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Urbanisme commercial - Tour d'Europe des mesures de soutien au commerce de proximité

Dans le cadre de la Présidence française du Conseil de l'Union européenne, le ministère de l'Economie organisait les 23 et 24 octobre 2008 une conférence sur le "commerce de détail, acteur de l'aménagement équilibré du territoire et du développement durable". De quoi éclairer sur les choix des partenaires européens, à l'heure où la France vient de décider, dans la loi de modernisation de l'économie votée en juin dernier, de porter de 300 à 1.000 m2 le seuil à partir duquel toute implantation requiert une autorisation.

Dans le cas des autres Etats-membres, les politiques publiques sont très variées. La Grèce, par la voix de son secrétaire général au commerce, a ainsi présenté la politique très stricte qu'elle a mise en place en matière d'implantation de commerces pour protéger davantage le commerce traditionnel et les PME. Les conditions d'implantation concernent l'ensemble des commerces et pas seulement les hypermarchés. Elles portent sur tous les locaux annexes des magasins en plus des magasins eux-mêmes. Cette politique prévoit des amendes pour ceux qui ne respecteraient pas la loi, allant jusqu'à 50.000 euros et l'interruption d'activité, dans le cas d'infractions réitérées. Autre exemple de régulation de la grande distribution : l'Allemagne. Face à la multiplication des grandes surfaces, le pays cherche à protéger le commerce de détail. "Il y aura 46% de plus de grandes surfaces en dix ans, a ainsi souligné Milena Weidenfeller, conseillère à la Direction du commerce, parallèlement le commerce de détail enregistre un fort taux de chômage et un chiffre d'affaires très mauvais." D'où l'idée de considérer le commerce de centre-ville comme un bien public, non soumis aux règles du marché. Les autorités publiques se réservent ainsi le droit de refuser l'implantation de certains commerces, même si la décision n'est pas populaire.

Une politique libérale associée à un plan de soutien

L'Allemagne soutient aussi vigoureusement le commerce de proximité grâce à la mise en place de quatre instruments : les associations intercommunales, qui correspondent à des contrats conclus entre les communes pour promouvoir le petit commerce, les études d'impact, le "city manager", et de nouvelles lois promues dans certains länder concernant l'installation des commerces. L'exemple de l'Espagne, avec la communauté autonome de Madrid, a quant à lui mis en évidence les atouts d'une libéralisation très forte dans le domaine du commerce. Par une loi de juin 2008, le pays a décidé de supprimer les autorisations, dans le cas d'implantation, pour des surfaces inférieures à 2.500 mètres carrés, bien loin de nos 300 mètres carrés... Mais cette politique hispanique très libérale pour la grande distribution est associée à un important plan de soutien du commerce traditionnel dans la communauté autonome de Madrid. Un plan qui prévoyait 70 millions d'euros pour favoriser la modernisation du commerce de proximité et qui, fort de son succès, a été reconduit en 2008, avec 36 millions d'euros de budget. Autre mesure : libérer les horaires d'ouverture et autoriser l'ouverture des magasins le dimanche et les jours fériés. Mise en oeuvre en février 2008, elle a déjà permis de créer 650 emplois dans la province.

Les atouts du marketing municipal

L'Autriche, qui a également mis en place une politique très libérale en matière d'implantation commerciale, a mis en avant les atouts du marketing municipal et du management urbain. Si les chambres de commerce et d'industrie ont joué le rôle d'instigateur de ce management du commerce de ville pendant plusieurs années, en 2000, un organisme de marketing urbain, "Stadtmarketing Austria", a été créé pour assurer ce rôle. S'appuyant sur cet organisme, 8.500 entreprises et 115 organisations de rues commerçantes assurent l'équilibre entre commerces de ville et grandes surfaces. A Vienne, 72 managers de centre-ville ont été mis en place. Ils disposent de 3,5 millions de budget pour Vienne.

Du côté de la France, la conférence européenne sur le commerce de détail a été l'occasion de présenter une démarche originale, visant à venir au secours du commerce de proximité dans les quartiers sensibles. L'instrument utilisé, intitulé Epareca, a été créé en 1996. Il permet d'accompagner les collectivités locales dans la restauration des centres commerciaux dégradés. Doté d'un budget de près de 10 millions d'euros, issus du Fisac (Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce), l'Epareca prend le relais des gérants du commerce défaillant. Les équipes pluridisciplinaires de l'Epareca remettent à niveau le commerce avant de le revendre. "Les centres commerciaux retournent dans la sphère privée quand ils ont retrouvé leur rentabilité", a ainsi expliqué Jean-Christophe Martin, directeur de la DCASPL (Direction du commerce, de l'artisanat, des services et des professions libérales). Une procédure efficace mais qui a ses propres limites. L'Epareca ne peut intervenir que dans une des 751 zones urbaines en difficulté recensées en France et elle n'intervient qu'à la demande d'une collectivité locale.

Emilie Zapalski

Quelles politiques des Etats-membres en matière de commerce de détail ?

A l'occasion de la conférence sur le commerce de détail, le ministère de l'Economie a réalisé une enquête auprès des Etats-membres pour connaître leurs politiques de développement en matière de commerce de détail. Après avoir passé en revue les structures qui prennent en charge la problématique, le poids et les composantes du commerce de détail dans les pays européens, l'étude fait ressortir les enjeux auxquels ce type de commerce doit aujourd'hui faire face. Parmi ceux-ci, le maintien de l'équilibre commercial, entre petits et grands acteurs du commerce, entre le centre urbain et la périphérie, et entre les villes et les zones rurales, vient en tête pour dix pays, dont la France, l'Espagne et l'Allemagne. Autre enjeu important pour les pays européens : assurer une meilleure prise en compte des consommateurs, cité par douze pays, avec notamment de nouvelles attentes en matière de diversité et de qualité des produits, et un défi d'adaptation aux nouvelles pratiques, comme le commerce électronique. Le "challenge du développement durable" est aussi cité par neuf pays comme enjeu prioritaire, le commerce étant de plus en plus confronté à l'exigence de modèles de production et de consommation durables. Enfin, les rapports entre distributeurs et consommateurs sont également désignés comme enjeu important pour le commerce de détail par trois pays (Allemagne, Finlande et Roumanie). L'Allemagne évoque ainsi l'attention portée par la commission des monopoles au bon fonctionnement de la concurrence. L'étude s'intéresse aussi aux "nouvelles réponses apportées par l'activité commerciale de détail". Parmi lesquelles : l'apparition et le développement du management de centre-ville, la modernisation du commerce et l'amélioration du service au consommateur ou encore la réglementation concernant le développement durable.

E.Z.

 

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