Accès aux soins - Un décret précise les critères d'isolement des établissements de soins
Un décret du 17 février 2015 précise les conditions d'isolement géographique d'un établissement de santé susceptibles de lui ouvrir droit à des modalités dérogatoires de financement de ses activités de soins. Prévus par le Code de la santé publique et par celui de la sécurité sociale, ces financements dérogatoires sont assurés en partie par le fonds d'intervention régional (FIR), géré par les agences régionales de santé (ARS) et chargé notamment de contribuer "à la permanence des soins et à la répartition des professionnels et des structures de santé sur le territoire" (article L.1435-8 du Code de la santé publique).
Quatre critères cumulatifs
La possibilité de ce financement dérogatoire sur la base de critères d'isolement géographique a été introduite par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 du 23 décembre 2013 (article L.162-22-8-1 du Code de la sécurité sociale). Pour attester cette condition d'isolement, le décret prévoit pas moins de quatre critères cumulatifs et passablement complexes.
Tout d'abord, l'établissement doit être situé "dans un territoire, défini comme l'ensemble des lieux à partir desquels il est possible de parvenir à l'établissement par un trajet routier en automobile d'une durée inférieure ou égale à 45 minutes [...]. La durée du trajet routier en automobile est mesurée en prenant en compte les temps de trajet aux heures pleines et aux heures creuses". Pour mémoire, le temps moyen d'accès d'un Français à un établissement de soins est de l'ordre d'une vingtaine de minutes (voir notre article ci-contre du 25 février 2011).
Seconde condition, la durée du trajet routier en automobile, mesurée dans les conditions prévues ci-dessus, entre cet établissement et l'établissement le plus proche exerçant la même activité doit être supérieure au seuil fixé pour cette activité (il s'agit en l'occurrence des activités de médecine, chirurgie et obstétrique).
Ensuite - et spécifiquement pour l'activité de soins d'obstétrique -, la part de l'activité produite par l'établissement doit excéder une fraction déterminée de l'activité d'obstétrique produite dans la zone d'attractivité.
Quatrième et dernier critère : "la densité de population de la zone d'attractivité de l'établissement, définie comme l'ensemble des communes du département ou des départements limitrophes dans lesquelles résident les patients pris en charge par l'établissement et dont les séjours représentent au moins 80% de l'activité globale produite par l'établissement, n'excède pas un niveau plafond".
Une liste des établissements concernés bientôt fixée par arrêté
Dès lors que ces critères sont remplis, l'établissement est éligible et bénéficie "d'un complément de financement en sus des tarifs nationaux de prestations". Ce financement se compose d'une part fixe, versée sous la forme de forfaits nationaux annuels par activité, et d'une part variable, versée sous la forme d'une dotation du FIR. Les forfaits nationaux annuels tiennent eux-mêmes compte de seuils d'activité, déterminés sur la base des données nationales et permettant d'équilibrer les charges et les produits afférents à l'exercice de l'activité considérée. La valeur de ces forfaits varie en fonction de l'écart entre ces seuils d'activité et l'activité produite par l'établissement.
Compte tenu de la complexité des critères d'éligibilité, il faudra attendre - pour y voir plus clair - la publication de l'arrêté des ministres chargés de la Santé et de la Sécurité sociale fixant, pour chaque région et sur proposition des directeurs généraux d'ARS, la liste des établissements éligibles à ces financements supplémentaires.
Jean-Noël Escudié / PCA
Références : décret 2015-186 du 17 février 2015 relatif aux modalités dérogatoires de financement des activités de soins des établissements de santé répondant à des critères d'isolement géographique (Journal officiel du 19 février 2015).