RER métropolitains : les sénateurs veulent renforcer leur rôle pour tous les territoires

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté ce 18 octobre la proposition de loi déjà approuvée en juin à l'Assemblée nationale pour accélérer le déploiement de RER métropolitains dans une dizaine de villes en France. Les modifications qu'elle a apportées au texte visent notamment à mieux prendre en compte les enjeux d'équité territoriale dans la création de ces nouveaux services de mobilité.

Approuvée par l'Assemblée nationale en juin dernier (voir notre article du 19 juin 2023), la proposition de loi relative aux services express régionaux métropolitains (Serm) visant à organiser la mise sur pied d’au moins une dizaine de RER métropolitains en France dans un délai de dix ans a été adoptée par la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat ce 18 octobre.

Tout en jugeant nécessaire ce "choc d'offre" en faveur des transports collectifs autour des métropoles et en disant "partager l'ambition" du texte, la commission, qui a pour rapporteur le sénateur LR des Alpes-Maritimes Philippe Tabarot, affirme avoir voulu "améliorer [s]a portée en prenant mieux en compte la réalité de tous les territoires – notamment ceux qui seront éloignés des infrastructures ferroviaires réalisées". Sur les 42 amendements qu'elle a adoptés, près d'un tiers tournent autour des enjeux d'équité territoriale et du rôle des collectivités dans l'organisation de ces nouveaux services.

Prendre en compte les besoins des territoires éloignés du centre des métropoles

Pour parachever l'offre de mobilité multimodale autour des Serm, qui peuvent déjà intégrer plusieurs autres modes de transport comme les transports guidés, la commission a proposé d'y ajouter le covoiturage et l'autopartage ainsi que les réseaux cyclables.

Elle a par ailleurs estimé qu'une offre de cars à haut niveau de service devait être incluse systématiquement dans les Serm, afin notamment de prendre en compte les territoires les plus éloignés du centre des métropoles qui ne bénéficient pas forcément d'une gare ferroviaire. Autre atout mis en avant par la commission : ces lignes, jugées "faciles à mettre en place et peu coûteuses" permettront de "répondre à l'impératif de décarbonation des mobilités et d'accompagner la mise en place des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m), en évitant d'exclure certains usagers du cœur des villes". Ce sujet a donné lieu récemment à une mission flash du Sénat dont le rapporteur était d'ailleurs Philippe Tabarot (voir notre article du 14 juin 2023).

Des collectivités à placer "au coeur du processus de décision"

La commission a en outre souhaité "placer les collectivités territoriales au cœur du processus de décision". Pour cela, elle a prévu d'associer systématiquement les départements et les maires au processus de concertation préalable à la réalisation des Serm. Elle a également voulu simplifier et clarifier la procédure de création des Serm en précisant tout d’abord l’ordre des étapes préalables à leur labellisation – concertation puis délibération du ou des conseils régionaux concernés et arrêté du ministre des Transports conférant le statut de Serm. La procédure a aussi été assouplie en ne faisant plus du contrat opérationnel de mobilité une condition sine qua non de l’obtention du statut de Serm. Toutefois, ce contrat doit être signé dans les douze mois qui suivent la publication de l’arrêté du ministre des Transports conférant le statut de Serm.

Pour renforcer encore le rôle de chef de file des mobilités de la région et éviter, selon ses termes, "toute recentralisation de cette politique", la commission a aussi voulu subordonner la décision de créer un Serm à l'adoption d'une délibération du conseil régional concerné. Tout en approuvant les mesures du texte sur la gouvernance locale des projets de Serm, la commission a de plus estimé "nécessaire" de renforcer la collégialité entre les maîtres d’ouvrage et l’implication des financeurs dans les projets. Pour mieux assurer l’effectivité du report modal visé par les Serm, elle a également précisé que les acteurs impliqués devaient définir des objectifs quant au niveau de service souhaité, à la sécurité et à l’interopérabilité des infrastructures réalisées lors de leur mise en service.

Précisions sur le rôle de la Société des grands projets

"La possibilité ouverte à la Société du Grand Paris, rebaptisée Société des grands projets (SGP) de collaborer avec SNCF Réseau sur les Serm est une avancée à saluer", estime en outre la commission. La SGP ayant désormais vocation à intervenir à la demande de tous les territoires, selon leurs spécificités, les sénateurs ont cherché à renforcer le rôle des collectivités dans le choix de cette société comme maître d'ouvrage. Un amendement du rapporteur vient ainsi préciser que ce n’est qu’à la demande de la région et des autorités organisatrices de la mobilité concernées que la SGP pourra intervenir dans l’élaboration et la maîtrise d’ouvrage de projets de Serm. Un accord du ministre chargé des transports reste cependant nécessaire puisque le réseau ferré national est propriété de l’État. Si les collectivités le souhaitent, la SGP aura également la possibilité d’intervenir sur les lignes dont elles assurent aujourd’hui la gestion et dont elles sont parfois propriétaires, selon un autre amendement de Philippe Tabarot.

Persistance des inquiétudes sur le financement des Serm

La commission s'inquiète toutefois de "l’absence de garanties de financement des Serm", comme l'a déjà montré un récent rapport sénatorial. "Le déploiement de 10 Serm d’ici 10 ans suppose (...) de réaliser des investissements significatifs (environ 15 milliards d’euros) en infrastructures de transport et en matériel roulant, dans une première phase, puis, une fois leur mise en service, en exploitation (…). Pour autant, face à ce 'mur d’investissements', les promesses et engagements de l’État sont, à ce jour, loin d’être à la hauteur de l’objectif", estime-t-elle. L’annonce d’un déblocage de 700 millions d’euros en faveur des Serm n'est pas de nature à la rassurer, pointe-t-elle. Elle a donc prévu comme première réponse l’organisation d’une conférence nationale de financement sur les Serm d’ici le 30 juin 2024 et adopté la mise en place d’une tarification spécifique des péages ferroviaires pour les Serm.

Les sénateurs entameront l'examen de la proposition de loi en séance publique ce 23 octobre.

 

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