PLF : le fonds de précaution en voie d'être totalement remanié par le Sénat

Saisie de l'examen du projet de loi de finances 2025, la commission des finances de la Haute Assemblée a redessiné le dispositif de prélèvement de 3 milliards d'euros en 2025 sur les recettes des grandes collectivités. Limité à 1 milliard d'euros, le mécanisme concernerait cette fois plus de 2.000 communes et la moitié des départements, et ce pour des montants individuels plus faibles. La transformation est regardée avec bienveillance par le gouvernement.

La ministre du Partenariat avec les territoires, Catherine Vautrin, l'a assuré ce 27 novembre aux sénateurs de la commission des lois, qui l'auditionnaient en présence du rapporteur spécial de la commission des finances sur la mission "Relations avec les collectivités territoriales" : "Le gouvernement regarde avec beaucoup d'intérêt les amendements que vous avez proposés" sur le fonds de précaution inscrit dans le projet de loi de finances pour 2024 et qui fait l'unanimité contre lui chez les élus locaux.

Les amendements évoqués par la ministre ont été adoptés la semaine dernière - au moment où les maires étaient réunis pour leur congrès annuel à Paris - par la commission des finances de la Haute Assemblée, sur proposition des rapporteurs spéciaux, le LR Stéphane Sautarel et sa collègue socialiste Isabelle Briquet. Ils prévoient la suppression du dispositif présenté initialement par le gouvernement, qui consistait à prélever 3 milliards d'euros en 2025 sur les recettes de 450 grandes collectivités et intercommunalités - une somme qui devait être reversée sur les trois années suivantes aux collectivités défavorisées. 

Lissage des recettes

"Trop brutal et inabouti", le prélèvement direct de l'État sur les ressources des collectivités doit être remplacé, selon les sénateurs, par un mécanisme de "lissage dans le temps des recettes des collectivités territoriales qui sont en mesure de contribuer au redressement des comptes publics". Le mécanisme doit permettre de dégager une économie de 1 milliard d'euros en 2025, sur un effort total de 2 milliards d'euros attendu l'an prochain par les sénateurs sur les collectivités (au lieu des 5 milliards d'euros initialement prévus par le gouvernement).

La contribution de 1 milliard d’euros serait "répartie entre le bloc communal, les départements et les régions en tenant compte du niveau des recettes de chaque catégorie de collectivités mais aussi de leurs situations financières relatives, mesurées par leur taux d’épargne brute moyen". L'addition de ces critères doit permettre de "prendre en compte, notamment, la situation globalement très dégradée des départements".

Selon les estimations de la commission des finances, le bloc communal devrait ainsi mettre en réserve 510 millions d'euros (la moitié de la somme provenant des communes et l'autre moitié des intercommunalités) en 2025. Quant aux contributions des régions et départements, elles s'élèveraient respectivement à 270 millions et 220 millions d'euros. La participation des départements (22%) au mécanisme serait ainsi substantiellement réduite par rapport à celle qui était prévue au départ (41%). Elle serait stable pour les communes (25,5%). En revanche, elle augmenterait significativement pour les intercommunalités (de 16,5% à 25,5%) et les régions (27% contre 17%).

La moitié des départements concernés

Au sein de chaque catégorie de collectivités, la contribution "serait répartie entre celles dont les capacités contributives sont les plus importantes au regard de leur population, de leur potentiel financier par habitant et de leur revenu par habitant, de manière progressive afin d’éviter tout effet de seuil". Le choix a été fait par les sénateurs de rendre davantage de communes contributrices : 2.387 exactement selon les simulations mises en ligne la semaine dernière (contre à peine plus de 200 dans la version gouvernementale du dispositif). Du côté des intercommunalités, le nombre de 126 établissements contributeurs (soit un sur dix) est avancé. Parmi les régions, la Corse et les régions ultramarines seraient exonérées. Enfin, seulement la moitié des départements seraient concernés, une donnée que la ministre a reprise lors de son audition.

Les montants qui devront être mis en réserve par les collectivités seront en moyenne sensiblement plus faibles que ce qui était prévu d'abord. "Des sommes qui étaient en millions d'euros peuvent devenir des sommes en centaines de milliers, voire dizaines", a indiqué Catherine Vautrin, précisant que certaines communes pourraient être mises à contribution à hauteur de "moins de 1.000 euros".

Dans le nouveau mécanisme, les fonds prélevés seraient rendus aux collectivités auxquelles ils ont été prélevés. Le reversement des ressources du fonds serait étalé sur "une période de trois ans" (2026-2028) et serait égal à "un tiers chaque année". Mais alors que la veille de son audition au Sénat, Catherine Vautrin avait évoqué – devant des députés - un reversement "à 100%" aux collectivités qui auront été prélevées, les sénateurs prévoient un reversement de 10% à des collectivités défavorisées, via des dispositifs de solidarité.

Éviter les "surprises"

"Votre assemblée a beaucoup travaillé" afin que le mécanisme puisse être "qualifié de plus juste", a commenté la ministre. Le gouvernement est "encore en train de travailler avec vos rapporteurs sur ce sujet", a-t-elle aussi confié aux sénateurs. Ainsi, la direction générale des collectivités locales (DGCL) finalise des simulations "qui permettront d'aller plus loin". L'objectif est de "regarder comment, effectivement - par rapport aux versions qui existaient - on arrive à ne pas avoir de surprises", a-t-elle dit. Il s'agit entre autres d'aboutir à ce que "les communes qui potentiellement sortaient [du fonds de précaution] parce qu'elles étaient bénéficiaires de la DSU ou du Fpic [NDLR : des dispositifs de péréquation] ne se retrouvent pas en haut de la pile dans ce nouveau mécanisme". Dans la mise en place de la nouvelle version du fonds de précaution, "on est aujourd'hui très avancés", a estimé Catherine Vautrin.

Les sénateurs devraient voter dans l'hémicycle en fin de semaine la première partie du PLF 2025 et, donc, entamer le 2 décembre la discussion de la seconde partie (volet dépenses). La mission Relations avec les collectivités territoriales et son article 64 concernant le fonds de précaution figurent à l'ordre du jour de la séance du 4 décembre. Le vote sur l'ensemble du texte étant prévu pour le 12 décembre. Mais les menaces d'une censure planent sur le gouvernement dès la semaine prochaine en cas d'utilisation du 49.3 par le Premier ministre pour l'adoption du projet de loi de financement de de la sécurité sociale (PLFSS).

 

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