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Urbanisme - Une commune ne peut pas faire valoir de préjudice indemnisable en cas de permis de construire illégal

Par un arrêt du 4 novembre 2008, la chambre criminelle de la Cour de cassation précise qu'une commune ayant délivré un permis de construire pour une construction illégale ne peut prétendre à être indemnisée de la perte de ce bien et des revenus y afférant.
En l'espèce, la commune d'Hyères-les-Palmiers avait concédé une parcelle de son domaine public avec obligation pour la concessionnaire d'y édifier un chalet de plage en matériaux durables à usage de bar-restaurant. Dans le même temps, la commune avait également délivré un permis de construire à la concessionnaire. Ce permis a été, par la suite, déclaré illégal par le Conseil d'Etat (CE, 9 octobre 1996, Union départementale Vie et Nature 83, 161555). En effet, une construction à usage de bar-restaurant n'est nécessaire ni à des activités économiques ni à des services publics exigeant la proximité immédiate de l'eau suivant les dispositions de l'article L.146-4-III du Code de l'urbanisme, et ce malgré les obligations mises par la commune à la charge de l'exploitant de ce bar-restaurant pour favoriser la sécurité des baigneurs. De plus, un terrain se trouvant à moins de cent mètres du rivage et isolé des constructions les plus proches ne peut être regardé comme situé dans un "espace urbanisé".
La concessionnaire, informée que la commune ne renouvellerait pas sa concession et ferait usage de son droit de reprise des aménagements, a fait démolir le bar-restaurant. La commune l'a alors assignée devant le tribunal correctionnel pour destruction de biens destinés à l'utilité publique et a demandé à être indemnisée de la perte d'un élément de son patrimoine immobilier et des redevances futures.
Pour écarter la demande, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a énoncé que la déclaration d'illégalité du permis de construire prononcée par le Conseil d'Etat ne permettait pas d'admettre le principe de l'existence d'un préjudice économique résultant de la perte de construction. En confirmant l'arrêt de la cour d'appel, la Cour de cassation a précisé qu'une commune ayant illégalement autorisé une construction immobilière ne pouvant prétendre à être indemnisée de sa perte et des revenus afférents. Il s'agit donc d'une application stricte de l'annulation du permis de construire prononcée par le Conseil d'Etat. Le même raisonnement, en droit administratif, est conduit dans le plein contentieux indemnitaire. Le juge est amené à porter une appréciation très concrète sur le caractère réel du préjudice invoqué, en recherchant si le demandeur a effectivement été privé d'un quelconque droit ou avantage. D'ailleurs, cette condition de l'existence d'un préjudice effectif vaut aussi bien en matière de responsabilité pour faute qu'en matière de responsabilité sans faute et le juge doit rechercher d'office si le préjudice invoqué existe (CE, 2 avril 1971, Min. de la Santé Publique c/ Marchand, Rec., CE, p.273). Dans cette perspective, il a ainsi été jugé que la décision d'octroi de permis de construire déclarée illégale exclut l'indemnisation de la perte de bénéfices dès lors que le constructeur ne peut se prévaloir d'un droit de construire dont la décision l'aurait privé (CE, 15 mars 1989, Société European Homes, 66906).

 

Antony Fage / Cabinet de Castelnau

 

Référence :  arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 4 novembre 2008, requête 08-82.591

 

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