Nantes met de la proximité dans sa politique intercommunale

La charte de fonctionnement de la communauté urbaine de Nantes prévoit un système déconcentré qui s'appuie notamment sur un dispositif de "pôles de proximité".

"Quand on a commencé au district à débattre de la constitution de la communauté urbaine et du transfert de compétences afférent, notre crainte a d'abord été de créer un gros machin loin de tout !" Camille Durand, maire de Saint-Jean-de Boiseau, petite commune du sud-ouest de l'agglomération nantaise, lance alors cette idée : mettre en place une organisation à deux niveaux, centrale pour les gros dossiers, géographique pour le traitement des affaires quotidiennes. Aussitôt proposé, aussitôt réalisé ! Créée en 2001, la communauté urbaine de Nantes, devenue depuis Nantes Métropole, se voit immédiatement découpée en dix morceaux, dix "pôles de proximité", structurés en territoires "vivables" de 34.000 à 72.000 habitants. Paradoxe ? Nécessité, répondent les élus, convaincus que l'optimisation du fonctionnement de la nouvelle communauté urbaine passe par la déconcentration, une commune étant toujours trop petite ou... trop grande à l'échelle de sa communauté. Totalement innovants, ces pôles de proximité doivent "permettre de répondre à la demande de présence et d'efficacité du service public". Chacun est doté d'une commission locale, réunissant élus communautaires et municipaux du territoire, chargée d'analyser l'activité et d'émettre des propositions. Quant à l'organisation technique, elle repose sur un directeur de pôle (dans 9 cas sur 10, un ingénieur anciennement directeur des services techniques d'une des communes couvertes par le pôle) et une équipe d'agents communautaires.

Aménagement, développement et intérêt collectif

Les missions dévolues aux pôles de proximité sont au nombre de trois : les services d'intérêt collectif, l'aménagement de l'espace et le développement économique. Entre maires on s'est beaucoup interrogé : jusqu'où donner des responsabilités ? "Il fallait, en effet, éviter de recréer des super communes, explique Camille Durand. Le but recherché est justement d'éviter que les conseillers municipaux se sentent exclus de la gestion de leur territoire." Les dix pôles de proximité se chargent de l'entretien de la voirie. La collecte des ordures ménagères relève, quant à elle, d'une régie ou d'une délégation de service public, un interlocuteur suivant alors l'exécution du contrat. Il en va de même pour la gestion des réseaux d'eau et d'assainissement. Les révisions partielles de PLU (plan local d'urbanisme), l'instruction des procédures en matière de droit des sols sont également du ressort des pôles de proximité. Enfin, les pôles de proximité sont chargés des études d'aménagement de zones d'activités et d'établir un contact quotidien avec les entreprises de leur territoire.
Pour mener à bien leur triple mission, les pôles de proximité disposent pour chaque commune d'une enveloppe annuelle leur permettant d'organiser les investissements de proximité et d'élaborer les projets en lien avec les conseillers municipaux. En 2003, ces "enveloppes locales" ont représenté un montant global de 26,7 millions d'euros.

Pour une organisation cohérente

Une bienveillance particulière a été apportée à l'organisation du travail des agents communautaires. Déjà objets d'une mutation administrative (de leur commune à la communauté urbaine), ceux-ci ont été au début maintenus sur leur territoire, en particulier les ouvriers de la voirie, riches d'une connaissance de leur terrain, de leur matériel et de leur histoire. Depuis, chacun a eu le temps de prendre ses marques dans cette nouvelle configuration et les équipes commencent à passer sur les communes voisines, "premiers pas vers une véritable coopération entre pôles", espère Camille Durand. Ces échanges doivent permettre à terme de trouver le juste milieu entre régie et sous-traitance, les petites communes ayant l'habitude de beaucoup sous-traiter et les plus importantes de traiter en direct.
De leur côté, les habitants commencent à faire remonter leurs réclamations aux pôles, qui disposent tous de leurs propres locaux à des fins de visibilité. "Les pôles de proximité sont le complément indispensable au regroupement géographique, conclut Camille Durand. C'est une organisation cohérente de notre territoire qui préserve la relation entre les élus de terrain et l'administration publique et qui optimise le fonctionnement de la communauté, en évitant les doublons par exemple, ce qui revient à optimiser l'utilisation des deniers publics."


