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Social - Un amendement au projet de loi sur la ville va permettre la création de l'aide aux immigrés âgés

Le 9 janvier, François Lamy, ministre délégué à la Ville, a annoncé le dépôt, dans le cadre de l'examen par le Sénat du projet de loi de programmation de la ville et de la cohésion urbaine, d'un amendement "relatif à la situation particulière des immigrés âgés, souvent appelés chibanis".
Il s'agit là de la concrétisation d'un engagement pris par Marisol Touraine lors de son audition par la mission d'information de l'Assemblée nationale sur les immigrés âgés, le 28 mai dernier (voir notre article ci-contre du 30 mai 2013). La ministre des Affaires sociales et de la Santé indiquait alors avoir "demandé à [ses] services de reprendre l'expertise sur l'aide à la réinsertion sociale et familiale" des immigrés âgés. Elle évoquait un décret qui devait intervenir "avant la fin de l'année".

Une mesure instaurée par la loi Dalo de 2007 et restée sans suite

Il se serait agi, en l'occurrence, du décret d'application de l'article 58 de la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable (Dalo). Celui-ci prévoit qu'"il est créé une aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens migrants dans leur pays d'origine. Cette aide est à la charge de l'Etat" (disposition devenue l'article L.117-3 du code de l'action sociale et des familles). Cet article détaille les conditions d'attribution de l'aide, ses modalités de versement (annuel, par l'Office français de l'immigration et de l'intégration), son statut juridique (l'aide n'est pas une prestation de sécurité sociale)... Renvoyant à un décret en Conseil d'Etat, l'article L.117-3 du Casf se contente d'indiquer que le montant de l'aide "est calculé en fonction des ressources du bénéficiaire". Problème : ce décret d'application n'a jamais été pris depuis sept ans...
Malgré l'annonce de Marisol Touraine en mai dernier, le gouvernement s'est heurté aux mêmes difficultés juridiques que ses prédécesseurs. Celles-ci tiennent au respect des principes d'égalité et de non-discrimination, mais aussi à l'application des règles communautaires en matière de coordination des régimes de sécurité sociale. La réponse passera donc d'abord par la voie législative, afin de sécuriser le futur décret.

"Une avancée essentielle"

Aussi l'amendement déposé par François Lamy - et rédigé par les services de Marisol Touraine - procède-t-il au nettoyage législatif indispensable. L'une des principales modifications pourrait d'ailleurs soulever quelques difficultés puisque, pour des raisons d'égalité, elle ouvre - en théorie - le bénéfice de l'aide "aux ressortissants étrangers" et non plus aux seuls "étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen", comme dans la rédaction actuelle.
Il faudra bien sûr attendre le décret - pas avant quelques mois - pour connaître les contours exacts et le montant de cette aide à la réinsertion sociale et familiale. Mais, dans un communiqué du 9 janvier, François Lamy indique déjà qu'"il s'agit d'une avancée essentielle pour les immigrés âgés de plus de 65 ans, dont plus de 35.000 vivent actuellement dans des foyers, certains y étant contraints en raison de l'absence de portabilité des droits sociaux, et malgré des conditions de résidence souvent inadaptées aux personnes vieillissantes".
A noter : bien que ni le communiqué du ministre de la Ville, ni l'exposé des motifs de l'amendement ne le mentionnent, le cadre législatif de cette aide a déjà fait l'objet d'un récent et discret nettoyage. L'article 26 de la loi du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 a en effet supprimé un alinéa de l'article L.117-3 du Casf, prévoyant que l'aide "n'est pas soumise à l'impôt sur le revenu". Une disposition qui n'aurait pas manqué de poser quelques problèmes à l'occasion d'une possible question prioritaire de constitutionnalité...