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Petite enfance - Une parlementaire en mission chargée d'une réflexion "sans tabou" sur les modes de garde

Par un décret du 12 février, le Premier ministre a chargé Michèle Tabarot - députée des Alpes-Maritimes, maire du Cannet et présidente du Conseil supérieur de l'adoption -, d'une mission temporaire auprès du ministre du Travail, des Relations sociales et de la Solidarité. Cette mission s'inscrit dans le cadre de la mise en oeuvre du droit opposable à la garde d'enfants, dont le projet de loi devrait être soumis au Parlement en 2009 pour une application en 2012. Michèle Tabarot, qui devra remettre ses conclusions "à la mi-juin 2008", est plus particulièrement chargée d'une réflexion sur les moyens de développer, avant cette échéance, l'offre de modes de garde des enfants de moins de trois ans. Comme en matière de logement, le droit opposable à la garde d'enfants n'aura aucune portée pratique si l'écart actuel entre la demande des parents et l'offre de places se maintient. Ceci explique le renvoi à 2012 pour l'entrée effective de ce droit dans l'ordre juridique.
La lettre de mission adressée le même jour par François Fillon à Michèle Tabarot fournit déjà quelques éléments. Le Premier ministre indique ainsi que les premières estimations "font apparaître un besoin de création de places, tous modes de garde confondus, qui pourrait aller de 300.000 à 800.000, selon que la mise en oeuvre de ce droit serait liée ou non à l'exercice par les parents d'une activité professionnelle". Le haut de la fourchette paraît toutefois théorique, car il est très peu probable que le droit de garde opposable ne soit pas lié à l'exercice d'une activité professionnelle ou équivalente (insertion, formation, recherche active d'emploi...). Jusqu'à présent, le gouvernement évoquait plutôt une fourchette de 350 à 400.000 places à créer d'ici à 2012, la Caisse nationale d'allocations familiales (Cnaf) évoquant, pour sa part, un chiffre de l'ordre de 450.000 places supplémentaires. Même dans ces hypothèses "basses", la lettre de mission reconnaît que ces créations "auraient des incidences financières lourdes pour la branche famille". Un euphémisme pour signifier qu'il sera très difficile, dans un environnement budgétaire et juridique inchangé, de dégager les ressources nécessaires à ces créations, alors que la Cnaf a été sommée de remettre de l'ordre dans son budget d'action sociale après les dérapages financiers de ces dernières années.

 

Des pistes très ouvertes

Dans sa lettre de mission, le Premier ministre demande à Michèle Tabarot de réfléchir "sans tabou" et suggère quelques pistes à explorer. La première réside dans la répartition de l'offre entre les différents modes de garde, avec en particulier la question des crèches "dont le coût annuel moyen de fonctionnement est estimé à 15.000 euros [par enfant], alors qu'une place chez une assistante maternelle coûte 10.000 euros et une place en école maternelle (dès deux ans) 4.000 euros". François Fillon suggère également de s'inspirer des exemples étrangers. Même s'il prend soin de préciser que ces éventuelles reprises d'exemples étrangers devront à la fois assurer la sécurité et l'épanouissement des enfants et favoriser la maîtrise de la dépense, cette suggestion ouvre la porte à un éventuel assouplissement des règles et normes d'encadrement, particulièrement rigides en France.
En revanche, le Premier ministre n'évoque pas une autre problématique, qui devrait pourtant être au coeur des réflexions de Michèle Tabarot : les moyens de résoudre l'actuelle pénurie de professionnels de la petite enfance, qui crée de graves difficultés de recrutement pour les communes et les structures associatives. L'Association des maires de France (AMF) a ainsi adressé, à la fin de 2007, un courrier au directeur général de l'action sociale pour souligner les difficultés d'application du décret du 20 février 2007 relatif aux établissements et services d'accueil des enfants de moins de six ans. Tout en assouplissant l'encadrement des modes de garde, ce texte réserve en effet la direction de ces structures à des médecins, des puéricultrices justifiant de trois ans d'expérience ou des éducateurs de jeunes enfants (avec un certain nombre de conditions restrictives dans ce dernier cas, dont la présence dans l'établissement ou le service d'au moins une puéricultrice diplômée d'Etat). L'AMF demande donc une augmentation du numerus clausus des puéricultrices et des éducateurs, ainsi que la mise en place de formations gratuites.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Référence :  Décret du 12 février 2008 chargeant une députée d'une mission temporaire (JO du 13 février 2008).

 

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