Région urbaine grenobloise : un EPFL pour lutter contre la rareté des terrains

Avec la rareté du foncier et des prix élevés, la création d'un outil performant d'intervention sur le marché foncier s'est imposée à la région urbaine grenobloise. En 2002, un EPFL a vu le jour, avec comme ambition d'étendre son territoire d'intervention et sa capacité de négociation.

La rareté des terrains disponibles dans la région urbaine grenobloise (RUG) pour construire des logements sociaux, aménager des zones d'activités économiques, organiser de nouveaux pôles urbains ou réorganiser les voiries exige que soient constituées des réserves foncières suffisantes et appropriées. "L'idée de créer un outil d'intervention sur le marché foncier au niveau de la RUG (14 communautés d'agglomération ou communautés de communes et 23 communes isolées, soit 157 communes) est dans les têtes depuis la validation du schéma directeur en juin 2000. Tous les acteurs (communes, structures intercommunales, département) ont, à cette occasion, exprimé l'urgence de coordonner leurs objectifs et leurs moyens en faveur d'une politique foncière maîtrisée", rappelle Philippe Auger, directeur du syndicat mixte du schéma directeur.

L'EPFL, pour l'heure à l'échelle de la Métro

Ainsi, le 5 juillet 2002, le conseil communautaire de la Métro a pris en main la création de l'établissement public foncier local (EPFL) de la région urbaine grenobloise et a adopté les statuts de cet établissement public à caractère industriel et commercial. Pourquoi cette initiative de la communauté de l'agglomération grenobloise ? Du fait de son expertise en matière de foncier. Elle mène déjà depuis plus de vingt ans une politique active de réserves foncières afin de concilier au mieux plusieurs exigences de développement urbain. Le conseil général de l'Isère a également confirmé son adhésion à ce nouvel outil. "Il reste fondamental que d'autres structures intercommunales se joignent à cette initiative, élargissant l'aire d'intervention de l'EPFL à l'ensemble de la région urbaine grenobloise", explique Annie Deschamps, déléguée pour la Ville de Grenoble et présidente de l'Agence d'urbanisme de la région grenobloise (AURG). Le 24 janvier 2003, l'EPFL a réuni pour la première fois son conseil d'administration. Ce conseil est composé de trente-sept membres. Trente-deux sont désignés par la communauté d'agglomération et cinq par le conseil général de l'Isère.
Dans le cadre de l'aménagement du territoire, l'EPFL se situe entre les acteurs de la planification et de l'aménagement urbain, et les maîtres d'ouvrage qui viabilisent les terrains, construisent les bâtiments et les valorisent. Il agit comme opérateur foncier public.

Dimension stratégique et capacité de négociation

Concrètement l'EPFL réalise pour son compte ou pour le compte de ses membres toute acquisition foncière ou immobilière en vue de la constitution de réserves foncières sur des secteurs ayant vocation à recevoir des logements, des activités économiques et des équipements collectifs, et devant faire l'objet d'une opération globale de rénovation urbaine. Ses interventions se déclinent en achat, portage, gestion et revente des terrains à la collectivité ou à son opérateur. L'EPFL réalise également les études et les travaux liés à ces actions d'acquisition et peut fournir d'autres prestations techniques ou d'ingénierie foncière à ses membres. Il peut aussi se voir confier la gestion de zones d'aménagement différé et se voir déléguer le droit de préemption en site urbain.
Deux points restent encore à approfondir, d'après Juliette Brumelot, qui a oeuvré à la mise en place de l'EPFL en tant que chargée d'études économie-foncier pour l'AURG : "Il manque, d'une part, une dimension stratégique à l'EPFL sur laquelle nous travaillons. Dès l'ouverture, le budget a été consommé, et une mise à plat des critères de sélection des dossiers a été nécessaire. D'autre part, l'EPFL n'est pas encore dotée de la compétence "négociation", qu'il devra acquérir. Pour l'heure, il a recours à un prestataire extérieur."

