Urbanisme - Réforme de l'instruction des permis de construire : un guide pour aider les élus à s'organiser
A partir du 1er juillet 2015, les communes appartenant à des communautés de plus de 10.000 habitants ne pourront plus bénéficier de la mise à disposition gratuite des services de l'Etat pour l'instruction des autorisations d'urbanisme. La mesure, issue de l'article 134 de la loi Alur, concerne donc de nombreux territoires qui vont devoir prendre le relais, sans y être forcément bien préparés.
"Les communes concernées doivent s’organiser pour créer localement un service d’instruction ou étendre le périmètre de services préexistants", ont expliqué l’Association des maires de France (AMF) et l’Assemblée des communautés de France (ADCF) ce 16 septembre, lors de la présentation d’une étude qu’elles ont réalisée conjointement pour aider les communes et les communautés à mettre en place un service d'instruction à la disposition des maires.
Plus d'un millier d'agents instructeurs concernés
Selon une enquête réalisée en juin par l'ADCF auprès de 420 intercommunalités, plus d'un quart d'entre elles méconnaissent encore cette disposition ou n'ont pas encore organisé de réflexion au niveau local. Or, l'enjeu n'est pas mince. Selon l'Association des maires de France (AMF), environ 10.000 communes sont concernées par cette nouvelle donne. L'Etat serait amené à se "décharger" dans les tout prochains mois de près de 57% des autorisations d'urbanisme qu'il instruit aujourd'hui et cette proportion pourrait encore augmenter à l'avenir si le périmètre des communautés continue à s'étendre – le projet de loi "portant nouvelle organisation territoriale de la République" prévoit ainsi l'extension obligatoire du périmètre des communautés dont la population n'atteint pas un seuil minimal de 20.000 habitants contre 5.000 actuellement. Mais ce désengagement de l'Etat est loin d'être homogène sur le territoire : dans les Pays de la Loire et en Bretagne, ce sont respectivement 98% et 77% des autorisations d'urbanisme qui vont passer des mains de l'Etat à celles des collectivités contre moins de 2% en Lozère. Potentiellement, la réforme équivaut à un "déplacement" sur trois ans de 1.218 emplois "équivalents temps plein" des directions du développement des territoires (DDT, anciennes directions de l'équipement) aux collectivités territoriales et à leurs groupements, ont chiffré l'AMF et l'ADCF.
Un service exclu du champ concurrentiel
"Ce transfert marque une nouvelle étape dans la démarche de mutualisation des services engagée par la loi du 13 août 2004, a souligné Jacques Pélissard, président de l'AMF, lors de la présentation à la presse du guide ce 17 septembre. Mais alors que les collectivités se voient amputées de 28 milliards d'euros sur quatre ans, le retrait de ce service assuré par l'Etat ne tombe pas au bon moment puisqu'il se traduit par un effet de ciseau de 44 millions d'euros." Les collectivités vont donc devoir trouver le mode d'organisation le plus adapté pour remplir ce nouveau service qui n'entre pas dans le champ concurrentiel. L'autorité en charge de la délivrance des permis de construire - le maire dans l'écrasante majorité des cas - ne peut en effet en confier l'instruction qu'à un nombre limité de personnes publiques, énumérées dans l'article R. 423-15 du Code de l'urbanisme. L'AMF et l'ADCF estiment à plus de 350 le nombre de services d'instruction intercommunaux à créer d'ici à juillet 2015 alors qu'actuellement, 23% des communautés disposent d'un service mutualisé organisé pour le compte des communes membres.
Trois grands types d'organisation possibles
Plusieurs solutions s'offrent aux collectivités pour pallier le retrait de l'Etat et le guide présente chaque mode d'organisation dans sa dimension juridique, organisationnelle et financière – instruction dans le cadre communal et mise à disposition auprès d'autres communes, instruction dans le cadre communautaire, instruction mutualisée dans un cadre plus large (syndicat de Scot, par exemple). Une fois rappelés les grands principes qui régissent le champ de l'instruction et les liens entre les différentes compétences en urbanisme, il revient sur chaque étape de la mutualisation de l'instruction. A partir des résultats de l'enquête, il montre d'abord ce qui a conduit les communautés à créer un service mutualisé. Il identifie ensuite les périmètres qui peuvent être retenus pour la création de ces services, dans les limites de ce qu'autorise le Code de l'urbanisme, en fonction des spécificités du territoire et des arbitrages politiques des élus. Il évoque également les liens entre le service d'instruction et la commune compétente pour délivrer les permis de construire, en proposant notamment un canevas de la convention qui doit être signée entre les deux parties. Une partie très pratique identifie aussi l'organisation concrète des services d'instruction, leur taille et leur coût, la place qu'ils occupent dans les organigrammes. Enfin, le guide s'achève sur les nouvelles relations que l'Etat souhaite jouer auprès des territoires en matière d'application du droit des sols (ADS), à partir de l'instruction du gouvernement du 3 septembre dernier (lire notre article ci-contre).