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Transport ferroviaire : en 2020, les TER ont mieux résisté à la crise sanitaire que les grandes lignes

Selon le bilan ferroviaire 2020 de l'Autorité de régulation des transports (ART), la pandémie de Covid-19 a fait sans surprise baisser la part du transport ferroviaire par rapport à la route. Mais les TER ont été moins affectés que les autres services de transport ferroviaire de voyageurs.

Après une première synthèse dévoilée fin décembre 2021, l'Autorité de régulation des transports (ART) a publié ce 2 février son bilan ferroviaire 2020 au complet. En raison de la crise sanitaire, l'utilisation du réseau ferré national (RFN) a baissé de 25% en 2020 par rapport à son dernier niveau haut, en 2017, avant les années 2018 et 2019 affectées par des grèves importantes. Et "le trafic apparaît plus concentré sur les parties les plus utilisées du réseau", note l'ART. Sur 23% des lignes du réseau ne passent que 1% des circulations, et avec moins de 10 trains par jour. Plus généralement, les petites lignes ont vu passer 9% des trains français. A contrario, 80% des circulations ont été concentrées sur 39% des lignes. Si le réseau est resté plutôt stable, les voies ont rajeuni de trois mois grâce aux travaux de régénération et à quelques fermetures, à 28,9 ans en moyenne, mais l'état moyen des lignes à grande vitesse s'est légèrement dégradé. En dehors de la grande vitesse, 21% des voies sont considérées comme "hors d'âge".
Sans surprise, la pandémie de Covid-19 a fait baisser la part du ferroviaire par rapport à la route en 2020, davantage encore pour les passagers que pour les marchandises. La part modale du transport ferroviaire de voyageurs a ainsi baissé de 2,5 points en 2020, à 7,6%. La fréquentation a chuté de 42% en moyenne, deux fois plus que l'offre ferroviaire (-21%), avec des trains beaucoup moins remplis. Le recul du trafic a été moindre pour le fret ferroviaire (- 6%), avec une part modale de 9,7% (-0,2 point).

Fréquentation des TER en baisse de 36%

La fréquentation des services TER a baissé de 36% en moyenne par région tandis que les offres ferroviaires régionales ont baissé de façon" relativement modérée" en 2020 (-17 % en moyenne pour les trains.km et -15 % pour les sièges.km), relève l'ART. Pour les régions Auvergne-Rhône-Alpes, Occitanie, Hauts-de-France et Pays de la Loire, l’offre en trains.km se situe à plus de 85% de l’offre de 2019. "Comme pour l’ensemble des services ferroviaires, la fréquentation TER s’est plus fortement dégradée que l’offre", souligne le bilan. Les régions les moins impactées - Bretagne, Pays de la Loire et Occitanie - enregistrent une baisse de l’ordre de 30% de leur fréquentation, tandis que cette évolution dépasse 40% pour les régions Normandie et Provence-Alpes-Côte d'Azur. En conséquence, le taux d’occupation des services TER recule pour l’ensemble des régions (excepté en région Normandie où le transfert des lignes Intercités a été achevé en 2020).
Entre 18 et 29% des circulations TER ont été déprogrammées par les régions en 2020 du fait de la crise sanitaire. En moyenne, près de 25% des circulations TER qui ont été déprogrammées l'ont été avant J-1 16h (contre 8% en 2019). Comme en 2018 et 2019, ce taux est cependant variable d’une région à une autre : le plus faible taux de réajustements du plan de transport régional est observé dans la région Grand-Est (18% de déprogrammations), contre près de 29% en Occitanie. Le taux de circulations annulées à la dernière minute a, lui, diminué dans la plupart des régions hormis le Centre-Val de Loire et les Hauts-de-France où il s’élève ainsi en moyenne à 1,1% en 2020 (-0,3 point par rapport à 2019).

Ponctualité en progression dans la plupart des régions

La ponctualité est en progression dans la plupart des régions, hormis en Normandie, Bretagne et Nouvelle-Aquitaine. "Cette amélioration est sans doute à mettre au regard d’un degré d’utilisation plus faible des réseaux ferrés et d’une baisse induite des contraintes et incidents de circulation sur le réseau ferré national, note l'ART. La dégradation plus importante de la ponctualité en Normandie est à la fois le fait de perturbations liées aux mouvements sociaux de début 2020 et à des travaux divers, mais aussi de la reprise de l’offre Intercités par la région, caractérisée par un taux de régularité inférieur à celui des lignes courtes distances." L’amélioration de la ponctualité apparaît plus marquée dans les régions Provence-Alpes-Côte d’Azur, Occitanie et Auvergne-Rhône-Alpes, caractérisées par une baisse continue du taux de retard des services TER depuis 2018.

