Enseignement supérieur - Suppression des bourses au mérite : le Conseil d'Etat n'est pas d'accord
La suppression progressive de la bourse au mérite, annoncée en 2013 puis officialisée en juillet dernier par une circulaire du ministère de l'Education nationale, aura-t-elle lieu ? Le 17 octobre dernier, le Conseil d'Etat a suspendu provisoirement la décision gouvernementale en attendant de statuer sur sa légalité (*). La Haute Juridiction a considéré que l'aide au mérite "aurait représenté une part substantielle des ressources des requérants", que, du fait de la date de publication de la circulaire (le 2 juillet 2014), "les requérants n'ont pu trouver d'autres moyens de financement de leurs études" (un des requérants, bachelier mention très bien en classe préparatoire au lycée Henri IV, expliquait ainsi qu'il avait appris la fin des aides au mérite trop tardivement pour dénicher un job d'été pour équilibrer son budget, ce qui le contraignait à arbitrer entre l'achat de livres ou de son dîner).
Bourse contre moindre financement au CRDP
"Cette décision rétablit, à titre provisoire, le régime précédent d'aides au mérite", a pris acte le ministère de l'Education nationale et de l'Enseignement supérieur, le jour-même, dans un communiqué laconique. "Les conséquences à tirer de cette décision pour les étudiants seront annoncées dans les plus brefs délais", a-t-il ajouté sans plus de précisions.
En jeu, une aide complémentaire aux bourses sur critères sociaux qui s'élève à 1.800 euros par an, attribuée à des bacheliers mention très bien, renouvelable pendant deux ans, ainsi que des aides accordées aux meilleurs étudiants de master. Environ 7.000 nouveaux bacheliers étaient concernés chaque année.
Plusieurs collectivités avaient promis qu'elles compenseraient la suppression de la bourse au mérite. Eric Ciotti, président (UMP) du conseil général des Alpes-Maritimes, l'avait annoncé dès le 8 septembre. Il avait également annoncé qu'en contrepartie, le conseil général réduirait sa contribution au centre régional de documentation pédagogique (CRDP), établissement de l'Education nationale (voir notre article ci-contre).
Bourse contre bénévolat à Issy-les-Moulineaux
La ville de Vesoul avait également voté, le 29 septembre, la mise en place d'une "bourse au mérite municipale". Alain Chrétien, son député-maire (UMP) avait alors déclaré : "La méritocratie républicaine et la reconnaissance par l'excellence sont des valeurs fortes auxquelles je suis très attaché."
Le 1er octobre, la ville d'Issy-les-Moulineaux avait quant à elle annoncé un dispositif municipal de bourses au mérite d'un genre particulier. Il s'agissait d'une aide complémentaire (1.800 euros, pendant 3 ans) à celle de l'Etat, versée par le centre communal d'action sociale (CCAS) aux bacheliers boursiers d'Etat sur critères sociaux et ayant obtenu la mention très bien, en contre-partie d'une action de bénévolat à définir avec le CCAS, "comme, par exemple, l'accompagnement d'une personne handicapée ou âgée, la participation à la collecte alimentaire, etc."
Valérie Liquet avec ToutEduc et AFP
(*) Le Conseil d'Etat doit maintenant déterminer si la circulaire du 2 juillet 2014 méconnaît ou pas le décret de 2008, modifié en 2013, selon lequel "les bourses d'enseignement supérieur sur critères sociaux et les aides au mérite sont attribuées aux étudiants par le recteur d'académie".