport, et le bilan environnemental est très positif, compte tenu du fort taux d'occupation des autocars", même si aucun des trois opérateurs restants (Ouibus, FlixBus et Isilines) n'a encore atteint son seuil de rentabilité. L'annonce récente du rachat de Ouibus par Blablacar démontre que ce secteur d'activité "est encore en pleine mutation". Les rapporteurs proposent que l'Ademe remette un nouveau rapport au Parlement sur l’impact environnemental du transport par autocar, "qui se pérenniserait ensuite sous la forme d’un rapport triennal". Ils suggèrent aussi de "renforcer le rôle des régions dans la coordination des acteurs pour le développement des gares routières, déjà affirmé par la réalisation d’un schéma régional des gares routières".
Et la privatisation de la gestion des aéroports de Nice et de Lyon, prévue également par la loi, a permis de dégager un produit de cession important (1,75 milliard d'euros) "sans mettre en péril les intérêts essentiels de la Nation ou ceux des territoires concernés", insiste le rapport, et cela, par l'intermédiaire d'un cahier des charges exigeant pour les appels d'offres. Mais les rapporteurs signalent aussi qu'une évaluation totale de ces privatisations est encore trop précoce. Dans un avis récent, la Cour des comptes avait jugé que la privatisation de ces deux aéroports avait pu bénéficier des erreurs commises lors de celle de l’aéroport de Toulouse.

Le rapport souligne aussi que "d’autres réformes n’ont pas toujours abouti aux résultats escomptés". C'est le cas des délais qui restent élevés pour les candidats qui doivent repasser leur permis de conduire ou de la baisse des saisines de justices prud'homales (-15%) sans qu’il y ait eu d’amélioration dans le traitement. "Certaines réformes n'ont même pas reçu un début d'application", critique le rapport : la reconnaissance publique des labels privés de commerce équitable, qui n'a pu aboutir, compte tenu de l'inadaptation du dispositif retenu, ou l'entrée de Bpifrance au capital du Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies.

 

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