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Finances locales - Pas de nette amélioration en vue pour les finances des départements

Le président de l'Assemblée des départements de France (ADF) a présenté ce 20 septembre à la presse le panorama des finances des départements issu de la réforme de la fiscalité locale. Une analyse réalisée à partir des résultats des comptes administratifs 2010 des 102 départements, qui révèle les fragilités de ces collectivités plombées par les dépenses sociales.

L'analyse des comptes administratifs 2010 des départements à laquelle l'ADF a procédé fait apparaître de bonnes nouvelles. Le rebond des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) dont ont profité les départements en 2010 a apporté à ceux-ci une bouffée d'oxygène. En progression de 35% (soit 1,8 milliard d'euros) par rapport à 2009, le produit de cette taxe due à chaque transaction immobilière, a rapporté l'année dernière 7 milliards d'euros aux départements. Cette manne est tombée au bon moment. Elle a aidé en particulier certains départements en difficulté à boucler leur budget. En outre, elle a dispensé le gouvernement de mesures coûteuses pour porter secours aux départements les plus mal en point. Mais le miracle va-t-il durer ? Le gouvernement semble pronostiquer que oui, confie l'entourage du président de l'Assemblée des départements de France (ADF), Claudy Lebreton. Ce dernier est plus expectatif. Certes, les recettes de DMTO sont en hausse de 20% au second trimestre 2011 par rapport au même trimestre de 2010. Mais elles baissent d'un peu plus de 6% par rapport au premier trimestre 2011. La réduction des prévisions de croissance, la menace d'une crise financière et la remontée des taux d'intérêts sont autant de paramètres, qui, pour l'ADF, pourraient présager le ralentissement de la hausse des recettes de DMTO, voire leur inflexion.
Prépondérants aujourd'hui pour les départements (ils représentent 12% de leurs recettes de fonctionnement) et véritable aubaine lorsqu'ils explosent, comme en 2010, les DMTO ne sont cependant pas la panacée, si l'on en croit le président de l'ADF. En cause, leur volatilité. "Si les droits de mutation connaissent un effet de yoyo, nous allons avoir des difficultés à programmer nos investissements", indique-t-il, en rappelant qu'il fallait plusieurs années, par exemple, entre la décision de construire un collège, la réalisation des premières études et l'inauguration de ce collège.

Réduction de l'autonomie financière

Cette instabilité des DMTO contraste avec la régularité des recettes de taxe professionnelle que percevaient les départements avant que la loi de finances pour 2010 ne supprime cet impôt. "Lié à la création d'entreprises et à l'emploi, le produit de la taxe professionnelle progressait de manière régulière, de 3% à 5% par an", souligne avec nostalgie Claudy Lebreton.
En compensation de la taxe professionnelle, les départements ont obtenu des dotations d'Etat et de nouveaux impôts : 48,5% des recettes de la nouvelle cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et une part de l'impôt forfaitaire sur les entreprises de réseau (IFER). Or, ces impôts n'auront pas le même dynamisme que la taxe professionnelle. En plus, les départements ne peuvent pas en fixer le taux. A partir de cette année, leur capacité de voter les taux de fiscalité est limitée à la seule taxe sur le foncier bâti, un impôt de presque 10 milliards d'euros qui représente 17% des recettes de fonctionnement des départements. Au total, la réforme de la fiscalité locale a divisé par deux le pouvoir de taux des départements. Pour comprendre cette évolution, il faut se rappeler que, certes, la part régionale de foncier bâti est revenue aux départements, mais que, par ailleurs, les parts départementales de taxe d'habitation et de foncier non bâti ont échu dans leur intégralité au secteur communal. La conséquence est redoutable, comme l'illustre la situation du département des Côtes-d'Armor présidé par Claudy Lebreton. Avant la réforme, une augmentation d'un point de fiscalité générait 1,5 million d'euros. Après la réforme, la même augmentation ne rapporte plus que 900.000 euros.

Des investissements en chute

Les marges de manœuvre dont disposent les départements sur leurs recettes sont donc réduites, alors que, dans le même temps, leurs dépenses sociales, quasi incompressibles et mal compensées par l'Etat, continuent à s'envoler sous l'effet du vieillissement de la population et du chômage. En 2010, celles-ci représentaient 60% des dépenses de gestion des départements. Un ratio appelé à augmenter encore. En 2011, les allocations de solidarité vont coûter 847 millions d'euros supplémentaires aux départements, par rapport à l'année dernière. Or, ces 14,3 milliards d'euros de dépenses, qui correspondent à l'APA, à la PCH et au RMI-RSA, ne seront pris en charge qu'à hauteur de 55% par l'Etat (soit 7,9 milliards d'euros). L'ADF demande à ce dernier de faire un geste de 2,5 milliards à 3 milliards d'euros. Si un tel effort national était accompli, les départements seraient "dans une situation financière beaucoup plus acceptable", souligne Claudy Lebreton. Livrés à leur sort, les départements n'ont eu d'autres choix en 2010 que de limiter leurs dépenses d'équipement brut (7,9 milliards d'euros, soit 4,6% en moins par rapport à 2009) et leurs subventions d'équipement versées (4,65 milliards d'euros, soit 11% en moins par rapport à 2009). Des choix qu'ils ont reconduits en 2011, puisque les dépenses d'équipement brut doivent, d'après des estimations, reculer cette année de 5,2% et les subventions d'équipement baisser de 2,2%. Avec, au final des effets potentiellement négatifs sur l'économie des territoires, s'inquiète le président de l'ADF. Et l'impossibilité pour les départements d'accompagner le secteur privé dans le redémarrage de la croissance économique.
Sur l'exécution des budgets 2011, on en saura plus au mois de septembre 2012, car l'ADF a décidé de présenter chaque année les résultats des comptes administratifs départementaux.