Nicolas Guillon / Innovapresse Nantes pour Localtis


 


"Ne pas perdre de vue le terrain"


 

Camille Durand, maire de Saint-Jean-de-Boiseau et premier vice-président de Nantes Métropole, en charge des pôles de proximité, ne saurait que recommander le modèle nantais au monde communautaire.

Quel premier bilan peut-on tirer de la mise en place de pôles de proximité au sein de la communauté urbaine de Nantes ?

Globalement, on peut dire aujourd'hui que les craintes n'étaient pas fondées. On allait soi-disant détruire une organisation, apporter de la lenteur administrative, dépenser plus... En 2003, le taux d'investissements réalisés a atteint 83 % ! Certes, nous avons été amenés à créer plus de postes que nous l'imaginions - de 2.000 agents à sa création en 2001, la communauté urbaine est passée à 2.200 - mais il faut aussi voir que nous avons plus de compétences qu'au temps du district... Je mettrais juste un bémol à propos de la mission Développement économique. Cela ne fonctionne pas bien sur tous les pôles. Est-ce qu'il ne faudra pas revoir ça à terme ?

Conseillez-vous ce type d'organisation à d'autres communautés ?

Toutes les communautés urbaines, et même les communautés d'agglomération, auraient intérêt à mettre en place une organisation géographique, car les guette, qu'elles le veuillent ou non, le danger de la perte de vue du terrain, de la coupure avec la population voire avec les conseillers municipaux de base.

L'organisation nantaise est-elle transférable ?

Nantes Métropole n'est pas Marseille Provence Métropole. Chez nous, la population se répartit à parts égales entre la ville centre et les 23 autres communes de l'agglomération (ndlr, tandis que Marseille centre regroupe plus de 80 % des habitants de la métropole). Prenez encore la communauté d'agglomération de Rennes : deux tiers de ses habitants vivent dans la ville centre. A Bordeaux, en revanche, c'est l'inverse et je peux vous dire que M. Juppé s'intéresse de près à nos pôles de proximité, et pourtant la communauté urbaine de Bordeaux est une des plus anciennes communautés urbaines (ndlr, elle fut créée en 1968). Les Toulonnais sont venus voir également.


 


555.000 habitants, 24 communes, 10 pôles de proximité


Depuis 2002, la communauté urbaine de Nantes (550.000 habitants), qui rassemble 24 communes, est découpée en 10 pôles de proximité. Les plus importants en termes de population sont le pôle Loire-et-Sèvre (Nantes Sud / Rezé / Saint-Sébastien) et le pôle Erdre-et-Cens (Nantes Nord / La Chapelle / Orvault / Sautron), avec 72.000 habitants chacun; le moins peuplé étant le pôle Vignoble, avec 34.000 habitants. Le pôle Sud-Ouest couvre le plus grand territoire (13.500 hectares), le pôle Nantes-Centre le plus petit (900 hectares).
C'est au pôle Nantes-Loire, qui englobe l'Ile de Nantes, qu'est affecté le plus grand nombre d'agents communautaires : 161 (contre 49 au pôle Vignoble). Enfin, en 2002, c'est le pôle Loire-Chézine (Saint-Herblain) qui disposait du budget le plus important (4,32 millions d'euros en fonctionnement, 3,44 millions d'euros en investissement), Nantes-Centre plafonnant pour sa part à 1,16 million d'euros en fonctionnement et 978.000 euros en investissement.

Communauté urbaine de Nantes

Nombre d'habitants :

580000

Nombre de communes :

24
2 cours du Champ-de-Mars
44923 Nantes cedex 9

Maurice François

Directeur général de la proximité

Camille Durand

Premier vice-président

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