Aide à domicile : dans le Doubs, les personnes âgées passent à l'abonnement (25)

Depuis 2011, le conseil général du Doubs a abandonné la facturation à l'heure des aides à domicile pour une forfaitisation de la participation des usagers bénéficiant d'un plan d'aide à l'autonomie. Ce qui équivaut pour les usagers à un abonnement mensuel, le conseil général laissant le soin d'adapter la prise en charge, sans surcoût. Trois ans plus tard, l'expérience a fait ses preuves.

Pour comprendre ce que cela change, il faut revenir sur les modalités de l'aide personnalisée autonomie (APA) à laquelle ont droit les personnes âgées dépendantes. Dans le Doubs comme partout en France, la personne âgée a, suivant son degré de dépendance, un droit à l'APA (du niveau 1 pour les très dépendants, à 4 pour les moyennement dépendants, les niveaux 5 et 6 ne relevant pas de l'APA, mais de l'action sociale facultative des caisses de retraite). Ce droit correspond à un certain nombre d'heures d'intervention d'une aide à domicile, par semaine et par mois. Le conseil général assume une bonne partie du coût de cette intervention. L'usager règle le reste à charge en fonction du niveau de ses ressources.

Contexte : sous-utilisation des heures programmées

Dans le Doubs, le coût d'une heure à domicile est facturé 21,50 euros, le conseil général verse 18,80 euros au service d'aide à domicile, et l'usager en moyenne 2,70 euros. "Cela peut paraître peu, mais cela peut se révéler une somme mensuelle importante pour une personne très dépendante", relève Étienne Petitmengin, directeur général adjoint en charge du pôle Solidarités. Or, le conseil général avait constaté que de plus en plus d'usagers avaient tendance à ne pas consommer la totalité des heures qui leur avaient été attribuées. Cet écart avait atteint 20%. "Notre but est que les heures programmées soient effectivement utilisées", reprend le directeur.

Forfaitisation du reste à charge selon les besoins

C'est pour cela que le conseil général a imaginé un nouveau système de facturation : la forfaitisation du reste à charge. La personne âgée n'est plus facturée à l'heure, mais contracte un abonnement mensualisé. Par exemple, si elle a droit à 20 heures d'aide à domicile par mois, son abonnement est de 20 x 2,70euros par mois. Selon que l’usager a besoin de moins d'heures parce qu'il est hospitalisée, ou de plus d'heures parce qu'il revient d'hospitalisation, le service d'aide à domicile adapte son planning pour lui donner plus ou moins d'heure, sans formalités. Et cela sans que cela se répercute sur le coût de son abonnement mensuel qui reste de 54 euros.

Le pari de la confiance avec les services d’aide à domicile

Cette réforme a donc nécessité que le conseil général accorde pleine confiance aux neuf structures de services d'aide à domicile qu'il a autorisées sur le département. Concrètement, une enveloppe prévisionnelle, elle aussi globalisée, est versée chaque mois à ces structures, et le solde est réalisé en fin d'année, en fonction du nombre d'heures réellement effectuées. Cette enveloppe est calculée en fonction du nombre d'heures prévisionnelles à réaliser, et le degré de dépendance moyen des personnes dont la structure a la charge. "Cela permet de favoriser les services qui prennent en charge les personnes les plus dépendantes, considérant que cela nécessite du personnel de qualité, ce qui a un cout horaire supplémentaire", justifie le directeur général adjoint en charge du pôle Solidarités.

Plans d’aide calibrés au plus près des besoins, et bien meilleur taux de réalisation

Même si en moyenne le montant du reste à charge est équivalent, la somme à régler par les bénéficiaires a été réduite. "Avant le passage à la forfaitisation, nous avons contacté toutes ces personnes pour revoir avec elles leur plan d'aide en fonction de leurs besoins réels, et ces plans ont en moyenne été réduit de 10% d'heures. Cela tient au fait qu'auparavant, le système était basé sur un droit théorique. Les gens demandaient donc le nombre d'heures le plus important, quitte à ne pas les utiliser. Désormais, le plan est mieux calibré et les gens savent qu'il peut être ajusté au besoin", explique le directeur. Résultat : le taux de réalisation des plans est quasi de 100%.

Trois ans après, on ne parle plus d'expérimentation

Au conseil général du Doubs, on ne parle plus d'expérimentation, "parce qu'il serait pour nous inconcevable de revenir en arrière, tant les avantages sont prouvés, observe le directeur général adjoint. Au départ de notre expérimentation, nous étions dubitatifs. Trois ans plus tard, tous nos paris ont été remportés". Les bénéficiaires ont, selon le directeur du pôle, plutôt très bien accepté cette réforme, car elle rend le système "plus simple", offre une "lisibilité financière dans le temps", et les rassure par sa capacité d’adaptation à leur propre situation. Quant aux structures de services à domicile, elles sont devenues des partenaires de premier plan (lire encadré).

Emmanuelle Stroesser / Agence Traverse pour la rubrique Expériences des sites www.mairieconseils.net et www.localtis.info
 

Du côté des structures d’aide à domicile
Loin de multiplier les heures sans l'aval du conseil général c'est même plutôt l'effet inverse qui s'est produit. "Nous sommes depuis de vrais partenaires et je vous assure que c'est un changement de culture considérable", précise le directeur.
Marie-Paule Belot, la responsable d'Eliad, l'un des neuf services d'aide à domicile autorisés par le conseil général du Doubs, confirme les atouts de ce nouveau dispositif : "Ce système de forfait nous permet de varier de plus ou moins 10% par an le nombre d'heures. Nous avons ainsi gagné une capacité d'adaptation aux besoins de la personne sans avoir à demander l'autorisation au conseil général. C'est un soulagement et une source de simplification pour nous. Nous sommes aussi passés à la télégestion. Nous avons gagné un temps de travail administratif." Le gain est également financier "car notre activité est plus stable sur ces heures APA". Pour cette responsable d’un service à domicile, cette initiative "participe à la professionnalisation du secteur et à une meilleure reconnaissance des salariés". Pour ces services, la concurrence ne se joue plus sur les prix, mais bien sur la qualité.

Conseil général du Doubs

Hôtel du département, 7 avenue de la Gare d'Eau
25031 Besançon cedex

Étienne Petitmengin

Directeur général adjoint, pôle Solidarités et cohésion sociale

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