Transformation des zones commerciales : "La solution ne peut être identique partout", insiste Procos

Le plan de transformation des zones commerciales, dont l'appel à manifestation d'intérêt vient d'être lancé, risque-t-il de relancer l'opposition entre commerce de centre-ville et commerce de périphérie ? Pour Procos, il est indispensable de s'occuper des deux en même temps, "les uns avec les autres", et de travailler sur le projet d'avenir partagé en matière de commerce territorial. S'agissant des zones commerciales, la fédération du commerce spécialisé estime, dans son bilan 2023 publié le 19 octobre 2023, que la solution ne peut être identique partout.

Alors que l'appel à manifestation d'intérêt (AMI) du plan de transformation des zones commerciales vient d'être lancé (voir notre encadré ci-dessous), chacun défend ses arguments pour éviter une nouvelle opposition entre les commerces de ces zones périphériques et les commerces de centre-ville.

Pour rappel, ce plan a été lancé par le gouvernement le 11 septembre. Doté de 24 millions d'euros, il doit permettre de sélectionner quinze sites pilotes. Objectif : transformer ces alignements de "boîtes à chaussures" et libérer du foncier pour créer de l'activité, des logements, des espaces verts, et accueillir des équipements publics. A l'heure actuelle, on compte 1.500 zones commerciales qui couvrent près de 500 millions de m2. Des zones qui concentrent 72% des dépenses des Français dans les magasins, selon les chiffres officiels contestés par l'association Centre-ville en mouvement.

Récemment, l'association de défense des centres-villes a alerté sur les risques, avec ce nouveau plan, de réitérer les erreurs du passé, en relançant le bras de fer entre commerces de périphérie et commerces de proximité (voir notre article du 6 octobre 2023). Elle craint notamment qu'on fasse machine arrière en venant au chevet des grandes surfaces en périphérie, après des années d'effort pour relancer les commerces de centre-ville.

A nouveau les uns contre les autres et non les uns avec les autres

Avec des arguments opposés, c'est au tour de Procos de manifester ses craintes pour le compte des commerces spécialisés, dont la majorité réalise son chiffre d'affaires dans ces zones périphériques. "Immédiatement, alors que la démarche vient seulement d'être annoncée à travers des zones tests, certains s'élèvent contre le commerce de périphérie, à nouveau les uns contre les autres et non les uns avec les autres pour imaginer l'avenir !", s'insurge Procos dans son analyse du contexte économique pour le commerce spécialisé présenté le 19 octobre 2023 (voir notre article). La fédération du commerce spécialisé se demande si ce plan gouvernemental ne répond pas à d'autres préoccupations que la pérennité du commerce. "Avec le Zéro artificialisation net (ZAN), entrées de ville et zones commerciales deviennent d’un seul coup cruciales alors qu’elles ont peu intéressé par le passé. Mais ce n’est pas prioritairement pour des raisons de commerce (moderniser celui-ci) mais pour se préparer à ne plus disposer de foncier pour construire", estime-t-elle, arguant qu'il est possible de transformer ces zones commerciales tout en préservant les commerces de centre-ville, dans le cadre d'un "projet d'avenir partagé". "Pas question donc de faire des zones commerciales une priorité nouvelle qui viendrait occulter le sujet politique majeur (national et local) représenté par la vitalité des cœurs de ville", insiste Procos, qui souligne en même temps que "la période actuelle ne marque pas la fin du commerce à la périphérie des villes".

Ne pas dupliquer partout une école de pensée

La fédération signale ainsi que la plupart des magasins de périphérie ne se transféreront pas massivement vers les cœurs de ville dans les prochaines années, du fait des contraintes immobilières et de l'organisation de la ville (surface de locaux, niveau de loyers) et des contraintes d'exploitation (accès clients, livraison des produits). Et beaucoup d'enseignes ne pourraient envisager de s'implanter en centre-ville si leur modèle économique de périphérie, plus rentable, n'existait pas.

Procos préconise la prudence quant à ce nouveau plan. "Tout dépendra de la volonté réelle des futurs concepteurs de ces transformations de zones (élus en premier lieu, aménageurs, promoteurs, foncières…) de prendre réellement en compte en amont les besoins des commerçants et leurs impératifs de fonctionnement", souligne la fédération, qui propose d'avoir des réponses spécifiques, les territoires n'étant pas comparables. Des réponses qui pourront être établies après une phase de diagnostic, une analyse des besoins réels futurs des populations, des territoires et des commerçants, le tout en respectant les acteurs en présence, qu'ils soient propriétaires ou exploitants. "La solution ne peut être identique partout, martèle la fédération, le plus grand danger serait de dupliquer partout une école de pensée". Les projets sélectionnés seront désignés entre novembre 2023 et janvier 2024, les premiers dès fin novembre.

  • Plan de transformation des zones commerciales : les projets lauréats annoncés fin novembre 2023

Les candidatures pour répondre à l'appel à manifestation d'intérêt du plan de transformation des zones commerciales sont ouvertes jusqu'au 6 novembre. "Les territoires pilotes sélectionnés devront être des zones générant des externalités négatives à l'échelle du territoire accueillant principalement des locaux destinés à une activité commerciale, situés hors des centres-villes, généralement en bordure de grands axes routiers", précise le cahier des charges. Tous les territoires d'implantation (métropole, ville moyenne, commune plus rurale) sont concernés, sachant qu'il n'est pas nécessaire d'être un territoire Action cœur de ville (ACV) ou Petites villes de demain (PVD) pour candidater. De nombreuses zones commerciales sont donc éligibles au programme, mais la sélection prendra en compte plusieurs éléments, dont la détermination des porteurs de projets à agir, la présence dans la zone de différentes parties souhaitant participer à la transformation ou encore la volonté de s'engager dans une transformation innovante.
Les projets sélectionnés pourront obtenir une subvention pour financer les études préalables "si celles-ci sont nécessaires pour définir et mener à bien le programme de requalification d'ensemble", indique le cahier des charges. Elle s'élève au maximum à 75.000 euros sous réserve d'un cofinancement de la dépense par au moins une des collectivités concernées par le projet. Le porteur de projet bénéficie aussi d'une subvention pour faciliter la conduite de projet (un chef de projet, des actions de concertation), d'un montant maximum de 75.000 euros sous réserve également d'un cofinancement. "Par ailleurs, tout au long de l'action, les porteurs de projet et leurs opérateurs spécialisés bénéficieront d'une offre d'assistance à maîtrise d'ouvrage de l'Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT) et des partenaires nationaux", signale le document.
Un cofinancement du déficit de l'opération commerciale est aussi prévu pour les zones commerciales affectées par de la vacance commerciale. L'aide sera modulée en fonction du degré de fragilité du territoire. Elle pourra couvrir jusqu'à 50% du déficit de l'opération, dans une limite de 500 euros par m2 de surface commerciale bâtie restructurée et de 100 euros par m2 de surface non bâtie nécessaire à l'opération commerciale.
Le dossier de candidature est téléchargeable sur le site de l'ANCT. Les projets lauréats seront annoncés le 29 novembre pour un démarrage de l'accompagnement des territoires lauréats dès le 1er décembre et une livraison des études de préfiguration et le début de la phase opérationnelle au premier trimestre 2024.