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Emploi - Michel Sapin met résolument le cap sur les emplois aidés

Les emplois d'avenir feront l'objet d'un des tout premiers textes de loi de la rentrée. S'y ajoutent une enveloppe supplémentaire de contrats aidés et les futurs contrats de génération pour lesquels un projet de loi est prévu fin 2012. Au menu également du calendrier social : l'amélioration du chômage partiel, des négociations sur la sécurisation des parcours professionnels et un projet de loi sur les licenciements boursiers...

La rentrée va être bien chargée en matière d'emploi pour l'Etat, les partenaires sociaux et les collectivités. Une feuille de route sociale a été élaborée à l'issue de la conférence sociale des 9 et 10 juillet 2012. Elle comprend de nombreuses mesures et de multiples thèmes de négociation car avec les derniers plans sociaux annoncés, comme celui de PSA Peugeot-Citroën notamment, et les mauvais chiffres du chômage, le gouvernement est dans l'obligation d'avancer rapidement. En juin 2012, le chômage a atteint 2,945 millions de personnes sans activité, soit 23.700 de plus qu'en mai 2012, une augmentation de 0,8% sur un mois et de 7,8% sur un an ! 
Première mesure qui devrait être mise en place à la rentrée : les emplois d'avenir. 150.000 emplois de ce type sont ainsi prévus. Un projet de loi doit être présenté mi-septembre, le gouvernement ayant pour objectif de créer 100.000 emplois d'avenir dès 2013 et 50.000 en 2014. Ces emplois vont être destinés aux jeunes peu qualifiés "des quartiers en difficulté ou des zones rurales extrêmement éloignées", d'après les précisions données dernièrement par Michel Sapin, ministre du Travail. Ils seront en grande partie financés par l'Etat, la dernière estimation budgétaire pour 2013 atteignant 500 millions d'euros. Ils seront principalement créés dans le secteur non-marchand : collectivités territoriales, hôpitaux, maisons de retraite, secteur associatif, secteur de l'économie sociale et solidaire.
Autre mesure phare : les contrats de génération. 500.000 contrats devraient être créés en cinq ans. Un projet de loi devrait être déposé sur le sujet d'ici la fin de l'année 2012, le gouvernement souhaitant mettre en place des premiers contrats de ce type dès 2013. Ces contrats sont le pendant des emplois d'avenir dans le secteur marchand. Ils doivent permettre l'embauche, exonérée de charges sociales, d'un jeune, suivi dans l'entreprise par un tuteur senior, qui garde ainsi son emploi.

"Il faut éviter les effets d'aubaine"

Le gouvernement a dû essuyer les critiques de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) concernant ces deux contrats. L'OFCE a ainsi estimé dans son rapport du 26 juillet sur l'évaluation du projet économique du quinquennat 2012-2017 qu'ils auraient moins d'impact que prévu en matière de créations d'emplois à cause des effets d'aubaine. Pour les emplois d'avenir, on arriverait seulement à 107.300 emplois créés sur les 150.000 subventionnés. Pour les contrats de génération, ce serait à peine entre 48.000 et 99.000 emplois qui seraient réellement créés sur les 500.000 initialement prévus. Michel Sapin a répliqué en disant sur BFM TV et RMC le 30 juillet qu'il ne comprenait pas très bien ces calculs. "Il faut éviter les effets d'aubaine, que ce soit pour les emplois d'avenir ou les contrats de génération", a-t-il toutefois reconnu, estimant qu'"il n'y en aura pas ou très peu".
Les contrats aidés vont aussi faire partie des mesures à mettre en place. 80.000 contrats aidés supplémentaires sont ainsi prévus au second semestre 2012, notamment dans les collectivités territoriales, pour retrouver un certain équilibre, le précédent gouvernement ayant utilisé au cours du premier semestre 2012 les deux tiers des 340.000 contrats prévus pour toute l'année.
Les collectivités territoriales, qui ont participé à la conférence sociale, comptent participer à la mobilisation sur l'emploi. A l'issue de la réunion, l'Association des régions de France (ARF) a notamment montré sa volonté de travailler avec l'Etat et les partenaires sociaux à une mobilisation des aides publiques vers les entreprises qui manifestent leur engagement en faveur de l'emploi des jeunes et des seniors. L'Association des maires de France (AMF) s'est aussi exprimée en rappelant le rôle clé des communes et intercommunalités dans le service public de l'emploi, via les missions locales, les maisons de l'emploi et les clauses d'insertion pour les plus démunis.

Plan d'urgence et négociations de fond

A la rentrée, des négociations sont aussi prévues sur la sécurisation de l'emploi, dont la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et l'accompagnement des mutations. Elles seront menées par les partenaires sociaux au niveau national interprofessionnel et devront aboutir au premier trimestre 2013. Le chômage partiel fait partie des thèmes qui seront traités, le gouvernement souhaitant améliorer le dispositif existant. Un premier point sera effectué sur ce sujet à l'automne, à partir du rapport que l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) vient de remettre à Michel Sapin. Ce rapport, qui évalue le dispositif français d'activité partielle, préconise de fusionner les systèmes existants pour aboutir à un dispositif d'activité partielle unifié. Cette démarche permettrait, selon l'Igas, d'améliorer la lisibilité du dispositif et de renforcer son attractivité, alors qu'il est encore peu utilisé en France, en comparaison à l'Italie ou l'Allemagne. Le gouvernement espère que des mesures d'amélioration pourront être prises à la suite de cette première négociation entre l'Etat et les partenaires sociaux. Les autres mesures seront traitées dans le cadre de la négociation entre les partenaires sociaux qui se tiendra jusqu'en mars 2013. Côté formation, un plan d'urgence doit être mis en place. Il comprendra trois volets : réduire le nombre de jeunes entrant sur le marché du travail sans qualification, accompagner les salariés pour les former plutôt que les licencier et améliorer l'accès des demandeurs d'emploi à la formation.
Le gouvernement s'oppose en revanche à l'idée d'une nouvelle grande réforme de la formation. Il compte davantage clarifier, unifier et rendre plus efficace la formation professionnelle et opter pour une territorialisation qui permettrait de mieux utiliser l'argent disponible. Un groupe de réflexion sur le compte individuel de formation (CIF) a été par ailleurs confié au Conseil national de formation professionnelle tout au long de la vie (CNFPTLV). Il doit rendre ses conclusions au premier trimestre 2013. Le gouvernement souhaite aussi faire le point sur les mesures mises en œuvre en matière d'alternance. Un bilan des démarches menées jusque-là dans ce domaine va être réalisé en septembre. Il permettra de définir les finalités et les modalités de mise en œuvre du service public de l'orientation au sein des territoires.
L'Etat s'est aussi engagé côté formation à assurer la cohérence entre l'évolution envisagée des dispositifs et la nouvelle étape de décentralisation annoncée. Enfin, la question des licenciements boursiers sera également traitée à la rentrée. Le gouvernement a promis un projet de loi sur le sujet pour encadrer les licenciements abusifs et, en cas de projet de fermeture de site rentable, créer une obligation de recherche de repreneur. Une proposition de loi du groupe GDR (Front de Gauche et progressistes) est déjà sur la table.