Suppression de la CVAE : quelle clé de répartition en 2023 de la part variable de la compensation ?

Un décret paru le 14 mai au Journal officiel précise les modalités de répartition en 2023 du Fonds national d'attractivité économique des territoires destiné au bloc communal. Le dispositif créé par la loi de finances pour 2023 doit permettre de répartir une partie croissante de la compensation de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) en tenant compte du "dynamisme" des territoires.

Les départements et le bloc communal perçoivent depuis cette année des recettes dynamiques de TVA, en compensation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), laquelle est supprimée en deux ans. Pour les communes et les intercommunalités à fiscalité propre auxquelles elle est affectée, la fraction de TVA est divisée en deux parts : la première est figée et correspond à la moyenne de leurs recettes de CVAE entre 2020 et 2023, tandis que la seconde, liée à la dynamique de la TVA nationale (si elle est positive), est affectée à un fonds national d’attractivité économique des territoires (FNAET). Le but est de verser cette part de la TVA en tenant compte de la réalité économique des territoires.

Les modalités de répartition du fonds en 2023 ne sont pas nouvelles. Un décret paru ce 14 mai prévoit qu'elles reposent sur l'utilisation des critères de répartition employés pour l'imposition à la CVAE de la majorité des entreprises. La valeur ajoutée était imposée dans chacune des communes dans lesquelles ces entreprises avaient un établissement et elle était ensuite répartie "au prorata, pour le tiers, des valeurs locatives des immobilisations imposées à la cotisation foncière des entreprises et, pour les deux tiers, de l'effectif (…) employé".

Un fonds de 608 millions d'euros en 2023

Selon les informations que les ministères ont transmises au comité des finances locales (CFL), le FNAET s'élève à 608 millions d'euros en 2023. Il complète une part figée de TVA, calculée pour l'essentiel à partir de la moyenne du produit de la CVAE perçu en 2020, 2021 et 2022 et du produit qui aurait été perçu en 2023 en l'absence de réforme. Le montant de cette "compensation socle" atteint un peu plus de 10 milliards d'euros – dont 5,195 milliards d’euros pour les seuls groupements à fiscalité propre. En guise de compensation pour 2023, l'Etat ajoute 500 millions d'euros, qui sont fléchés vers le fonds vert créé par la loi de finances pour 2023, ainsi que 150 millions d'euros en faveur des services départementaux d'incendie et de secours (Sdis). Au total, l'Etat verse au profit du bloc communal et des départements un montant de 11,265 milliards d'euros cette année, en compensation de la suppression de la CVAE. Pour le gouvernement, les collectivités sont ainsi compensées "à l'euro près".

Mais pour les élus locaux, certains des moyens utilisés pour compenser la CVAE posent question (voir notre article du 22 mars). En particulier, ces élus n'ont aucune garantie concernant la pérennité des fonds dédiés au fonds vert et aux Sdis. Cette incertitude a conduit les élus membres du CFL à voter en mars dernier contre le projet de décret prévoyant la clé de répartition du fonds d'attractivité en 2023 – lequel a, donc, été publié ce 14 mai. L'avenir du FNAET est lui-même encore assez flou. Le dispositif progressera au rythme de la croissance de la TVA. Mais, pour 2024, "se pose une question : quel est le montant de départ (de ce fonds) ?", pointe Claire Delpech, responsable du pôle Finances et fiscalité à Intercommunalités de France.

"Inciter à l’implantation d’activités économiques"

Installée en début d'année par le ministre délégué aux Comptes publics, la mission conjointe à l’inspection générale des finances et à l’inspection générale de l’administration doit préciser les options possibles sur le sujet. Elle doit aussi faire des préconisations sur les critères qui présideront, à partir de 2024, à la répartition du fonds d'attractivité, car ceux-ci ne seront pas nécessairement ceux utilisés en 2023. Quoi qu'il en soit, ces critères "devront inciter à l’implantation d’activités économiques", affirmait Elisabeth Borne, la Première ministre, lors de la présentation de sa feuille de route, fin avril. Elle précisait qu'ils seraient "concertés avec les associations d’élus et arrêtés en amont du prochain projet de loi de finances".

On notera que le décret de ce 14 mai paraît avec un certain retard. Ainsi, il officialise le mode d'emploi du FNAET en 2023, alors même que Bercy a déjà notifié aux collectivités et groupements à fiscalité propre les montants de TVA qui leur sont affectés en 2023. L'exercice de notification des montants de recettes a été lui-même tardif. Ce qui n'a pas été sans conséquences. Certaines intercommunalités ont choisi de voter cette année des hausses de leur taux de foncier bâti ou de cotisation foncière des entreprises (CFE), dans l'optique de financer leurs projets d'investissement. Mais, un peu plus tard, elles se seraient parfois rendu compte, à la lecture des données communiquées par les services de l'Etat concernant les recettes de TVA, qu'elles auraient pu se passer de telles décisions, que l'on sait impopulaires. Ces incertitudes sur les recettes fiscales locales créent un climat marqué par "le manque de confiance et l'instabilité", qui "n'est pas propice à l'investissement", déplore-t-on à Intercommunalités de France.

Référence : décret n° 2023-364 du 13 mai 2023 pris en application de l'article 55 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.
 

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