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Bilan des Paerpa : un lourd dispositif pour quels résultats ?

Le bilan définitif du programme Paerpa (personnes âgées en risque de perte d’autonomie), destiné à "maintenir la personne âgée dans la plus grande autonomie le plus longtemps possible, dans son cadre de vie habituel", a été publié. L'expérimentation a concerné 18 projets couvrant des territoires très hétérogènes. S'agit-il aujourd'hui de généraliser le dispositif ? Rien n'est moins sûr.

Si l'expérimentation est devenue une pratique courante pour la mise en place de nouveaux dispositifs, une expérimentation qui dure sept ans et se voit prolongée faute de conclusions décisives est nettement plus rare. C'est pourtant le cas des expérimentations Paerpa 2013-2019, dont le ministère des Solidarités et de la Santé vient de publier le bilan définitif. Lancé en 2013 dans le cadre de la Stratégie nationale de sante?, le programme Paerpa (personnes âgées en risque de perte d’autonomie) a connu quelques vicissitudes, comme le refus des médecins libéraux de participer aux instances de pilotage ou des bilans d'étape successifs et peu concluants (voir nos articles ci-dessous).

Des objectifs ambitieux...

Malgré ces bilans assez peu concluants, l'expérimentation a été prolongée d'un an, jusqu'au 31 décembre 2019. Le bilan établi par le ministère est donc censé clore la phase d'expérimentation et permettre la prise de décision sur une éventuelle généralisation du programme. En attendant, les crédits dédiés aux outils clés créés dans le cadre de Paerpa (une vingtaine de millions d'euros par an) ont été prolongés en 2020.

Au final, les neuf projets pilotes d'origine sont devenus 18 projets couvrant des territoires très hétérogènes : la totalité ou une partie seulement d'un département, une ville (Bordeaux) ou même quelques arrondissements d'une ville (Paris). Les territoires de l'expérimentation regroupaient 550.000 personnes de plus de 75 ans, soit 11% de la tranche d'âge.

L'objectif affiché du dispositif est de "faire en sorte que les personnes âgées reçoivent les bons soins, par les bons professionnels, dans les bonnes structures au bon moment, avec les bonnes informations, le tout au meilleur coût". En d'autres termes, il s'agit de "maintenir la personne âgée dans la plus grande autonomie le plus longtemps possible, dans son cadre de vie habituel".

…mais des résultats incertains

Le document publié par le ministère, qui résume l'étude, détaille les modalités de mise en œuvre des expérimentations. Il est moins disert sur le bilan proprement dit, mais retient tout de même "onze leçons de l'expérimentation Paerpa pour les personnes âgées", formulées en termes assez généraux. On en retiendra notamment la nécessité de ne pas construire le parcours de la personne autour des seuls problèmes de santé, la "nécessaire coordination des acteurs sanitaires, médicosociaux et sociaux autour de la personne et de ses aidants, dans la durée et dans la simultanéité", un parcours qui doit aller de la prévention a? la fin de vie et prendre en compte les aidants, ou encore un parcours qui repose sur une dynamique territoriale entre acteurs, supposant notamment une implication de tous les acteurs, une animation territoriale et des leviers financiers décloisonnés, inscrits dans la durée. 

Autres "leçons" : la nécessité de mise en œuvre d’une palette d’actions partenariales, un lieu de coordination des acteurs "favorisant l’accès aux aides sociales, qui doit être aussi un guichet unique d’entrée pour les aînés et les aidants", ou encore "une mutation de la posture des services publics vis-a?-vis des acteurs, en privilégiant le soutien et le décloisonnement ainsi qu’une logique de responsabilité locale". S'ajoutent à ces constats des focus sur "quelques réalisations concrètes".

Enfin, le document comporte une page intitulée "Les perspectives". On pourrait s'attendre à ce qu'elle prenne position sur le bilan qualitatif de l'expérimentation et émette un avis sur une éventuelle généralisation des Paerpa. Mais il n'en est rien, si ce n'est pour dire que "le programme Paerpa a posé les principes d’une nouvelle organisation du système sanitaire, social et médicosocial ou? le parcours de sante? apparaît comme un levier important de la transformation du système".

"J'ai des doutes sur son efficacité"

En fait – et même s'il ne serait pas illogique d'attendre le projet de loi Grand âge et autonomie et la création de la cinquième branche pour se prononcer –, le bilan donne le sentiment qu'il n'existe pas vraiment de volonté de poursuivre le déploiement de ce dispositif très lourd, mais qu'il est difficile de l'afficher ouvertement. Olivier Véran et Brigitte Bourguignon, la nouvelle ministre déléguée chargée de l'autonomie, ne se sont pas encore prononcés sur ce point.
Mais, interrogée le 18 juillet 2017 par la commission des affaires sociales de l'Assemblée, Agnès Buzyn, alors ministre des Solidarités et de la Santé, avait été beaucoup plus claire que l'actuel bilan : "A mes yeux, le Paerpa est un dispositif [déjà, ndlr] en cours d’évaluation, j’attends donc le résultat de cette évaluation nationale ; mais j’ai des doutes quant à son efficacité, et je ne pense pas qu’il ait atteint ses cibles. Faut-il le déployer en l’état, le simplifier, ou plutôt le rendre plus agile ? C’est peut-être cette question que nous devons nous poser de façon à ce que des acteurs différents puissent y participer afin de mieux accompagner nos personnes âgées." 

 

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