Baisse limitée des revenus de l'activité TER grâce aux concours publics

Les revenus de l’activité TER connaissent, eux, une baisse limitée pour l’ensemble des régions du fait d’une augmentation marquée des concours publics. "Si les recettes commerciales sont en net recul en 2020, du fait de la baisse de la fréquentation des services TER (de -25% à -42% par région), la hausse des concours publics a permis de contenir la chute des revenus de l'activité TER en deçà de 10% pour l'ensemble des régions, indique l'ART. L'intégration des lignes Intercités normandes dans l'offre régionale induit par ailleurs une forte progression des revenus de l'activité TER de la région Normandie en 2020 (+95%)". À l’exception de la Normandie, les revenus des conventions TER baissent beaucoup moins (de -1% à -6%) que l’offre réalisée en trains.km (de -11 % à -23 %), permettant une "atténuation" des effets de la crise pour l’opérateur, constate l'ART. La part des concours publics dans les revenus a, elle, augmenté en 2020 de 6 à 15 points pour toutes les régions, excepté la Normandie. 8 régions sur 11 se retrouvent ainsi avec une part de contribution publique supérieure à 80% de leurs revenus d’activité ferroviaire régionale.

Des charges d'exploitation qui ne diminuent pas

Malgré la baisse du trafic, le montant des charges d'exploitation des services TER reste stable en 2020. Mais "rapportées par train.km, les charges d’exploitation augmentent de 13%, soit l’évolution moyenne observée sur les postes de charges d’exploitation hors péages et redevances", note le bilan. Le montant global des péages d'infrastructure et redevances en gare recule de seulement 3% en 2020, ce qui représente une hausse de 12% par train.km. Le montant des redevances gare par train.km progresse davantage (+23 %) que les péages d'infrastructure (+8 %) du fait du transfert de la redevance quai en 2020. Quant au montant des redevances d'accès établi sur le trafic prévisionnel, il est en nette progression dans l'ensemble des régions.
"Dans l’ensemble, les charges au train.km augmentent fortement indiquant la faible sensibilité de ces dernières aux trains.km réellement effectués", commente l'ART. Les hausses les plus importantes des coûts d’exploitation concernent les postes "Matériel roulant" (23%) et "Autres charges" (12%) qui se caractérisent par une part plus importante de coûts fixes, tandis que les postes de "Conduite", "Accompagnement" et "Distribution" rapportés par train.km sont également en croissance de 4 à 5% au cours de l’année 2020, avec des évolutions cependant beaucoup plus importantes pour certaines régions.

Hausse de la recette kilométrique par passager abonné

La recette kilométrique par passager abonné augmente pour l’ensemble des régions avec des amplitudes très variées (de moins de 1% à 44%). "Cela s’explique notamment par un usage moins fréquent des abonnements en raison du recours plus important au télétravail et donc par une baisse plus forte de la fréquentation par rapport aux recettes", note l'ART. À l’inverse, les recettes issues de la fréquentation des passagers non abonnés ont baissé en 2020, plus fortement que la fréquentation, entraînant une baisse de la recette kilométrique par passager. La forte baisse notée en Occitanie (-24%) peut s’expliquer comme dans d’autres régions par des offres promotionnelles mises en place par la région (en l'occurrence une offre estivale de trains à 1 euro). En Île-de-France, l’offre de transport a été maintenue en 2020 pour la plupart des lignes Transilien et RER. Cependant, la fréquentation est en baisse de plus de 40% pour la totalité de ces lignes. Le recul de l’offre ferroviaire induit par la crise sanitaire a entraîné pour l’activité Transilien une hausse globale des coûts d’exploitation par train.km de 10%.

Ouverture à la concurrence : cinq régions engagées

Le bilan dresse aussi un état des lieux de l'ouverture à la concurrence des services ferroviaires conventionnés. Depuis la fin 2019 (et avant l’échéance du 23 décembre 2023 où une mise en concurrence sera nécessaire à l’issue des conventions en cours), les régions peuvent en effet recourir à une attribution directe de contrats ou à une attribution au terme d’une mise en concurrence d’opérateurs candidats. Au premier semestre 2021, cinq régions se sont lancées dans une procédure d’ouverture à la concurrence des services ferroviaires conventionnés. La région Provence-Alpes-Côte d'Azur a lancé, en 2020, une procédure d’attribution après mise en concurrence d’opérateurs pour l’ouverture de deux lots, qui ont été attribués, le 28 octobre dernier. SNCF Voyageurs a remporté celui des lignes "Azur" (Les Arcs/Draguignan–Vintimille, Nice–Tende et Cannes–Grasse) et Transdev les lignes "Métropoles" (Marseille–Toulon–Nice) pour des débuts d’exploitation prévus respectivement en décembre 2024 et juillet 2025. Quatre autres régions préparent aussi le lancement de processus d’appels d’offres : Hauts-de-France (trois avis de concessions diffusés en 2020 et un avis de pré-information publié en 2021), Grand Est (deux avis de concessions et un de pré-information diffusés en 2020), Pays de la Loire (un avis de concession diffusé en 2021) et Île-de-France.