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Jeunesse - Service civique : qui sont les volontaires ?

Deux études récentes, l'une nationale, l'autre francilienne, permettent de connaître un peu mieux le profil des jeunes volontaires au service civique. Des chiffres qui montrent quelques écarts avec l'esprit du dispositif et esquissent les domaines d'intervention des missions proposées.

"L'année 2011 sera la véritable première année pleine du dispositif, donc l'année de référence où on évaluera la loi que vous avez adoptée", indiquait  Jeannette Bougrab le 9 mars dernier lors de son audition sur le service civique devant les députés. Si, comme l'affirme la secrétaire d'Etat à la Jeunesse, les chiffres parleront fin 2011, il est déjà bon de se retourner sur un dispositif qui a séduit plus de 10.000 jeunes l'année passée et qui peut se vanter d'avoir 40.000 inscrits en attente de missions.
Rappelons que le service civique a été institué (en mars 2010) afin de donner à "tous les jeunes qui le souhaitent, âgés de 16 à 25 ans, diplômés ou non, l'opportunité de s'engager, de donner de leur temps à la collectivité, tout en renforçant la cohésion nationale et la mixité sociale".
Deux études toutes récentes permettent d'en savoir un peu plus sur le profil des jeunes volontaires. L'une, communiquée par la préfecture de la région Ile-de-France, porte sur les huit départements franciliens, l'autre est un bilan national de l'Agence du service civique un an après la création du dispositif.
Tour d'horizon sur ces jeunes qui répondent présents au dispositif... et même un peu trop (lire ci-contre notre article du 9 mars).

Un public largement féminin, en majorité sans emploi et plutôt diplômé

Au 31 janvier 2011, sur les 812 volontaires répertoriés dans les huit départements d'Ile-de-France, Paris est de loin celui où ils sont les plus nombreux (473), devant la Seine-Saint-Denis (93), les Hauts-de-Seine (59), l'Essonne (58), le Val-d'Oise (43), la Seine-et-Marne (34), les Yvelines (29) et le Val-de-Marne (23).
Excepté en Seine-et-Marne (56% d'hommes pour 44% de femmes), les jeunes femmes sont majoritaires dans les rangs des volontaires aux différentes missions du service civique (62% de femmes en moyenne pour 38% d'hommes). Même chose au niveau national, avec 57% de femmes contre 43% d'hommes.
Les domaines d'intervention des missions sont variés : solidarité, santé, éducation pour tous, culture et loisirs, sport, environnement, mémoire et citoyenneté, développement international et action humanitaire, intervention d'urgence... La solidarité est de loin le thème qui offre le plus de postes aux volontaires (230), même si Paris fausse la donne avec déjà 144 volontaires à lui seul. Seuls, en réalité, les Yvelines (59%) et le Val-de-Marne (61%) concentrent la majorité de leurs effectifs dans la branche solidarité. Le domaine "éducation pour tous", qui arrive en deuxième position du classement, représente pourtant la majorité des volontaires pour davantage de départements : 44% des effectifs dans les Hauts-de-Seine, 37% dans le Val-d'Oise, 35% en Seine-et-Marne, 29% en Seine-Saint-Denis.
Viennent ensuite la culture, l'environnement, la mémoire et la citoyenneté, le développement international, le sport, l'intervention d'urgence et la santé (cinq départements sur les huit étudiés n'ont aucune mission liée à la santé). Au niveau national, les quatre missions offrant le plus de postes sont les mêmes que sur l'Ile-de-France, mais la santé est en cinquième position. On peut noter que sur l'ensemble des volontaires (au niveau francilien comme sur le territoire), une majorité est sans emploi (respectivement 50% et 42%) mais diplômée avec un niveau d'études supérieures (40%) ou égal au bac (36%).
Si "l'un des objectifs du service civique est d'attirer davantage de jeunes issus des quartiers sensibles",  pourtant nombreux en l'Ile-de-France, il est surprenant de constater à la lecture des chiffres que 45% d'entre eux ne résident pas dans des communes ayant signé un Cucs. Certes une majorité s'y trouve, mais de peu (47%, les 8% restant étant des jeunes non-franciliens), avec pour certains départements une différence considérable : ainsi, en Seine-et-Marne, 76% sont des volontaires non-issus de communes signataires, dans les Yvelines, ils sont 72%, dans l'Essonne 50%, et dans le Val-d'Oise 53%. Certains des jeunes visés par le dispositif passent par conséquent à côté. 
Il en est de même pour les mineurs, pourtant cibles du service civique. En effet, l'étude nationale montre que moins de 2% des volontaires étaient mineurs au moment de la signature de leur contrat, mais également que peu de structures ont souhaité accueillir des volontaires de moins de 18 ans...
La moyenne d'âge des volontaires est par conséquent un peu plus élevée et sensiblement la même dans les départements analysés (22 ans) que sur le territoire national (21 ans et 5 mois).  

Le contrat service civique n'est pas un emploi salarié

S'il donne lieu au versement d'une indemnité mensuelle de 442,11 euros nets par l'Etat et ouvre droit à un régime complet de protection sociale (sécurité sociale, retraite), ainsi qu'au versement par la structure d'accueil d'une prestation de 100,46 euros pour les frais de transport, logement et nourriture,  le service civique n'est pas un emploi salarié et n'ouvre par conséquent  pas droit au chômage. Il est donc d'autant plus indispensable que la mission se révèle intéressante et gratifiante pour celui qui s'y investit. Si les chiffres donnent une idée précise du profil des volontaires, rien ne transparaît sur l'intérêt des missions proposées. Le laps de temps entre les premiers contrats et aujourd'hui est un peu court pour savoir si les jeunes volontaires ont bien été au cours de leurs missions le "vecteur de lien social" promis par l'Agence du service civique. Mais à l'issue de "cette année pleine", une étude qualitative des "tâches de communication, d'information, de sensibilisation, de médiation, d'accompagnement" confiées dans le cadre du service civique serait la bienvenue. Car si le dessein du service civique est de faire émerger "une jeunesse qui s'engage, une génération solidaire" tel que souhaité par le président de la République, il reste à prouver que l'engagement de cette jeunesse n'est pas vain.

Sandrine Toussaint

L'AVE appelle l'agence du service civique à mieux prendre en compte la diversité associative
La majorité des agréments (les agréments délivrés spécifient le nombre
de volontaires que chaque structure peut accueillir) vont aux associations (87 sur 103 organismes agréés en Ile-de-France, 84% des 1.000 agréments délivrés au niveau national) puis, loin  derrière, aux collectivités (16 en Ile-de-France, 7% au niveau national). L'Agence pour le volontariat et la valorisation de l'engagement (AVE) rappelle dans un communiqué du 11 mars que 13% des 1.000 agréments ont été délivrés, au niveau national, à des réseaux associatifs nationaux. Or, l'AVE regrette qu'une minorité de grandes structures nationales monopolisent la plupart des missions au détriment d'une multitude de petites structures et réclame une meilleure diversité associative en accompagnant ces petites structures dans leur demande d'agréement. L'AVE reconnaît dans sa note n°2 de mars 2011 (en lien ci-contre) que "la mise en place du nouveau statut étant récente et complexe", il sera "indispensable de le tester sur le terrain en suivant les objectifs initialement fixés pour en corriger les erreurs". Et l'agence de préconiser des audits réguliers  et publics afin d'établir un bilan précis.

S.T.