Culture - "Tous photographes" : une charte sur la prise de photos dans les musées
Depuis plusieurs années, la question de l'autorisation ou non de photographier dans les musées - encore amplifiée par le boom des téléphones portables - donne lieu à des polémiques récurrentes (voir nos articles ci-contre). Les conservateurs craignent - ou feignent de craindre - pour la préservation de certaines œuvres, les amateurs d'art s'irritent de la propension de certains visiteurs à photographier plutôt qu'à regarder et chacun tombe d'accord pour soupçonner les musées de chercher à interdire la photo pour mieux défendre leurs droits patrimoniaux sur leurs éditions... Pour corser le tout, chaque musée applique ses propres règles, sans que semble se dégager une doctrine claire et cohérente.
Tous les musées sont concernés
Pour sortir de cet imbroglio, le ministère de la Culture a décidé de prendre le dossier à bras-le-corps... mais avec prudence. Plutôt que d'édicter une norme commune - au demeurant difficile à imaginer compte tenu de l'extrême diversité des musées -, il a choisi de proposer une sorte de "code de bonne conduite". Celui-ci s'adresse à la fois aux visiteurs des musées ou sites patrimoniaux et aux responsables de ces établissements.
Baptisée "Tous photographes" - un titre un peu sibyllin par rapport à son objet -, cette charte s'adresse aux musées nationaux relevant du ministère de la Culture, mais elle "est susceptible d'inspirer d'autres ministères, les collectivités territoriales et l'ensemble du réseau des structures culturelles du domaine patrimonial".
Cinq engagements réciproques
En pratique, il s'agit d'une affiche à apposer dans tous les lieux concernés et qui prévoit cinq "engagements réciproques" (le terme "concessions réciproques" aurait été plus juste). L'article premier indique ainsi que "dès son arrivée, le visiteur désactive son flash et fait en sorte de ne pas gêner les autres visiteurs lorsqu'il photographie". Deuxième article : "Lorsqu'il photographie ou filme, le visiteur veille à ne pas porter atteinte à l'intégrité de l'œuvre". Les conséquences pratiques de cette formulation aussi floue qu'évidente devront être précisées par le règlement intérieur de chaque établissement. La formulation reconnaît toutefois, de fait, aux musées, le droit d'interdire de photographier certaines œuvres.
L'article 3 de la charte aborde la question des droits, en précisant que "le visiteur peut partager et diffuser ses photos et ses vidéos, spécialement sur internet et les réseaux sociaux, dans le cadre de la législation en vigueur".
Des dispositions pour les gardienophiles et les experts en photo
L'article 4 s'adresse aux visiteurs - s'ils existent - qui préfèrent photographier les gardiens plutôt que les œuvres. Il précise en effet que "le visiteur évite de prendre une photographie d'un membre du personnel de l'établissement en tant que sujet principal identifiable, sans son autorisation formelle".
Enfin, le dernier article prévoit que "pour une prise de vue nécessitant un matériel supplémentaire, le visiteur doit faire une demande d’autorisation spécifique".
Une mise à disposition de photos sur les sites des musées
Pour respecter le côté réciproque de la charte, les établissements prennent eux aussi un certain nombre d'engagements, portant essentiellement sur la bonne information des visiteurs. Un engagement, qui constitue la contrepartie de l'article 3 évoqué plus haut, mérite toutefois d'être signalé. Il prévoit en effet que "l'établissement met à disposition gratuitement sur son site internet des reproductions numériques de ses collections, avec mention claire des conditions d'utilisation [...]".
Reste maintenant à connaître l'ampleur de la diffusion de cette charte et ses effets pratiques sur les visiteurs et les établissements.