Toulon : suivez le guide

Conçu avec la participation de tous les services, le guide de l'achat public élaboré par la ville de Toulon à l'usage de ses agents est devenu une référence. Destiné à sécuriser les procédures d'achat, il édicte des règles internes plus rigoureuses que ne l'exige le Code des marchés publics.

Tout est parti de l'entrée en vigueur du nouveau Code des marchés publics. L'occasion pour la ville de Toulon de revoir l'organisation de ses achats et de rationaliser la commande publique. "L'application de la nouvelle nomenclature et le relèvement des seuils des marchés sans formalités préalables nous ont décidés à adopter des normes internes pour sécuriser l'achat public et le rendre plus efficace", explique Jean-Marie Reynaud, directeur de la coordination de la gestion. Mais pas question d'imposer de nouvelles méthodes d'en haut. D'où l'idée de concevoir, avec la participation de tous les services, un guide interne de l'achat public qui serve de référentiel commun. Aussitôt, un groupe de travail est créé. Composé du comptable public, de représentants des services opérationnels, des services marchés, financier et achat, il planche pendant trois mois sur le guide. Rappel des principales notions, répartition des responsabilités, détail des procédures : tout est rigoureusement cadré afin d'assurer une sécurité juridique maximale. Notamment pour les marchés non formalisés : en dessous du seuil de 45.000 euros, les services doivent procéder à une consultation, une mise en concurrence et une analyse des offres ; entre 45.000 et 90.000 euros, ils doivent recourir à la publicité et faire valider l'analyse des offres par l'adjoint délégué. Dans tous les cas, les services sont tenus de constituer un dossier de consultation pour assurer transparence et traçabilité des achats.

Un observatoire de la commande publique

Dans le même temps, une nouvelle organisation est mise sur pied. Les responsabilités sont redéfinies en fonction des marchés, classés en trois catégories : les marchés transversaux qui concernent tous les services (fournitures administratives, produits d'entretien, habillement professionnel) relèvent du service achat ; ceux qui ne touchent que quelques services (denrées alimentaires, produits chimiques) sont du ressort du service désigné chef de file, en général le plus gros consommateur ; enfin, les marchés spécifiques à un seul service (produits de voirie) sont élaborés par le service concerné. Dans les gros services comme le bâtiment ou les espaces verts, la ville a formé des instructeurs, chargés de rédiger les marchés, et a implanté à leur intention un logiciel d'assistance. Le service du contrôle de gestion s'est, lui, doté d'un système de reporting, accessible à tous les services. Il les informe des marchés en cours, des montants concernés et des titulaires pour que chacun sache quelle procédure utiliser avant de passer commande. Les services opérationnels ont ainsi vocation à devenir autonomes, le service des marchés se consacrant essentiellement au contrôle des procédures. Un observatoire de la commande publique a, par ailleurs, été créée au sein de la direction de la coordination de la gestion. "Tous les mois, nous auscultons les dépenses et contrôlons les dépassements de seuils pour inciter les services à programmer leurs achats", ajoute Jean-Marie Reynaud.

Une démarche qui fait école

La formalisation et l'homogénéisation de toutes les procédures d'achat a évidemment eu un impact financier, difficile pour le moment à quantifier. Le recensement des besoins à l'échelle de toute la collectivité et non plus service par service comme c'était le cas avant, le regroupement des consultations, la réduction du nombre de fournisseurs et la programmation des achats ont, en tout cas, permis de diminuer les coûts de procédure et de tirer les prix dans les secteurs les plus concurrentiels. "Généralement, on peut attendre de ce genre de mesures une économie de l'ordre de 10 à 15 %", estime Jean-Marie Reynaud. Présenté en février dernier au conseil municipal qui l'a approuvé par délibération, le guide de l'achat public n'a pas tardé à devenir une référence pour d'autres collectivités locales. Pas moins d'une centaine l'ont à ce jour réclamé à la ville pour s'inspirer de son initiative. Mais le guide toulonnais n'est que la première étape d'un chantier plus ambitieux encore. La municipalité projette, en effet, d'étendre sa démarche aux autres collectivités partenaires, en accord avec elles. Il s'agirait pour la ville de Toulon, le conseil général, la communauté d'agglomération Toulon Provence Méditerranée et l'office public d'HLM Toulon Habitat Méditerranée d'adopter des procédures et des seuils de marchés identiques. La réflexion est en cours et devrait aboutir avant la fin de l'année. Sitôt que la prochaine réforme du nouveau code des marchés publics sera connue.

Laurence Faivre d'Arcier / Décision locale pour Localtis

Plaidoyer pour la transparence

Enseignant le droit public à la faculté de droit de Toulon, Robert Cavanna, adjoint aux marchés publics et aux affaires juridiques, est par sa profession et sa fonction très sensible aux risques juridiques. Il explique la ligne de conduite qu'a adoptée la municipalité en matière de marchés publics.

Qu'est-ce qui a motivé l'élaboration de règles internes d'achat aussi strictes et balisées ?

Un souci de transparence et de sécurisation des procédures comme des élus eux-mêmes. Car l'application du nouveau Code des marchés publics et de nouveaux seuils ne concernait pas le seul service des marchés. Il a fallu sensibiliser l'ensemble des services consommateurs aux conséquences juridiques du nouveau code. Les règles que nous avons édictées dans le guide les oblige à identifier et à évaluer leurs besoins de manière transversale pour passer des marchés avec les procédures adéquates.

La ville veut adopter des règles communes de passation des marchés publics avec le département, la communauté d'agglo et l'OPHLM. De quoi s'agit-il ?

Ce projet d'harmonisation des procédures concerne essentiellement les marchés sans formalités préalables. Nous voulons proposer aux entreprises candidates aux différents marchés de toutes ces collectivités une procédure identique, aussi bien dans les annonces que dans les seuils et les pièces à fournir. L'objectif, encore une fois, est de rendre l'attribution de ces marchés la plus collégiale et la plus transparente possible, en se rapprochant de la procédure d'appel d'offres.

La prochaine réforme du Code des marchés publics devrait relever encore les seuils. Est-ce compatible avec la sécurité juridique que vous défendez ?

Le relèvement des seuils ne me dérange pas puisque nous avons la liberté de les baisser en interne. Concernant les marchés sans formalités préalables, notre règlement intérieur garantit la même transparence que dans une commission d'appel d'offres. Reste qu'il faut être prudent, car à trop relever les seuils, on prend le risque de rendre l'attribution des marchés de plus en plus opaque et, partant, de détériorer l'image des élus. Il faut, certes, accorder de la souplesse mais rester modéré.

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