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Prévention - Timide percée de la gestion des risques

Les collectivités sont mal préparées face à la diversification des risques, selon une étude menée par l'association européenne Primo. La profession de "risk manager" demeure peu répandue en France.

Violences urbaines, réchauffement climatique, grippe aviaire, délocalisations... évaluer et prévenir les risques auxquels une collectivité peut être confrontée n'est pas un exercice évident. L'idée même de risque recouvre des notions très différentes d'une commune à l'autre. Sans surprise, les risques naturels figurent en tête des préoccupations des collectivités locales pour 60% d'entre elles, selon les résultats provisoires d'un sondage mené par l'association européenne Primo (Public Risk Management Organisation) auprès de 180 directeurs généraux des services de collectivités françaises. Mais de plus en plus de risques "émergents" s'imposent au regard des cadres territoriaux : risques juridiques, risques professionnels et malveillance arrivent directement après. "Sur le terrain, les élus et les cadres territoriaux ont le sentiment d'être de plus en plus souvent mis en cause et cherchent à se protéger", analyse Isabelle Fayolle, chargée du développement chez Primo.

Empilement de réglementations

Plus exposées aux risques, les collectivités restent mal armées pour y faire face. 42% d'entre elles ne disposent pas de cartographie de leurs risques et 60% des collectivités n'ont jamais réalisé d'exercice de simulation de crise. L'étude montre même un certain retard par rapport à d'autres pays européens comme l'Angleterre, le Danemark ou les Pays-Bas. Si des progrès ont été accomplis, "ils sont davantage le reflet de la pression réglementaire que le fait d'une réelle prise de conscience", estime Isabelle Fayolle. Ainsi, la loi de réforme de la sécurité civile du 13 août 2004 exige la création de plan communaux de sauvegarde (PCS) pour cartographier et gérer leurs risques. Un décret de novembre 2001 a modifié le Code du travail sur les risques professionnels et a imposé un document unique aux collectivités locales : l'ERP (évaluation des risques professionnels). Cette inflation normative ne faiblit pas avec, dernière nouveauté, les Papi (programmes de prévention des risques liés aux inondations) visant à développer la culture du risque à l'échelle des bassins. Pourtant, seulement la moitié des communes interrogées ont entrepris des actions comme les CLS (contrats locaux de sécurité), l'ERP ou le PCS. Pour Isabelle Fayolle, "cet empilement de réglementations apporte plus de complexité dans les petites et moyennes villes qui disposent de moins d'agents pour assurer une véritable veille sur ces sujets". Et chaque direction gère dans son coin le risque dont elle a la charge : "La plupart des collectivités réagissent en fonction des nouvelles réglementations mais ne sont pas dans une démarche proactive ou globale du risque", souligne-t-elle.


Des "risk managers"

L'association créée en 2005 et structurée au niveau européen milite pour la création de postes de "risk managers", une profession qui a encore du mal à se développer en France. Sur l'ensemble des collectivités interrogées, 41% reconnaissent n'avoir aucun collaborateur affecté à la gestion des risques. Pour celles qui ont fait ce choix, les efforts portent essentiellement sur les risques professionnels et naturels qui sont pris en charge à 70%. Dans 62% des cas, la direction générale des services apparaît comme le chef de file de la gestion des risques, suivie de la direction des services techniques et de la direction prévention sécurité. Certaines collectivités montrent toutefois l'exemple à l'image de la communauté urbaine de Dunkerque (CUD) qui s'est dotée d'une véritable mission "prévention et gestion des risques". Les cadres interrogés manifestent également un réel besoin d'information. Dans cet esprit, Primo, qui propose des formations, a posé les jalons d'une "charte de la gestion des risques en secteur public local". "On se rend compte que les divers professionnels du risque n'ont pas le même langage, explique Isabelle Fayolle. Le but de cette charte est de développer un référentiel commun."
La totalité des résultats de cette étude sera publiée en mars prochain.

Michel Tendil

 


Primo, l'association européenne des "risk managers"

Primo (Public Risk Management Organisation) a été créée en avril 2005 par l'Udite (Union des dirigeants territoriaux européens) dans le but d'aider les décideurs territoriaux européens dans le domaine de la gestion du risque. Elle est présente en France depuis décembre 2005 avec le soutien du Syndicat national des directeurs généraux des collectivités territoriales. L'association compte près de 200 adhérents, collectivités territoriales et directeurs généraux des services. Elle a rédigé une charte de la gestion des risques en secteur public local et organise conférences et formations sur le sujet. Primo tiendra un congrès européen à l'automne à Bruxelles.

 

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