Ventes en l'état futur d'achèvement (VEFA) et droit de la commande publique : des critères de distinction très précis

Contexte : La vente en l’état futur d’achèvement (VEFA) est un outil juridique contractuel qui peut être utilisé par les personnes publiques. Son utilisation peut toutefois se confondre avec un marché public de travaux et le risque de requalification existe. Les critères de distinction sont précisés par la jurisprudence.

Réponse : Les contrats de la commande publique sont définis comme les contrats conclus à titre onéreux par un acheteur ou une autorité concédante, pour répondre à ses besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services, avec un ou plusieurs opérateurs économiques.

La VEFA désigne, comme l’indique l’article 1601-3 du code civil, le contrat par lequel le vendeur transfère immédiatement à l'acquéreur ses droits sur le sol ainsi que la propriété des constructions existantes. Les ouvrages à venir deviennent la propriété de l'acquéreur au fur et à mesure de leur exécution ; l'acquéreur est tenu d'en payer le prix à mesure de l'avancement des travaux.

Autrement dit, la VEFA désigne l’opération par laquelle un tiers construit un ouvrage dont il revend une partie à l’administration au fur et à mesure de la construction de cet ouvrage. Il est à noter que le vendeur conserve les pouvoirs de maître de l’ouvrage jusqu’à la réception des travaux.

La pratique peut parfois rendre la distinction complexe entre ces deux montages juridiques, particulièrement entre une VEFA et un marché de travaux.

La jurisprudence vient apporter des éclaircissements et des critères de distinction (CAA Nancy 15 avril 2021 M. E C. c./ Metz Métropole et Société Demathieu et Bard Immobilier, req. n°19NC02073).

Cette décision rappelle au préalable « qu’aucune disposition législative n’interdit aux collectivités publiques de procéder à l’acquisition de biens immobiliers au moyen de contrats de vente en l’état futur d’achèvement »

Le juge administratif considère ensuite qu’une VEFA peut-être requalifiée en marché de travaux si ces conditions sont réunies :

  • L’objet de l’opération vise à la construction même d’un immeuble pour le compte de la collectivité publique,
  • L’immeuble est entièrement destiné à devenir la propriété de la personne publique
  • L’immeuble a été conçu en fonction des besoins propres de la personne publique.

Dans cette décision d’espèce, la cour considère que la personne publique n’a pas exercé d’influence déterminante sur la conception de l’ouvrage, et que ce dernier n’a pas été conçu selon ses besoins à son initiative. Elle en conclue que l’opération n’est pas un marché public et que la collectivité n’avait pas la qualité de maitre d’ouvrage.

Ce critère de l’influence déterminante a d’ailleurs été repris par la jurisprudence européenne (CJUE 22 avril 2021 Commission européenne c/ Rép. Autriche, aff. C‑537/19). La cour rejette notamment la volonté du requérant de requalifier une VEFA en marché de travaux, jugeant « qu’ une influence déterminante sur sa conception peut être identifiée s’il peut être démontré que cette influence est exercée sur la structure architecturale de ce bâtiment, tels que sa dimension, ses murs extérieurs et ses murs porteurs. Les demandes concernant les aménagements intérieurs ne peuvent être considérées comme démontrant une influence déterminante que si elles se distinguent du fait de leur spécificité ou de leur ampleur ».

Cette décision est d’ailleurs  une confirmation des critères  dégagés par la jurisprudence administrative antérieure (CE 8 février 1991 Région Midi Pyrénées, req. n°57679 et CE 14 mai 2008 Communauté Millau-Grand Causses, req. n°280370).

Références :

Article L2 du code de la commande publique

Article 1601-3 du code civil

CAA Nancy 15 avril 2021 M. E C. c./ Metz Métropole et Société Demathieu et Bard Immobilier, req. n°19NC02073

CJUE 22 avril 2021 Commission européenne c/ Rép. Autriche, aff. C‑537/19

CE 8 février 1991 Région Midi Pyrénées, req. n°57679

CE 14 mai 2008 Communauté Millau-Grand Causses, req. n°280370

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