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Finances locales - Recouvrement des produits locaux : une charte commune à l'Etat et aux collectivités

Les présidents des principales associations d'élus locaux doivent signer prochainement une charte nationale portant sur l'optimisation de la gestion des recettes des collectivités. Sans valeur juridique, ce document a vocation, par ses nombreuses recommandations, à enrichir les partenariats locaux entre la DGFIP et les collectivités.

Les collectivités vont bientôt disposer d'une charte nationale ayant pour objectif l'amélioration de la gestion de leurs recettes. Huit associations d'élus locaux, dont l'Association des maires de France, l'Assemblée des départements de France et l'Association des régions de France, ont récemment transmis à la direction générale des finances publiques (DGFIP) leurs remarques sur le projet. Avec les services de Bercy, elles ont largement contribué à l'élaboration du texte, au cours de plusieurs réunions à l'automne dernier. L'objectif est, en s'appuyant sur des bonnes pratiques, de fournir des recommandations aux ordonnateurs et aux comptables, afin que ceux-ci parviennent à "optimiser la chaîne de traitement des recettes des collectivités territoriales et de leurs établissements publics". Un enjeu dont dépendent la "protection des intérêts financiers" des organismes publics locaux et l'"amélioration du service rendu à l'usager", rappelle le document.
Premier levier au service de l'amélioration du recouvrement mentionné par la charte : l'usage des nouvelles technologies. Avec, en particulier, la dématérialisation des pièces de recettes susceptible de réduire les coûts moyens de traitement. Dans ce domaine, le protocole d'échange standard (PES) d'Hélios dans sa version 2 a permis déjà à quelque 175 collectivités de faire un bond. Leur ordonnateur peut en effet signer électroniquement les pièces comptables qu'il n'a plus à transmettre sur support papier à son comptable public, ce qui est source d'économie. Le dispositif sera généralisé en 2015, par un arrêté qui sera bientôt publié.

Des commissions bancaires plus élevées

Le recours aux nouvelles technologies de paiement (carte bancaire, prélèvement) offre quant à lui deux avantages : pour les usagers, la simplicité et pour les collectivités, un recouvrement plus rapide et moins coûteux. Or, en 2009, près des deux tiers des encaissements du secteur public local correspondaient encore à des chèques, moyen de paiement qui entraîne le plus de coûts de traitement. Des progrès importants ont toutefois été réalisés entre 2007 et 2009, période au cours de laquelle les paiements par carte bancaire ont progressé de 56%. Favorable à ces évolutions, l'Association des petites villes de France a cependant attiré l'attention de la DGFIP sur les coûts d'équipement, qui se révèlent élevés pour certaines collectivités. De son côté, l'Association des maires de France s'est inquiétée du risque d'augmentation des commissions bancaires.
Plus encore que les nouvelles technologies, l'approfondissement du partenariat entre l'ordonnateur et le comptable est essentiel, souligne la future charte. Ces dernières années, la DGFIP et les grandes collectivités locales sont allées dans ce sens en multipliant les conventions de services comptables et financiers, dans lesquelles les partenaires ont précisé leurs engagements. La charte contient des recommandations pour développer encore ces partenariats, à chaque étape du processus : lors de la préparation du recouvrement, lors de la phase de recouvrement elle-même et en bout de chaîne.

Plus de sécurité pour la gestion locale

En amont de la chaîne, plus exactement pour l'émission de créances à recouvrer, la DGFIP a proposé un modèle d'avis de sommes à payer annexé à la charte. Le but est de "simplifier la gestion administrative" tout en améliorant "la lisibilité pour les débiteurs". Ce modèle d'avis devrait aussi sécuriser la gestion locale, comme on le pense à la Fédération des maires des villes moyennes (FMVM) : "Certaines mentions obligatoires, comme le rappel des textes de référence ou la signature de l'élu, ne figurent pas toujours sur les avis de sommes qui sont aujourd'hui remis aux débiteurs, en particulier par les petites collectivités." Selon la FMVM, l'innovation proposée par la DGFIP est donc positive. Mais il serait plus adéquat de réaliser un modèle d'avis de sommes pour chaque grand service fourni par la collectivité.
S'agissant encore de la phase d'émission des créances, la DGFIP recommande aux collectivités de "regrouper les créances dues par un même débiteur avant d'émettre un titre unique à son égard". Le but étant, en toute logique, de réduire les frais de traitement. Certaines collectivités citées en exemple, comme Bordeaux, ont créé, notamment à cette fin, un compte unique dans lequel figurent toutes les prestations payantes dont bénéficie une famille en lui permettant de les gérer en ligne (repas à la cantine scolaire, accès à différents services culturels et sportifs, transports,...).

Pas d'huissier chez les retardataires

Si le concept leur semble séduisant, les associations d'élus locaux demeurent prudentes. L'Association des maires de France met en avant notamment la complexité de sa mise en œuvre, par exemple lorsque dans une famille, les parents sont divorcés. Le concept d'un compte unique regroupant les factures du service public local et les avis d'impôts locaux laisse évidemment les élus locaux encore plus sceptiques. Pour la Fédération des maires des villes moyennes, l'existence dans les rôles d'imposition de produits fiscaux non destinés aux collectivités, comme la redevance audiovisuelle, fait obstacle à toute évolution vers ce type d'outil.
S'agissant de la phase de recouvrement, la généralisation de l'application Hélios devrait la rendre plus efficace, puisque l'application gère automatiquement les relances des débiteurs en retard et supervise les actes de recouvrement forcé. Face à un retard de paiement, les ordonnateurs et les comptables restent quand même invités à cibler spécialement les créances "ayant le plus d'enjeux financiers". On notera que pour plus d'efficacité encore, la DGFIP avait proposé de remplacer la lettre de relance du débiteur par une intervention amiable d'un huissier. Une évolution qu'ont rejetée à l'unanimité les associations d'élus locaux. Leurs responsables ont jugé suffisantes les procédures actuelles, qui autorisent le comptable à procéder à la saisie des rémunérations ou du compte bancaire du mauvais payeur, ou, encore, en ultime recours, à la vente forcée de ses biens.