Paca : les déchets alimentaires des lycées recyclés en compost pour espaces verts

Depuis la rentrée 2004, le lycée technique Pierre-Gilles-de-Gennes à Digne (Alpes-de-Haute-Provence) produit du compost à partir des déchets de la cantine. La région espère étendre cette démarche éco-citoyenne à la moitié des 174 lycées publics de Paca d'ici quatre à cinq ans.

Au lycée Pierre-Gilles-de-Gennes, les déchets alimentaires ont une seconde vie. Depuis septembre 2004, le self-service est le théâtre d'un rituel éco-citoyen. Les élèves trient leur plateau-repas et jettent les déchets fermentescibles organiques dans un trou réservé à cet usage. Ils sont déversés mécaniquement sur une table et soumis à l'inspection du personnel de cuisine. Une fois la vérification terminée, la matière est enrichie de déchets de copeaux de bois ou de déchets verts. Le tout est introduit automatiquement dans le composteur où les déchets sont broyés et fermentent. Puis ils sont placés quatre à cinq mois dans des bacs de stockage hermétiques, sur une aire de maturation à l'air libre. De ce processus ressort du compost prêt à être utilisé.
"En 2002, le Comité scientifique et technique des industries climatiques (Costic), une association voisine de l'établissement, nous a sollicité pour récupérer nos déchets alimentaires dans le cadre d'une recherche sur les déchets organiques fermentescibles, explique Pierre Piccamiglio, conseiller d'administration scolaire et universitaire du lycée. Puis ils nous ont proposé de mener l'opération dans nos propres locaux, à une plus grande échelle. Le conseil d'administration du lycée a émis un vote largement consensuel en faveur de cette idée innovante qui permet de diminuer le volume de déchets."

Rassurer le personnel de cuisine

De fait, l'établissement décide de profiter de travaux de restructuration des bâtiments dédiés à la restauration pour accueillir un prototype de composteur. "Il a fallu vaincre des réticences. Les entreprises retenues pour intervenir sur le chantier nous ont opposé des difficultés techniques. Nous avons également veillé à rassurer le personnel de cuisine. Il craignait un accroissement de la pénibilité du travail et s'interrogeait sur le pouvoir de nuisance de ces déchets qui allaient être maintenus plusieurs mois à proximité de leur lieu de travail, dans le local à poubelles. Mais l'adhésion quasiment militante des services vétérinaires départementaux a permis de lever toutes les résistances", se rappelle Pierre Piccamiglio. Les travaux se poursuivent tout au long de l'année 2003. Le self-service reprend du service en janvier 2004 et, six mois plus tard, le composteur est livré. Mis en service en septembre, le fermenteur a commencé à produire du compost en janvier 2005. "Les déchets progressent vers la sortie du composteur au fur et à mesure que nous l'alimentons. C'est une sorte de gros cylindre qui fait une rotation de 24 secondes toutes les 20 minutes. Le nôtre est de grande dimension, aussi a-t-il fallu le nourrir de cinq tonnes de déchets avant qu'il ne commence à produire du compost", précise l'intendant. A ce jour, le lycée a déjà produit 6 m3 de compost.

Exploitation pédagogique prévue par les enseignants

Plusieurs utilisations sont envisagées : "Nous en aurons un usage interne pour nos espaces verts. Il pourrait être vendu à la communauté éducative du lycée à un prix symbolique. Une convention de partenariat devrait être établie avec le service des espaces verts de la ville de Digne. Nous pourrions aussi nous rapprocher de la jardinerie voisine", indique Pierre Piccamiglio. Un partenariat a été engagé avec un lycée professionnel qui fournit les copeaux de bois et vient de se lancer dans la fabrication de bacs de stockage. Des exploitations pédagogiques sont aussi envisagées par les professeurs d'histoire-géographie, de SVT (sciences et vie de la terre) et du BTS sciences et techniques de laboratoire.
Les lycéens, eux, participent avec enthousiasme au projet, selon Pierre Piccamiglio. "En 2003, pendant les travaux de restructuration, nous avons dû interrompre le tri au grand regret des élèves, car la cantine était assurée sous forme de plateaux-repas similaires à ceux servis en avion, fournis par un prestataire externe. Ce n'était pas compatible avec le dispositif de tri." Un "Guide pratique des déchets de restauration dans les lycées de Provence-Alpes-Côte d'Azur" a été réalisé par un groupe de travail intégrant le proviseur, des enseignants, l'intendant, des cuisiniers, des chefs de travaux et des agents de maintenance du lycée. Ce guide sera la bible de neuf autres établissements de la région, volontaires pour s'engager dans cette démarche éco-citoyenne.

