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Environnement - Prévention des déchets : la dynamique territoriale est en marche

Parent pauvre des actions territoriales menées en matière de déchets, la prévention est un enjeu transversal où beaucoup reste à faire. Mais comment et pour quels résultats ? Un colloque de l'Ademe a permis de faire le point sur le sujet.

Un colloque de l'Ademe sur la prévention des déchets a fait salle comble le 15 juin en réunissant nombre de collectivités invitées à témoigner de leur politique en la matière. Au préalable, l'Ademe a dressé un bilan du déploiement des plans et programmes locaux de prévention, dont la loi Grenelle 1 prévoit la généralisation. Pour l'heure, 17 plans ont été mis en place et une trentaine d'autres sont en cours. La plupart ont été signés fin 2009. Portés par les départements ayant la compétence planification, c'est-à-dire tous excepté ceux d'Ile-de-France, ces plans sont appuyés par l'Ademe à hauteur de 250.000 euros en moyenne, soit 0,22 euro par habitant. En parallèle, une centaine de programmes ont été engagés et 180 sont en préparation. Dans leur cas, l'aide de l'Ademe atteint une moyenne de 120.000 euros par programme. Conditionnée à la réalisation annuelle d'objectifs fixés sur cinq ans, cette aide fait l'objet d'un accord-cadre de partenariat. "Globalement, le dispositif est bien accueilli par les collectivités, même s'il est encore perçu comme trop complexe", commente Dominique Traineau, du service prévention et gestion des déchets de l'Ademe. Spécificité du binôme plan-programme : l'un et l'autre ne sont pas forcément lancés simultanément et leur dynamique est même relativement indépendante, même si le but est bien qu'ils s'enchâssent et s'harmonisent sur un même territoire. Par ailleurs, cette dynamique n'est pas partout la même : les régions Bretagne, Ile-de-France et Pays-de-la-Loire sont ainsi les plus proactives en matière de programmes lancés.

 

Mise en place : les écueils à éviter

Le premier écueil à éviter est l'isolement. En effet, on ne met pas en oeuvre un tel plan seul dans son coin et sans impliquer les élus locaux. Or les associer au projet n'est pas si simple et les retours du terrain font état d'une certaine réticence qui nécessite, de la part du syndicat mixte qui porte par exemple un programme ou un plan, un effort préalable d'information auprès de ses adhérents que sont les intercommunalités. Sans celles-ci, difficile en effet d'agir au plus près de l'habitant. Au départ, le syndicat a donc souvent un rôle de maître d'ouvrage du plan ou du programme mais, au fur et à mesure que les collectivités s'investissent, son rôle peut évoluer vers de l'accompagnement. Dès lors, savoir animer un réseau d'acteurs territoriaux intégrant des élus est l'une des clés pour réussir. Au sein d'un syndicat mixte, une cellule projet peut veiller sur cette dynamique d'implication. "Cette dynamique à entretenir va bien au-delà d'une traditionnelle campagne de sensibilisation ou de communication", précise-t-on au syndicat mixte de la Vallée de l'Oise, porteur d'un plan de prévention entrant dans sa troisième année.

 

Informer et mesurer

Dans le Nord-Pas-de-Calais, le Symevad, un syndicat mixte qui gère le traitement des collectes sélectives issues de trois agglomérations, a pour sa part lancé fin 2009 un programme de prévention. Une première expérience dont Martial Vandewoestyne, son président, retire quelques principes simples. Pour promouvoir par exemple le compostage à domicile, l'accent doit selon lui être mis sur l'information : 60 réunions d'informations ont ainsi été menées sur ce territoire et 120 guides composteurs ont été formés. "A terme, 300 le seront, sachant qu'il vaut mieux inclure dans ce réseau de bénévoles quelques élus motivés ou bien des agents municipaux. Privilégier la proximité avec les communes est essentiel. Quand la gestion des déchets n'est plus de leur ressort, mobiliser ces acteurs n'est pas facile mais lorsqu'ils comprennent l'intérêt de la démarche, ils deviennent de précieux relais pour la mettre en œuvre." Les exemples d'actions sont alors multiples. Il peut s'agir de promouvoir le stop-pub, de déployer des bornes de récupération de déchets dangereux comme les piles, de préparer le terrain en vue de mettre en œuvre la tarification incitative, etc. Reste ensuite à mesurer les retombées d'un tel programme. Dans ce sens, l'Ademe propose une batterie d'indicateurs de suivi des moyens, de la réalisation, du changement des comportements, de notoriété du programme et d'impact sur les flux de déchets. "Mais ce suivi reste un volet à approfondir, tempère Dominique Traineau de l'Ademe. Il se fait durant les quatre années qui suivent le lancement du programme."

 

Ne pas trop institutionnaliser la communication

"C'est à travers les actions entreprises qu'on peut mobiliser des acteurs, qu'il faut à la fois recenser, consulter et informer tout au long du programme. Et pour le piloter, le recours à un prestataire extérieur à la collectivité peut s'avérer utile mais cela ne dispense pas d'avoir une personne interne à la structure qui suit le dossier. Quoi qu'il en soit, une fois lancé, le programme est assurément un atout pour le territoire", assure Claire Allonneau, du syndicat mixte du bassin Est des Pyrénées-Atlantiques. Idée concrète pour favoriser ce travail en réseau au sein d'un département : mettre à disposition des collectivités, comme le fait le conseil général du Morbihan, une structure mobile assurant une communication de proximité sur la prévention. "Mais attention à ne pas trop institutionnaliser la communication, sachant que pour toucher l'habitant, il est plus aisé de faire passer un message par un voisin ou un ami que par la collectivité", glisse-t-on à la communauté d'agglomération de Chambéry Métropole, qui a su impulser la création d'un réseau de bénévoles composteurs structuré en association et doté à terme d'un site de traitement.
En pied d'immeuble, les initiatives en la matière fleurissent aussi. L'action de promotion du compostage individuel peut alors s'appuyer sur un partenariat collectivité-bailleur comme c'est le cas dans le Puy-de-Dôme (Ophis-Valtom de Clermont-Ferrand) ou sur le travail d'une association dédiée comme à Nantes Métropole. Enfin, malgré leur absence de responsabilité concernant la collecte des déchets d'activité économique, les collectivités peuvent trouver un intérêt à s'impliquer dans ce domaine, à condition de dépasser la méconnaissance réciproque et le classique bras de fer entre élus et chefs d'entreprise. Exemple de réussite : le programme Ideal79 déployé par l'agglomération de Niort et son syndicat mixte, avec l'appui d'autres collectivités locales et des chambres consulaires (agriculture, commerce et industrie). En ciblant plus d'un millier d'entreprises de ce territoire, il a abouti à la signature d'une charte d'engagement et à une pléthore d'actions allant dans le sens d'une réduction des déchets ou de leur réemploi.

 

Morgan Boëdec / Victoires-Editions