Bien vieillir : un texte aminci en commission des affaires sociales du Sénat

Les sénateurs ont supprimé plus de la moitié des articles et réécrit d’autres dispositions, dans un souci d’efficacité. Le rapporteur Jean Sol estime que la proposition de loi est de portée limitée et rappelle que les attentes portent désormais sur la loi de programmation sur le grand âge promise par le précédent gouvernement. "L’agenda reste à définir", pour la nouvelle ministre Catherine Vautrin.

C’est un texte aminci qui a été adopté, le 17 janvier 2024, par les sénateurs de la commission des affaires sociales. Initialement composée de 14 articles, la proposition de loi "portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France" comptait "65 articles de portée inégale" à l’issue de l’examen des députés (voir notre article), selon la commission des affaires sociales du Sénat. Cette dernière a donc supprimé 31 articles et modifié un grand nombre de dispositions.

Possibilité de définir des "territoires de l’autonomie" au niveau infra-départemental

En matière de gouvernance et de pilotage de la politique de prévention de la perte d’autonomie, la commission supprime la conférence nationale de l’autonomie, considérant que cette dernière "ne trouverait pas sa place dans le paysage actuel". Elle limite par ailleurs la mission d’audit et d’évaluation confiée à la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) au champ des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) et des maisons départementales de l'autonomie (MDA), et non plus également à celui des départements - "au nom des principes de la décentralisation".

Concernant le service public départemental de l'autonomie (SPDA), le rapporteur Jean Sol (LR, Pyrénées-Orientales) a observé que ce dernier "ne supprime aucun dispositif de coordination ou guichet existant, mais ajoute au contraire une couche supplémentaire", estimant toutefois que "l'imprécision du texte présente l'avantage de la souplesse et de l'adaptabilité du dispositif aux réalités locales". Pour "renforcer l’inscription territoriale du SPDA", les sénateurs ouvrent la possibilité au département et à l’agence régionale de santé (ARS) de "définir conjointement des ‘territoires de l’autonomie’ au niveau infra-départemental et de mettre en place la conférence territoriale de l’autonomie à cette échelle".

En matière d’organisation de l’offre médico-sociale, la commission a adopté un nouvel article visant à "contraindre le secteur public à se regrouper", au sein d’un groupement hospitalier de territoire (GHT) ou d’"un nouveau type de groupement dénommé ‘groupement territorial social et médico-social’ (GTSMS) pour personnes âgées". "Soutenue par les représentants du secteur", cette obligation ne concernerait pas les établissements et services gérés par un centre communal ou intercommunal d’action social (CCAS/CIAS). Le but de ces groupements serait d’établir "une stratégie commune d’accompagnement des personnes âgées dans une logique de parcours" et de "rationaliser les modes de gestion par la mise en commun de fonctions et d’expertises".

Créer une cellule départementale de recueil et de suivi des signalements de maltraitance

Au chapitre de la lutte contre la maltraitance des personnes âgées et handicapées, les sénateurs de la commission des affaires sociales ont voté pour la création d’une "cellule départementale de recueil et de suivi des signalements de maltraitance sous l’autorité conjointe du président du conseil départemental et de l’ARS", au lieu d’un signalement à une instance placée auprès de l’ARS dans la version de l’Assemblée. 

Concernant la protection des majeurs, la plupart des articles sont éliminés "compte tenu de leur faible ambition". D’autres articles portant sur le contrôle des établissements et services médico-sociaux (ESMS) sont supprimés ; les sénateurs jugent en effet satisfaisant le cadre fixé après le scandale Orpea et appellent plutôt à donner "les moyens nécessaires" aux autorités de contrôle.

Programmé en séance à partir du 30 janvier, le texte est renommé "proposition de loi portant diverses mesures relatives au grand âge et à l’autonomie". Considérant que ce dernier "n'entraînera sans doute pas de bouleversement des politiques de soutien à l'autonomie", le sénateur Jean Sol rappelle que "les attentes des acteurs sont désormais tournées vers la future loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge promise par le précédent gouvernement" (voir notre article). "L’agenda reste à définir", a répondu Catherine Vautrin, nouvelle ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités, dans une interview accordée le 20 janvier à Ouest France. Les deux priorités sont pour elle "le maintien à domicile et le renforcement du contrôle de la qualité des Ehpad", avec l’idée que "tout ne passe pas par la loi".