Une ordonnance donne le feu vert au recrutement d’agents de droit privé au sein de l’Office national des forêts 

Faciliter le recrutement d’agents contractuels de droit privé au sein de l’Office national des forêts (ONF) et leur permettre de concourir à l'exercice des missions de police en forêt, tel est l’objet de l’ordonnance, publiée ce 2 juin, en application de la loi Asap.

Présentée la veille en conseil des ministres par Marc Fesneau, le nouveau ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire - dont les attributions viennent tout juste d’être précisées par décret -, l’ordonnance relative aux agents de l'Office national des forêts (ONF) et son décret d’application sont parus ce 2 juin. Une disposition de la loi de simplification du 7 décembre 2020 dite "Asap" (article 79) habilite en effet le gouvernement, comme le rappelle le rapport de présentation de l’ordonnance, à modifier les dispositions du code forestier, afin d'élargir les possibilités de recrutement d'agents contractuels de droit privé et de leur permettre de concourir à l'exercice de l'ensemble des missions confiées à l'Office, y compris la constatation de certaines infractions et à l'exclusion de leur recherche, par certains d'entre eux commissionnés et assermentés pour ce faire. Un texte mis sur le tapis au moment même des discussions sur le nouveau contrat d'objectifs et de performances (COP) 2021-2025, en écho au lourd endettement de l’établissement chargé de la gestion des forêts publiques et d’une vague de départs en retraite des personnels fonctionnaires.
Le texte n’a donc rien d’anodin pour le statut des personnels et la gestion de l’Office. Le rapport de présentation joue d’ailleurs cartes sur table : l’objet est "de réorienter l'établissement vers le droit commun applicable aux personnels des établissements publics industriels et commerciaux, de simplifier la gestion des personnels relevant de différents régimes juridiques ainsi que d'entériner une situation de fait qui voit l'établissement recruter majoritairement des agents contractuels de droit privé". C'est déjà une réalité en pratique. La part des salariés de droit privé s'est progressivement accrue et représente aujourd'hui près de la moitié (43%) du personnel de l’Office. Un mouvement acté dans le précédent contrat d’objectifs que le texte devrait contribuer à amplifier. "Ces salariés exercent des fonctions très diverses au sein de l'Office, à tous les niveaux hiérarchiques et pour tous les domaines d’activités", indique le ministère, soulignant que l’établissement embrasse "à la fois des missions de service public à caractère administratif (surveillance et protection), et des missions de service public à caractère industriel et commercial (gestion et valorisation)". 

Clarification sur les missions de police

L’ordonnance permet, pour les missions de police de l'établissement que réaliseront ces agents contractuels, de fixer leurs compétences et pouvoirs. Le Conseil d’Etat avait été parfaitement clair sur le sujet dans son avis sur le projet de loi Asap, estimant que la portion de phrase "y compris la constatation de certaines infractions ", signifiait que "ne pourra leur être confiée une compétence générale de recherche et de constatation des infractions pénales en matière forestière". L’ordonnance le traduit expressément dans toute une série d’articles du code forestier (L.161-7, L. 161-8, L. 161-10) en habilitant les agents de droit privé du seul pouvoir de constater, sans les rechercher, les infractions forestières. Elle réécrit également suivant la même logique l'article L. 161-4, en leur permettant d'intervenir, en distinguant de la même façon constatation et recherche, lorsqu'ils sont investis de missions de police judiciaire par le code de l’environnement et, par ailleurs, de requérir la force publique.
Le texte opère au passage un toilettage de cet article en autorisant les agents des services de l'Etat chargés des forêts, les agents publics de l'ONF et de l'établissement du domaine national de Chambord, les gardes champêtres et agents de police municipale à se communiquer spontanément, sans que puisse y faire obstacle le secret professionnel, les informations et documents recueillis dans l'exercice de leurs missions de police administrative ou judiciaire prévues.
Enfin, le texte apporte la même précision dans les articles régissant les polices spéciales au titre du code de l’environnement - police de l'eau, du conservatoire du littoral, des parcs nationaux, des réserves naturelles, des sites classés, de la circulation des véhicules à moteur, du patrimoine naturel, de la chasse, de la pêche en eau douce, du traitement des déchets, de la publicité dans les espaces naturels - et pour ce qui concerne la police des eaux potables et des eaux minérales naturelles au titre de  l'article L.1324-1 du code de la santé publique. 
Le premier baptême du feu pourrait intervenir rapidement… Le ministère compte bien faire participer "dès l’été 2022" ces agents de droit privé "aux politiques de prévention de feux de forêt", alors que le niveau d’alerte est maximal en raison de la sécheresse qui frappe l’ensemble de l’hexagone.

 
Références  : ordonnance n°2022-839 du 1er juin 2022 relative aux agents de l'Office national des forêts et rapport au président de la République ; décret n°2022-841 du 1er juin 2022 relatif aux agents de l'Office national des forêts, JO du 2 juin 2022, textes n°23, 24 et 26.