La capacité d'intervention de l'EPFL grenoblois

Une première évaluation des besoins annuels en matière de portage a permis de définir une capacité d'investissement de l'EPFL comprise entre dix et douze millions d'euros par an. Denis Roux, maire de Noyarey, une commune de deux mille habitants au nord-ouest de Grenoble, est un des premiers bénéficiaires de l'outil foncier. Il témoigne : "L'EPFL nous permet une réactivité à l'acquisition d'un terrain, autrement dit une capacité de portage qu'il ne nous est pas possible d'avoir sans lui. Financièrement, cela reste avantageux. L'EPCI ne répercute pas, au moment de la cession, les frais financiers, mais seulement le taux d'actualisation [impact de l'inflation sur la valeur des biens en portage, ndlr]." Le budget d'investissement de l'EPFL est défini dans le cadre du programme pluriannuel d'intervention d'une durée de cinq ans. Ce programme permet de prévoir un montant d'acquisitions annuel moyen et un plan de financement qui comprend : des subventions publiques, des emprunts et des fonds propres issus de la taxe spéciale d'équipement (TSE). L'établissement dispose en effet de fonds propres car il peut lever la TSE. Il s'agit d'une taxe additionnelle aux quatre taxes locales. Son montant est arrêté chaque année par l'assemblée générale dans la limite d'un plafond fixé par la loi de finances. Le produit attendu de la TSE est réparti entre les autres impôts locaux, proportionnellement au produit propre. Cette taxe additionnelle sera répercutée sur la taxe foncière bâtie et non bâtie, sur la taxe d'habitation et sur les entreprises pour la taxe professionnelle.

Séverine Cattiaux / Innovapresse Grenoble pour Localtis

"L'EPFL est l'outil foncier des collectivités"

Philippe Fages, directeur de l'établissement public foncier local.

Quels sont les objectifs de l'EPFL ?

Faciliter les actions de recomposition des espaces très urbanisés subissant des phénomènes de fort vieillissement, qu'il s'agisse de coeurs de village ou de friches industrielles. Poursuivre l'effort d'offre de terrains pour la réalisation d'opérations de logements sociaux. Maîtriser les espaces les plus stratégiques pour le développement d'activités économiques.

Pourquoi l'EPFL est-il un outil efficace ?

Parce qu'il est l'outil des collectivités qui sont elles-mêmes au coeur du marché foncier entre les propriétaires et les opérateurs. Les collectivités ont la compétence pour établir le droit des sols et agir sur tous les outils fonciers (acquisition, préemption, expropriation). Elles encadrent la mise en urbanisation. Elles perçoivent la fiscalité directe (impôts locaux sur la propriété) ou indirecte (par leur participation aux équipements publics d'accompagnement de l'urbanisation).

Quelles sont les conditions de sa réussite ?

Les achats et les cessions doivent impérativement s'équilibrer. C'est pourquoi toutes les acquisitions réalisées par l'EPFL doivent faire l'objet d'une convention de reprise, au bout de six ans en moyenne, par la collectivité en charge d'un projet d'aménagement.

La loi fondatrice de l'EPFL

La loi SRU (solidarité et renouvellement urbains) définit dans son article 28 les règles de création et les missions de l'EPFL.

Les établissements publics fonciers locaux sont des établissements publics locaux à caractère industriel et commercial. Ils interviennent sur le territoire des établissements publics de coopération intercommunale ou des communes qui en sont membres et, à titre exceptionnel, à l'extérieur de ce territoire pour des acquisitions nécessaires à des actions ou opérations menées à l'intérieur de celui-ci.
L'établissement foncier est créé par le préfet au vu des délibérations concordantes des organes délibérants d'établissements publics de coopération intercommunale qui sont compétents en matière de schéma de cohérence territoriale, de réalisation de zones d'aménagement concerté et de programme local de l'habitat, et des conseils municipaux des communes qui sont membres de l'un de ces établissements.

La représentation des membres du conseil d'administration

Le calcul de la représentation au conseil d'administration de l'établissement public foncier local de la région urbaine grenobloise s'effectue selon la répartition suivante :

- communes de 0 à 20.000 habitants : un délégué, un suppléant ;
- communes de 20.001 à 50.000 habitants : deux délégués, deux suppléants ;
- communes de 50.001 à 100.000 habitants : trois délégués, trois suppléants ;
- au-delà de la 100.001 habitants : quatre délégués, quatre suppléants, plus un délégué sans suppléant par tranche de 25.000 habitants.
Les autres institutions telles que les conseils généraux et les conseils régionaux désignent cinq délégués et cinq suppléants au conseil d'administration.

Aller plus loin sur le web


Site internet de la communauté d'agglomération de Grenoble (Métro).
http://www.la-metro.org
 
Site internet de l'Agence d'urbanisme de la région grenobloise (AURG).
http://www.aurg.org

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