Accueil de familles Roms : l'histoire de femmes et d'hommes qui décident de vivre ensemble

Au sein de l'agglomération nantaise, la commune de Sainte-Luce sur Loire accueille dix familles Roms depuis 2009. Misant sur leur intégration, la municipalité, appuyée par des militants associatifs, a choisi une approche par le dialogue et l’écoute mutuelle qui prend le dessus sur les a priori ou les réticences.

Si les dix familles Roms ont trouvé un point de chute Sainte-Luce sur Loire (12 000 habitants), au terme d'un parcours précaire jalonné d'occupations et de refoulement sur différents terrains de l'agglomération nantaise, c’est qu’une sensibilisation et un travail préliminaire avaient été réalisés auparavant. Au lendemain des municipales, Roselyne Durand, adjointe aux solidarités, choquée par les campements de fortune sur des communes proches, avait en effet choisi d'ouvrir un dossier sur ce sujet. “ Comme beaucoup de français, je n'avais pas toutes les clés de compréhension s'agissant de la situation des Roms et des gens du voyage, et je souhaitais pouvoir ne pas mélanger les problèmes”, explique l’élue.

Mieux connaître pour savoir réagir

En mars 2008, à sa demande, le maire confie à Brigitte Biche, conseillère municipale, la mission de faire le point sur la question des Roms : d'où viennent les familles ? Y a-t-il des aides possibles ? Quelle est la réglementation?  Etc. Au gré de rencontres avec l'ensemble des acteurs concernés, Conseil général, ville de Nantes, etc., les élus font un tour relativement complet de la question... Ce travail a sans conteste levé bien des incompréhensions. Aussi, lorsqu'un matin de février 2009, le maire est informé par la gendarmerie et la police municipale de l'installation illicite de dix familles sur un terrain privé situé sur la commune, «j'ai immédiatement expliqué aux familles que leur occupation était illégale et que le propriétaire allait demander leur expulsion, et que nous allions ensemble aussi travailler à une solution”, souligne Roselyne Durand. Dans l’attente, pour garantir des conditions sanitaires a minima, la mairie installe des toilettes sèches sur ce terrain.

Une association passe convention avec la mairie

« Rien n’aurait pu être fait sans la forte mobilisation de simples citoyens et de bénévoles associatifs », tient à rappeler l’élue qui organise des rencontres avec ces derniers. Ensuite, c'est en un travail mené en bonne intelligence avec les familles Roms et ces citoyens engagés qui a permis que progressivement, le projet d'intégration prenne forme. Une association, baptisée Soleil Rom, se créé et passe convention avec la mairie pour la mise à disposition d’un nouveau terrain, appartenant cette fois à la commune, sur lequel les familles avaient d'elles mêmes déménagé la veille la date de leur arrêté d’expulsion. La mairie accorde une subvention de 15 000 euros à l'association, qui a investi dans l'achat de mobiles homes d'occasion. L'association assume les consommations d'électricité, d'eau, et demande en contrepartie aux familles une participation sous forme de redevance prévue par la convention d'occupation signée par chaque famille.

Un travail d’intégration

“Avoir une adresse stable – bien que provisoire – facilite toutes les autres démarches : scolarisation, recherche d'emploi, etc.”, précise l'élue. L'association a passé une convention avec le CCAS (centre communal d'action social) pour le suivi et l'accompagnement socio éducatif. Des points très réguliers sont faits entre l'association, les familles et les élus. “Nous avons tous le même projet : que ces familles s'intègrent, trouvent un emploi, un logement, sur Sainte-Luce ou ailleurs”, observe l’élue. Si trois adultes parlaient déjà bien le français, des cours d'alphabétisation ont été mis en place avec l'association, et un projet plus élaboré pourrait bientôt déboucher avec le collège. “Nous avons appris à mieux connaître ces familles Roms. Et elles aussi ont fait ce pas. Nous avons vu leurs peurs, leur volonté de respecter les règles, notamment sur la scolarité des enfants. Cela ne se dément pas depuis, puisqu'à la rentrée, tous seront scolarisés, et les plus petits ont même été inscrits en maternelle”, apprécie Roselyne Durand. Coté insertion professionnelle, les avancées sont plus compliquées, en raison notamment des contraintes réglementaires (liste restreinte de métiers, droit à payer par l'employeur,..). Outres de petits boulots (cueillette du muguet,... ), certains ont tout de même pu signer plusieurs CDD, “grâce à l’énergie déployée par l’association Soleil rom pour convaincre des maraîchers souligne l'élue.

Ici comme partout, des inquiétudes ont été émises par une partie de la population, avec leur lot d'exagérations et d'outrances pour une minorité. “Plutôt que de nier ces inquiétudes, nous sommes allés à la rencontre des administrés pour parler franchement et simplement”, assure l'élue, qui veut souligner le courage politique du maire.

Limites posées

“Il est bien évident que nous ne pourrions pas poursuivre ce projet s'il y avait beaucoup plus de familles”, estime Roselyne Durand. D'autres familles expulsées sont venues se poser cet été sur Sainte-Luce, “mais l’association Soleil rom et mes collègues ont réglé cela de telle sorte qu'elles sont reparties d'elles mêmes, sans recours à la force publique”, explique Roselyne Durand. La mairie ne se veut ni donneuse de leçon ni modèle. “Nous agissons à notre dimension, sans volonté de médiatiser, si ce n'est auprès des Lucéens ”, conclut Roselyne Durand. “Si chaque commune prenait vraiment sa part plutôt que de repousser le problème chez les autres...”.


Emmanuelle Stroesser pour la rubrique Expériences du site www.mairie-conseils.net 
 

Commune de Sainte Luce sur Loire

Nombre d'habitants :

11776
Mail de l'Europe - BP 88109
44981 Sainte-Luce sur Loire Cedex

Roselyne Durand

Adjointe déléguée aux solidarités

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