Archives

Environnement - Un objectif de 500 plans climat énergie territoriaux d'ici fin 2012

La loi Grenelle II impose aux collectivités de plus de 50.000 habitants de mettre en place un plan climat énergie territorial. Sur les 500 concernées, seule une petite centaine ont déjà franchi le pas. Un colloque tenu les 27 et 28 octobre apporte un éclairage sur le "virage culturel" exigé.

Les 27 et 28 octobre 2010, l’Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) a consacré un colloque national au déploiement des plans climat énergie territoriaux (PCET). Pour l’heure, une centaine de collectivités tenues de le faire (car elles dépassent le seuil de 50.000 habitants), plus une centaine non obligées, en ont lancé un. Dernière en date : la métropole rennaise vient d’adopter le sien. Les autres collectivités ont jusqu’au 31 décembre 2012 pour se doter de ce dispositif qui, selon Eric Prud'homme, chef du service animation territoriale de l'Ademe, "correspond à un véritable projet stratégique et non à un millefeuille de propositions sur l'environnement". "Un plan climat est aussi primordial qu’un Scot [schéma de cohérence territoriale, ndlr], même si le but est moins de figer, de contraindre, que d’accompagner et de mettre en valeur des actions sur un territoire", a ajouté Sandrine Fournis, chef du bureau des territoires au conseil général de l'Environnement et du Développement durable (CGEDD), qui dépend du ministère de l’Ecologie.

A chacun sa méthode

Généralement, un plan climat ne part pas de rien. Il doit s’appuyer sur l’existant, sur ce qui marche dans un territoire ou chez un voisin, sur ce qui mérite d’être développé. Il nécessite souvent de réaliser un diagnostic carbone à partir duquel seront dressés des scénarios d’actions. Mais pas toujours : sans diagnostic préalable, la communauté d'agglomération de la Porte du Hainaut (Nord) a ainsi coconstruit son plan d’une trentaine d’actions après avoir planché en interne thème par thème et suivant une logique de groupe de travail. A Epinal, dans les Vosges, ce fut le contraire. "Le bilan carbone du territoire a agi comme un révélateur et nous a motivés pour nous mettre à l’oeuvre", témoigne Michel Heinrich, député-maire de la ville. Autre cas de figure : la ville de Paris, qui a réalisé il y a trois ans son plan climat en s’appuyant sur l’expertise d’un cabinet externe et sur une série d’ateliers de travail ayant débouché sur un livre blanc de propositions. "Pour construire collectivement un tel plan, il faut aussi penser à faire participer à son élaboration d’autres parties prenantes comme les bailleurs sociaux et les associations locales", précise Laurence Ermisse, responsable du pôle territoires et développement durable de l’association 4D. "Mais le plus dur reste encore de convaincre les élus, qui sont beaucoup plus climatosceptiques qu’on ne le croit", selon Gérard Poujade, lui-même élu. Pour cela, le maire du Séquestre (Tarn) et vice-président de l’agglomération d'Albi, recommande de savoir adapter son discours, de fixer dès le départ des règles claires et d’animer la consultation "en profitant de chaque occasion possible qu’il y a de se voir afin d’en parler". "Et même s’il le faut lors de la cérémonie annuelle des voeux", ajoute-t-il. En interne, toute mise en oeuvre d’une politique territoriale sur le climat nécessite en effet, insiste Pierre Radanne, ex-président de l’Ademe et président de 4D,  "un gros travail d’acculturation des agents et des services techniques, car avant d’exiger des autres, la collectivité se doit elle-même d’être exemplaire".

Agenda 21 et plan climat : couple ou célibat ?

Entre l'Agenda 21 et le plan climat, les lois Grenelle I et II prônent la nécessaire "cohérence". Mais quand une collectivité n’a lancé ni l’un ni l’autre, par quoi doit-elle commencer ? "Elle a le choix, a indiqué Sandrine Fournis. Sachant que si elle a un Agenda 21 et qu’elle prépare un plan climat, ce dernier pourra légalement constituer le volet énergie du premier. On peut aussi comprendre que cela soit plus rassurant de démarrer par un plan climat, en soi plus opérationnel, à condition d’élargir ensuite l’horizon pour en revenir à une approche transversale". Pour mettre en place un tel plan, l’échelle idéale semble être la communauté d’agglomération. "Elle est en effet pertinente mais, parfois, cela l’est encore plus à l'échelle de l'ensemble d’un territoire soumis à un Scot", nuance Bénédicte Rivoire, chargée de mission au Grand Douaisis (Nord), où le syndicat mixte du Scot a initié un plan climat en partenariat avec des intercommunalités et une cinquantaine de partenaires.

Principaux obstacles

Chaque étape présente en soi des difficultés. "En phase d’élaboration du plan, le dialogue avec les parties prenantes se passe bien mais les identifier au préalable n’est par exemple pas simple. De fait, mieux vaut limiter les contacts et s’appuyer sur un réseau fiable d’une vingtaine de personnes ressources", poursuit Bénédicte Rivoire. Et Elise Gaultier, chargée de mission au Comité 21, de rappeler qu'"il existe aussi des freins individuels et des réticences collectives, car tous les élus n’ont pas forcément l’envie ni des idées pour mettre en oeuvre un plan climat". Hélène Poimboeuf, responsable environnement à la métropole de Grenoble, pointe pour sa part le manque de moyens pour animer la concertation dans les petites communes. Quant au coût global d’élaboration d’un plan climat, s’il reste difficile à estimer, il faut commencer par y distinguer le financement amont du montage et de la concertation - qui exige généralement de recruter un chargé de projet dédié - et celui des actions fixées, qui nécessitent d'être suivies et évaluées. "Le tout est de commencer par des actions rentables et efficaces rapidement, afin de créer un effet d’entraînement positif. Il faut aussi se faire aider et ne pas hésiter à faire appel au secteur bancaire, dont c’est le métier, et ce afin de limiter le recours aux leviers de financement publics", conclut Pierre Radanne.

 


Morgan Boëdec / Victoires éditions