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Pacte de stabilité - Un rapport dénonce les antagonismes des politiques économiques en Europe

Dans un rapport au titre prémonitoire ("Le malaise avant la crise ?"), les sénateurs Joël Bourdin et Yvon Collin analysaient en 2007 les risques que faisaient peser l'absence de coordination des politiques en Europe. Ils enfoncent le clou dans le deuxième tome de ce rapport qui vient d'être publié. Les sénateurs soulignent le péché originel du traité des communautés européennes qui envisage à la fois des économies de marché et des interventions publiques dans les Etats membres, sans que les conditions de cohabitation de ces deux systèmes ne soient précisées. Officiellement, la politique économique et monétaire européenne, telle qu'elle a été définie en 1992 dans le traité de Maastricht, prévoit que "les Etats membres conduisent leurs politiques économiques en vue de contribuer à la réalisation des objectifs de la Communauté". Ainsi, "les Etats membres considèrent leurs politiques économiques comme une question d'intérêt commun et les coordonnent au sein du Conseil", comme le prévoit l'article 99 de ce traité. Pourtant, jusqu'ici, les Etats non pas joué l'intérêt communautaire. Déjà, dans leur premier rapport, les deux sénateurs dénonçaient ce manque de coordination comme "un obstacle infranchissable pour les ambitions européennes de croissance". Ils évoquaient même des "politiques antagonistes". A la lumière de la crise actuelle, ces travers prennent une tout autre dimension : les critères du pacte de stabilité et de croissance ont volé en éclat (le déficit public français s'élève à 3,4% du PIB en 2008, selon l'Insee et devrait atteindre 5,7% du PIB cette année), chaque Etat membre a essayé de trouver des réponses propres à son territoire, à l'image des plans de relance et des plans pour l'automobile. Dans ce contexte, l'Europe est certes parvenue à imposer quelques mesures en privilégiant notamment les investissements dans l'énergie. Mais elle a surtout brillé par son incapacité à fixer une stratégie commune face à la crise.
Les rapporteurs considèrent que la coordination doit "devenir une priorité politique pour une Europe où les Etats membres considèreraient vraiment leurs politiques économiques comme des questions d'intérêt commun, ce à quoi ils sont appelés, et, plus encore, pour une Europe prenant au sérieux la poursuite des objectifs économiques et sociaux qu'elle s'est fixée". 

 

La subsidiarité, un frein pour l'Europe sociale

Joël Bourdin et Yvon Collin proposent des solutions pour "reconstruire une économie européenne viable et, enfin, efficace". Selon eux, cette mise en cohérence doit passer par un partage équilibré des richesses "moins défavorable au travail". La lutte contre la pauvreté est également évoquée comme une source d'équilibre et de croissance. S'agissant de l'Europe sociale, les sénateurs regrettent "la modestie" des ambitions communautaires, freinées par le principe de subsidiarité : "En droite ligne avec la consécration du principe de subsidiarité dans le champ social, on relèvera que certaines sections du champ étant écartées d'emblée (les rémunérations, le droit d'association ou le droit de grève), la voie de construction de l'Europe sociale est constituée par la 'méthode ouverte de coordination' (MOC), qui repose moins sur du droit positif que sur des échanges d'expériences." Ainsi, "les clauses des traités européens et le droit européen plus généralement énoncent essentiellement dans le domaine social des grands principes, des objectifs et des minima". Les gouvernements ne cherchent pas de cohérence ou de complémentarité entre eux dans ces politiques. C'est pourquoi Joël Bourdin et Yvon Collin suggèrent que l'Europe se montre plus ferme dans la mise en oeuvre du principe de lutte contre la pauvreté qui fait partie de ses fondements. Cet engagement permettrait aux Etats d'être moins prudents dans leur politique car "la réduction de la pauvreté a un coût que, sans coordination, aucun Etat ne peut assumer seul sans inconvénients (fuite des capitaux, pertes de compétitivité relative)". Enfin, les sénateurs critiquent le manque de pertinence des mesures des inégalités utilisées au niveau européen, affirmant que "les estimations relatives des inégalités et de la pauvreté en Europe telles qu'elles sont réalisées ressortent comme trop faiblement significatives". Ils proposent de s'appuyer sur les indicateurs utilisés par l'OCDE, jugés plus justes.

 

Caroline Garcia / Welcomeurope

 

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