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Quartiers prioritaires : des signaux encourageants sur le front du développement économique

Les politiques publiques nationales et locales menées dans les quartiers prioritaires seraient-elles en train de produire des effets ? Après trois années de baisse du chômage, le rapport 2018 de l'Observatoire national de la politique de la ville, publié le 27 mars 2019, apporte des signes encourageants. Mais il montre que le chemin est encore long. 

La situation en matière d'emploi et de développement économique des habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) reste détériorée mais des signaux montrent toutefois une amélioration. C'est ce qu'indique le rapport 2018 de l'Observatoire national de la politique de la ville (ONPV) sur l'emploi et le développement économique, publié le 27 mars 2019. Et ce léger rattrapage serait dû à une intensification pour ces territoires des actions de droit commun. Ainsi, la mobilisation plus forte des services de l'emploi, l'utilisation intensive des dispositifs comme la garantie jeunes ou les écoles de la deuxième chance amorceraient un mieux.
A titre d'exemple, au 30 juin 2018, 13% des demandeurs d'emploi inscrits à Pôle emploi en catégories A, B ou C résident en quartiers prioritaires, sachant que ces derniers ne couvrent que 8% de la population totale. Et ces personnes bénéficient plus fréquemment d'un accompagnement renforcé. Par ailleurs, 14% des jeunes en contact avec une mission locale en 2017 résident dans ces quartiers, avec un accompagnement renforcé. "Parmi les jeunes au moins titulaires du baccalauréat, ils sont deux fois plus nombreux à avoir bénéficié des dispositifs d’accompagnement récents (garantie jeunes) ou plus anciens : 8%, contre 4% de leurs voisins", détaille le rapport.

Succès mitigé des zones franches urbaines

Ajoutée à cette intensification, les mesures d'exception territoriale, comme les zones franches urbaines (ZFU) ou les emplois francs jouent aussi un rôle dans cette évolution, même si le rapport de l'ONPV émet quelques doutes sur les ZFU. Dans ces zones, plus d'entreprises ont été attirées et plus d'emplois créés mais "les disparitions d’établissements augmentent progressivement à l’issue des cinq premières années d’exonération à taux plein et les emplois créés n’ont pas nécessairement bénéficié aux résidents", indique ainsi le document. D'une part, "la politique a surtout attiré ou retenu les personnes les plus aptes à occuper les emplois créés dans ces zones, notamment les diplômés", et d'autre part, "seules les ZFU les mieux desservies par les transports en commun, et les moins déficitaires en termes d’attractivité initiale ont su tirer parti du dispositif pour créer de nouvelles entreprises et des emplois", précise le rapport, qui conclut à un "succès mitigé" du dispositif. Quant aux emplois francs, dont le gouvernement a lancé en avril 2018 une nouvelle version, le rapport comptabilise seulement 2.400 demandes acceptées, après sept mois d'expérimentation. Une progression lente qui a amené le gouvernement à assouplir les conditions et à étendre l'expérimentation à d'autres territoires (voir nos articles ci-dessous).
L'engagement des entreprises - charte "Entreprises et quartiers" depuis 2013, Pacte avec les quartiers pour toutes les entreprise (PaQte) depuis juillet 2018 - et les politiques urbaines participent aussi à ce rééquilibrage en faveur des quartiers prioritaires, favorisant le développement économique et l'emploi. Parmi elles : le soutien financier de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) pour les travaux de création de polarités commerciales et de restructuration de centres commerciaux dégradés et la relocalisation des commerces.

Un rattrapage insuffisant ?

Ces politiques contribuent donc chacune à leur façon à rééquilibrer les chances dans ces quartiers. Mais elles ne suffisent pas. Malgré une évolution positive, affichée par l'ONPV, la situation en matière de développement économique et d'emploi reste préoccupante. Par exemple, s'il y a un rattrapage au niveau des études - la part des diplômés du supérieur résidant étant à peine moins importante que celle des autres quartiers (38% contre 41%) -, 75% de la population des quartiers est encore peu ou pas diplômée contre 50% dans les unités urbaines. Le taux de chômage, s'il évolue à la baisse ces dernières années (24,7% en 2017 contre 25,3% en 2016 et 26,7% en 2014) reste deux fois et demi plus élevé dans les quartiers prioritaires que dans les autres quartiers de l'agglomération (9,2% en 2017).
Certes, la création d'entreprise est deux fois plus dynamique dans les quartiers prioritaires. Mais avec près de 200.000 établissements implantés, le nombre d'entreprises reste deux fois moins élevé que dans les autres quartiers des unités urbaines englobantes… Autre bémol : c'est souvent la difficulté d'accès à l'emploi qui pousse à créer son activité. "Ces micro-entrepreneurs peuvent être des chômeurs ou des travailleurs qui tentent de créer un projet sous ce statut dans le but, au moins au départ, de créer leur emploi", souligne le rapport. Le chemin pour un réel rattrapage est ainsi encore long.