Marie-Pierre Vega / L'AEF pour Localtis

"Des gisements d'ordures ménagères échappent au recyclage"

Rencontre avec Patrick Mennucci, vice-président délégué à l'éducation et la formation, et Annick Delhaye, vice-présidente déléguée à l'écologie, l'environnement et le développement durable du conseil régional de Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Pourquoi la région a-t-elle décidé de s'engager dans cette démarche ?

La démarche initiée par le lycée Pierre-Gilles-de-Gennes s'inscrit parfaitement dans la politique environnementale menée par la région, à travers sa direction de l'agriculture, des ressources naturelles et de l'environnement. Une des missions de cette direction consiste à promouvoir le recyclage des déchets. Or il existe dans ces établissements des gisements d'ordures ménagères qui échappent au recyclage. Un groupe de travail, puis un comité de pilotage placé sous notre responsabilité ont été mis sur pied pour étendre et, à terme, généraliser cette démarche.

Combien de lycées la région va-t-elle équiper en fermenteur ?

D'ici fin juin, les neuf lycées qui ont manifesté leur intérêt décideront s'ils sont en mesure de participer à l'expérimentation en 2006. Les services de la région réaliseront un diagnostic dans les établissements volontaires pour accueillir un fermenteur dont le coût s'élève environ à 70.000 euros. Nous espérons que la moitié des 174 lycées publics de la région disposera de ce type de machine d'ici quatre à cinq ans. Rien ne sera imposé. Le volontariat est l'une des conditions du succès, au même titre que l'implication de la communauté éducative.

Le conseil régional mène-t-il d'autres actions en faveur de l'éco-citoyenneté dans les lycées ?

En 2002-2003, la région a généralisé aux 174 lycées publics et aux 94 lycées privés sous contrat d'association le financement de la collecte des déchets toxiques, pathogènes ou dangereux produits par les établissements dans le cadre de leurs activités pédagogiques.
Nous venons par ailleurs de lancer une campagne intitulée "Produire et manger bio en Paca" qui vise à développer l'approvisionnement des cantines des lycées en produits issus de l'agriculture biologique et à contribuer à l'éducation alimentaire des lycéens.

Le budget, les acteurs

L'acquisition du composteur du lycée Pierre-Gilles-de-Gennes, près de 68.000 euros, a été cofinancée par la région Paca (23.000 euros), l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (34.000 euros) et le conseil général des Alpes-de-Haute-Provence (11.000 euros).

Les neuf établissements volontaires sont :
- le lycée d'enseignement général et technologique agricole Digne-Carmejane au Chaffaut (04) ;
- le lycée professionnel Alpes-Durance à Embrun (05) ;
- le lycée Alexis-de-Tocqueville à Grasse (06) ;
- le lycée d'enseignement général et technologique agricole Aix-Valabre à Gardanne (13) ;
- le lycée Georges-Duby à Luynes (13) ;
- le lycée professionnel agricole Les Alpilles à Saint-Rémy-de-Provence (13) ;
- le lycée technique hôtelier à Marseille (13) ;
- le lycée professionnel Domaine-d'Eguilles à Vedène (84) ;
- le lycée d'enseignement général et technologique agricole Louis-Giraud à Carpentras (84).

Aller plus loin sur le web :
 
Guide régional du recyclage et de l'élimination des déchets de PACA
http://www.guide-recyclage-paca.com/
 
Lycée technique Pierre Gilles de Gennes (Digne)
http://www.lyc-gillesdegennes.ac-aix-marseille.fr/

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