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Cour des comptes - Régime des intermittents : la réforme reste à faire

Dans le cadre du suivi de ses recommandations, la Cour des comptes revient, dans son rapport annuel 2008, sur les suites données au chapitre du rapport précédent consacré à "La gestion du régime d'indemnisation des intermittents du spectacle". Elle rappelle notamment la situation catastrophique dans laquelle se trouvait ce régime, qui représentait à lui seul plus de 30% du déficit de l'assurance chômage. Dans un contexte aussi dégradé, la Cour formulait plusieurs recommandations, visant notamment à mieux définir le champ couvert par les annexes 8 et 10, à rendre plus strictes les conditions de recours au régime des intermittents par les employeurs (les abus, en connivence entre salariés et employeurs, étant particulièrement nombreux) et à accroître la transparence du régime. La cour demandait aussi qu'il soit mis fin "aussi rapidement que possible" au fonds transitoire chargé d'indemniser les exclus du système et "qu'au cas où un fonds pérennisé viendrait à être mis en oeuvre [ce qui a bien été le cas], celui-ci soit doté d'une structure de pilotage permettant d'identifier clairement les responsabilités respectives des deux ministères concernés" (Culture et Travail).
Un an après ces recommandations, la Cour des comptes est très sévère sur leur mise en oeuvre, ou plutôt sur leur non mise en oeuvre. Elle constate en effet que "la situation du régime des intermittents du spectacle a continué à se dégrader et [qu']aucune suite n'a été donnée à ses recommandations visant à remédier aux principaux défauts des deux dispositifs" (le régime proprement dit et les fonds gérés par l'Etat). La Cour rappelle que la pérennité du régime des intermittents du spectacle, "dispositif utile et original", passe nécessairement par des mesures "visant à mieux maîtriser la dynamique de ses dépenses". Elle demande donc à nouveau le resserrement du champ d'application du régime, la mise en oeuvre d'une logique assurantielle (au lieu d'une logique de solidarité) permettant de faire varier le taux des cotisations en fonction de l'importance du recours à l'intermittence par les différents employeurs du spectacle vivant et la clarification du rôle des fonds gérés par l'Etat (fonds transitoire et fonds de professionnalisation et de solidarité).
Comme l'Inspection générale des affaires sociales, la Cour des comptes dénonce depuis plusieurs années les dérives du régime des intermittents. Mais il est peu probable qu'elle soit entendue davantage que lors de ses précédentes interventions sur le sujet. Il a en effet fallu trois ans d'affrontements et de négociations pour mettre un terme à un conflit social sans précédent dans le monde du spectacle et revenir à un relatif statu quo. Depuis sa prise de fonction, la ministre de la Culture s'est bien gardée de rouvrir le dossier, en dépit d'un nombre d'allocataires reparti à la hausse et d'un déficit qui continue de se creuser. Pour leur part, les collectivités territoriales, qui subventionnent une part importante du spectacle vivant, sont tétanisées par le souvenir des annulations de festivals et autres grandes manifestations artistiques en pleine saison touristique. Etat et collectivités ont donc tout intérêt à ne pas rallumer une mèche qui ne demande qu'à repartir.

 

Jean-Noël Escudié / PCA