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Plan vélo et loi mobilités : les villes cyclables anticipent les bâtons dans les roues

Le Club des villes et territoires cyclables évalue à 85 millions d'euros la part de dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) mobilisable en 2019 pour des projets vélo. Ce à quoi s'ajoutent les 50 millions d'euros du fonds vélo. Le 24 janvier, à l'occasion de son point annuel, l'association a fait part de sa crainte de voir ces 135 millions d'euros sous-utilisés, au détriment d'une abondance de besoins locaux. Ses parlementaires membres du Club des élus nationaux pour le vélo se sont aussi positionnés sur la future loi d'orientation des mobilités (LOM).

Une pléthore de projets d'aménagements ou de planification cyclables sont en quête de financement. "L’appétence pour ce sujet est là mais si on veut bien faire les choses, sur le terrain cela chiffre vite", confie lors du point annuel du Club des villes et territoires cyclables son vice-président Michel Gillot, adjoint au maire de Saint-Cyr-sur-Loire et président du groupe vélo de Tours Métropole Val de Loire. Rien qu'en investissements voirie, le schéma directeur cyclable tourangeau évalue par exemple à 140 millions d'euros les besoins de ce territoire traversé par l'itinéraire de la Loire à vélo. "Soigner, entre autres, les franchissements de ponts routiers a son prix", détaille-t-il.

C'est là la traduction locale d'un enjeu plus large. Clôturé en décembre dernier - mais avec un second relevé ouvert jusqu'au 11 février - l'appel à projets (AAP) Vélo & Territoires de l'Ademe ciblant les territoires ruraux, péri-urbains et urbains peu denses a ainsi suscité un afflux de "candidatures provenant de toutes les régions métropolitaines, sans exception" (voir le bilan de cet AAP). Parmi les 165 projets reçus (dont 117 issus d'EPCI) - un record interne pour son service mobilité - l'Ademe se retrouve avec un gros tri à faire : ces candidatures représentent plus de 17 millions d’euros d’aides demandées alors que l'enveloppe affectée est de 2 millions d'euros.

Gare à la sous-utilisation des financements

Heureusement, l'appel à projets lié au fonds et au plan vélo prend le relais... Bien que salué par les associations, ce retour des aides de l’État - 350 millions d'euros sur sept ans, soit 50 millions d'euros par an via ce fonds auxquels peut s'ajouter la part mobilisable (15%) de la DSIL (570 millions en 2019) -  les fait redoubler de vigilance et de pédagogie. "Nous veillerons à la sanctuarisation des aides, à leur reconduction les années suivantes et à ce que les modalités et conditions exigées pour cet appel à projets du fonds vélo ne restreignent pas sa portée, en dissuadant ou écartant des porteurs de projets, et ne fragilisent ainsi le principe même du concours financier de l’État", prévient Pierre Serne, président du Club des villes et territoires cyclables.

Première ornière repérée : pour prévenir l'effet d'aubaine, les projets déjà délibérés localement ne seraient pas éligibles au fonds. "Dans une telle logique nous craignons de voir émerger à terme une sous-consommation du fonds, alors que les besoins des collectivités pour accélérer la réalisation d’itinéraires cyclables et de stationnement vélo sont énormes. Puis qu'on nous dise, un jour, qu'une telle enveloppe mise à disposition est finalement disproportionnée", poursuit-il. Les 85 millions d'euros par an de la DSIL potentiellement fléchés sur des projets vélo nécessitent aussi un regain d'attention : ces subventions DSIL ne sont pas forcément connues, et il revient aux préfets de région qui les attribue de le faire savoir. 

La LOM à vélo

À l'approche de l'examen, d'abord en commission puis en séance à compter du 19 mars et jusqu'au 2 avril prochain, du projet de loi d'orientation des mobilités (LOM), le Club des villes et territoires cyclables se félicite qu'il soit prévu (article 22) d'introduire un titre spécifique aux mobilités actives dans le code des transports. Mais aussi que le texte traite de l’intermodalité vélo-transports publics et crée des incitations à l’usage du vélo (forfait mobilité durable, stationnement en gare). Il regrette l’impasse faite sur les obligations en matière de stationnement vélo dans les bâtiments et sur l’interdiction d’aménager des places de stationnement cinq mètres en amont des passages piétons. Tout comme le manque d’outils prescriptifs donnés aux collectivités pour réguler les opérateurs de vélos et trottinettes en free-floating : "Le texte parle de cahier des charges encadrant leur utilisation. Il fixe des prescriptions minimales que les opérateurs devront respecter sous peine de sanction. Mais pas d'une délivrance de licence, un dispositif vers lequel il faut sans doute tendre", défend Matthieu Orphelin, député du Maine-et-Loire et rapporteur du titre III (mobilités propres et actives) du projet de loi. Dernier point qui fâche et devrait faire débat, l’impossibilité de cumuler le bénéfice du (nouveau) forfait mobilité durable et du (classique) remboursement de 50% de l’abonnement transport en commun.