Archives

Sécurité civile - Renationaliser les Sdis : une idée sérieuse ?

Les départements ont à nouveau brandi, mercredi, le retour à la nationalisation des Sdis. Une façon de protester contre leur mise à l'écart des décisions récentes qui a porté ses fruits : l'Etat s'est engagé à changer ses méthodes de travail et à accompagner toute nouvelle décision de "fiches d'impact budgétaire". Bonne nouvelle par ailleurs : les Sdis vont atteindre leur "pic d'investissement".

Les départements, qui organisaient la deuxième Journée nationale des Sdis, mercredi 4 février, ont remis la question de la nationalisation des services d'incendie et de secours sur le tapis. Conséquence d'un "ras-le-bol", de l'accumulation de décisions prises dans leur dos depuis plusieurs mois alors qu'ils sont aujourd'hui le principal financeur des Sdis. Les présidents de conseils généraux, dans leur résolution de décembre dernier, avaient déjà tenu à rappeler le principe du "qui paye commande". "Il ne saurait demeurer concernant ces services deux autorités. Dans ces conditions, la grande majorité demande que les Sdis soient étatisés", avaient-ils expliqué. Deux mois après, les relations avec l'Etat se sont légèrement améliorées mais la détermination reste grande. Pourtant peu favorable à cette idée de nationalisation, Claudy Lebreton, le président de l'Assemblée des départements de France (ADF) a reconnu qu'elle avait "une certaine cohérence". "Un grand service qui regroupe gendarmerie, police, pompiers, services de santé et hôpitaux, cela a une cohérence. Je mesure l'émotion que cette proposition a suscité, on a des retours." Le débat ne fait-il que commencer alors qu'une  proposition de loi du député Jean-François Mancel va elle aussi dans le sens du "rétablissement des compétences de l'Etat en matière d'incendie et de secours" ? En tout cas, elle agite les présidents de conseils généraux : trois d'entre eux ont pris la parole mercredi pour manifester leur intérêt, même si, à l'ADF, on veut plutôt y voir l'expression d'un "coup de gueule".

 

Fiches d'impact budgétaire

La nationalisation des Sdis est un serpent de mer presque aussi vieux que le début de leur départementalisation en 1996. Mais c'est le débat concernant les "rouges et blancs", c'est-à-dire les relations entre les pompiers et le Samu, au cours duquel les départements ont été tenus à l'écart, qui a créé l'irritation que l'on connaît. Débat qui a débouché en juin dernier sur la présentation d'un "référentiel sur l'organisation du secours à personne et l'aide médicale d'urgence". Placés devant le fait accompli alors qu'ils sont mis à contribution, les élus représentés au sein de la Cnsis (Conférence nationale des services d'incendie et de secours) ont refusé, en novembre dernier, d'examiner l'arrêté interministériel qu'on leur soumettait, exigeant une fiche d'impact financier. D'autres pommes de discorde sont venues s'ajouter : un projet de décret sur les vacations des volontaires (dont l'impact financier a été évalué entre 50 et 63 millions d'euros par l'ADF) abandonné depuis ou le maintien du "plafonnement" des contingents communaux dans le budget 2009. La détermination des départements semble avoir porté ses fruits si l'on en juge par le message que le directeur de la Sécurité civile, Alain Perret, est venu délivrer mercredi. "Nous avons décidé de faire évoluer notre manière de travailler. Avant, on était dans une situation ubuesque majeure : l'Etat produisait un certain nombre de règles et les remettait sur le bureau des élus", a-t-il reconnu. Difficile d'être plus clair. Et de proposer : "pour toutes les nouvelles actions juridiques, l'administration présentera une fiche d'impact budgétaire". De quoi satisfaire Eric Doligé, le président de la Cnsis, pour qui "le ministre a senti le vent du boulet". Vu sa situation financière, l'Etat, de fait, ne semble pas du tout intéressé par ce retour.
La commission tripartite mise en place par Michèle Alliot-Marie dans le cadre de son plan "Ambition volontariat" sera un premier test pour inaugurer ces "nouvelles relations" de travail. Car les échanges promettent d'être vifs, les élus se refusant à tout "statut du volontaire". De plus, les départements demandent une vraie reconnaissance de leur rôle de "patron". A l'heure de la clarification des compétences, certains présidents évoquent à demi-mot une véritable compétence opérationnelle des conseils généraux sur les Sdis (excepté pour les opérations de grandes envergures, type plan Orsec). Car "qui paye commande".

 

Michel Tendil

 

Les Sdis sur la voie d'une stabilisation financière

En 2008, les Sdis étaient en phase de stabilisation financière. C'est la conclusion du cabinet Lamotte qui a remis son enquête annuelle, lors de la deuxième Journée nationale des Sdis, mercredi. L'année 2009 constituera une année charnière : les dépenses de personnel devraient continuer de progresser mais autour de 3,7% par an seulement. Après avoir connu des rythmes de croissance très importants (réforme de la filière des sapeurs-pompiers professionnels, RTT, etc.), les Sdis s'orientent désormais "vers des rythmes d'évolution tout à fait comparables au reste de la fonction publique territoriale", relève l'enquête. Dans le même temps, les Sdis atteindront un "pic d'investissement". Les dépenses d'investissement devraient amorcer leur décrue : -11% en 2010 et -14% pour 2011. La modernisation du patrimoine immobilier et le projet Antares, qui grevaient lourdement les budgets de ces dernières années, pèseront moins. Ainsi, vu leur niveau d'investissement des trois dernières années, la plupart des Sdis devraient être éligibles au FCTVA, a indiqué Arnaud Mandement, le directeur associé du cabinet Lamotte.
La part des départements dans le financement des Sdis, aujourd'hui de 54% (43% pour les communes et intercommunalités), pourrait atteindre 57% en 2011, compte tenu du plafonnement des contingents communaux et intercommunaux. Toutefois "la tempête financière est arrivée, on a réduit la voilure", a commenté Arnaud Mandement . En 2009, les départements devraient ainsi augmenter leur contribution de 4,72% contre 6,40% prévu avant la crise. On reste toutefois bien au-dessus de l'inflation prévisible.
L'enquête montre par ailleurs les importantes disparités qui existent entre les départements concernant les effectifs de garde : on passe ainsi d'un pompier pour 1.430 habitants à un pour 26.000 habitants. Soit un rapport de un à vingt !

M.T.