Meublés de tourisme : la PPL adoptée à l'Assemblée nationale

La proposition de loi dite "AirbnB", visant à encadrer les meublés de tourisme dans les zones tendues au profit de la location de longue durée a été adoptée par les députés. La suite de la navette parlementaire pourrait néanmoins remettre en cause le taux d'abattement retenu lors de cette première lecture.

L'Assemblée nationale a adopté en première lecture, par 100 voix contre 25 et 3 abstentions, la proposition de loi (PPL) visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif en zone tendue. Le texte, qui entend s'attaquer à la prolifération des offres de locations de meublés touristiques de courte durée de type Airbnb a fait l'objet d'une bataille parfois âpre dans l'Hémicycle. Son article 3, qui modifie le régime fiscal de ces meublés de tourisme, fut particulièrement disputé.

Avant cette passe d'armes, les députés avaient adopté l'article 2 qui dote les élus locaux d'une "boîte à outils" afin de mieux réguler les meublés de tourisme sur leur territoire : possibilité de créer des quotas d’autorisations de changement d’usage temporaire ou de délimiter des secteurs réservés, pour les constructions nouvelles, aux résidences principales.

Pouvoir d'achat contre égalité fiscale

Durant l'examen de l'article 3 – qui abaisse l'abattement fiscal dont bénéficient les meublés de tourisme de 71% à 30% dans la limite d'un plafond de revenus de 30.000 euros pour les meublés de tourisme classés et de 15.000 euros pour les non-classés, mais maintient le taux de 71% dans la limite d'un plafond de 50.000 euros pour les meublés de tourisme classés en zone rurale très peu dense et en station classée de sport d'hiver –, on vit s'opposer deux camps aux ambitions inconciliables.

D'un côté, les défenseurs des classes moyennes, des petits propriétaires, pour qui les locations occasionnelles constituent un complément de revenus bienvenu en ces temps de baisse du pouvoir d'achat. De l'autre, les tenants d'une égalité fiscale, désireux d'aligner la fiscalité des locations de courte durée sur les locations de longue durée, de manière à encourager ces dernières dans les zones d'attrition locative.

Si le débat fut si disputé, c'est en grande partie, comme l'a souligné Jean-René Cazeneuve, député du Gers et rapporteur du Budget, en raison du manque d'étude d'impact sur la question. Et pour cause : une mission d'information sur la fiscalité de la location est attendue dans les prochaines semaines.

"Envoyer un signal" sur la fiscalité

Annaïg Le Meur, corapporteure de la PPL avec Iñaki Echaniz mais également de la mission d'information en cours, semblait prise entre deux feux et finit par admettre : "Le bon chiffre, je ne vous dis pas qu'on l'a, mais la volonté, on l'a." Pour l'élue du Finistère, le vote de l'article 3 était donc hautement symbolique. Il devait marquer la volonté des députés d'avancer dans la réforme fiscale, quitte à revenir sur le taux dans un futur proche. Guillaume Kasbarian, président de la commission des affaires économiques, lui a emboîté le pas, arguant que "sortir de ce débat sans mesure fiscale, serait dommage" et qu'il fallait "envoyer un signal". À ses côtés, Marie Lebec, ministre des Relations avec le Parlement, confia son désir d'"attendre les conclusions de la mission", tout en précisant que "le gouvernement partageait la volonté de rééquilibrage fiscal". Elle s'en remit donc à un avis de sagesse.

On se souvient néanmoins que lors du projet de loi de finances pour 2024 (PLF), le gouvernement avait prévu d'abaisser l'abattement des meublés de tourisme de 71 à 50% avant de laisser passer par erreur au Sénat un amendement alignant la fiscalité des meublés de tourisme sur celle des locations nues de longue durée, soit un abattement de 30%, pour un plafond de recettes limité à 15.000 euros (lire notre article du 18 décembre 2023).

Affichage dans les parties communes

La séance s'est terminée par l'examen et l'adoption des articles 4 et 5 de la PPL ayant pour but, respectivement, de supprimer la double déduction des amortissements pour les meublés de tourisme en location meublée non professionnelle dans le cadre du régime réel, et de rendre obligatoire, dans les copropriétés, l'information du syndic en cas de changement d’usage d'un local d'habitation, lequel syndic procédera par ailleurs à l’affichage dans les parties communes d’une information concernant les meublés de tourisme ayant fait l’objet d’une déclaration préalable.

Pour rappel, l'article 1er A, qui généralise le numéro d'enregistrement des meublés de tourisme, l'article 1er, qui soumet les meublés de tourisme à l'obligation de réaliser un diagnostic de performance énergétique (DPE), et l'article 1er bis, qui permet à la commune de fixer un plafond de 90 nuitées pour les locations touristiques de courte durée (contre 120 actuellement), avaient été adoptés précédemment (lire notre article du 7 décembre 2023).

La majorité qui s'est dégagée autour de ce texte laisse augurer d'une très probable adoption définitive de la loi après examen au Sénat. Cependant, les débats du 29 janvier ont montré que le taux d'abattement continue de diviser. Le rapport de la mission d'information, attendu en février, sera un indicateur de la formule définitive.