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Projet de loi Alimentation - Bio dans les cantines : Stéphane Travert "espère convaincre" les sénateurs de réintroduire le seuil de 20%

Lors de l'examen en séance publique du projet de loi Agriculture et Alimentation qui démarrera le 26 juin, le ministre de l'Agriculture Stéphane Travert "espère convaincre" les sénateurs de réinstaurer le seuil de 20% de produits bio dans les cantines d'ici 2022. Après l'adoption du texte par l'Assemblée nationale le 30 mai (voir notre article du 31 mai), ce seuil a été supprimé au cours de l'examen en commission des affaires économiques du Sénat.
"C'était important de noter que nous avions besoin d'apporter plus de produits bio dans la restauration collective et nous avions souhaité apporter des chiffres précis pour pouvoir se donner des objectifs et les respecter", a expliqué le ministre sur Europe 1 le mercredi 20 juin.

Objectif de 20% de produits bio dans les cantines : quel impact sur la production française et les importations ? 

A l'issue du vote des sénateurs, l'article 11 du texte conserve seulement l'objectif de parvenir à 50% de produits de qualité et labellisés dans les cantines d'ici 2022, mais ne comporte plus d'objectif précis sur le bio. Les sénateurs LR à l'origine de l'amendement estiment qu'un objectif aussi précis pour le bio pourrait être contre-productif par rapport aux objectifs de la loi destinée à soutenir l'agriculture française : il pourrait selon eux faciliter les importations massives de bio, l'agriculture française n'ayant pas encore la capacité de fournir les quantités nécessaires.
"Nous avons besoin de structurer une offre en agriculture biologique, nous avons besoin que plus d'agriculteurs puissent se convertir à l'agriculture biologique", a considéré pour sa part Stéphane Travert. En septembre, il avait annoncé la fin du versement par l'Etat des aides au maintien des agriculteurs bio, pour privilégier les aides à la conversion (voir notre article du 6 avril 2018).

Sulfate de cuivre, glyphosate : Stéphane Travert veut  "emmener" tout le monde pour trouver des alternatives 

Mercredi, il a aussi fait valoir que les agriculteurs bio allaient devoir trouver des solutions de remplacement au sulfate de cuivre, considéré comme toxique, pour traiter leurs plantes contre les maladies fongiques bactériennes. "Comment est-ce que nous allons faire en sorte que celles et ceux qui utilisent aujourd'hui ce type de produit dans l'agriculture biologique ne soient pas mis au pied du mur ?", s'est-il interrogé. "Il va falloir créer des groupes de travail, emmener avec nous la recherche, les instituts techniques (...) je ne pense pas qu'il existe aujourd'hui de solutions alternatives et donc nous devons les trouver", a-t-il déclaré.
L'approche serait la même que dans le cadre de l'interdiction d'ici trois ans de l'herbicide glyphosate dans l'agriculture conventionnelle, une interdiction qui ne figurerait pas dans la loi pour privilégier un travail concerté de recherche d'alternatives. Trois types d'agricultures - l'agriculture en terrasse, l'agriculture de conservation" et "l'agriculture qui concerne la production de fruits et légumes destinés à l'industrie" – "ne bénéficient pas aujourd'hui d'alternatives précises", a ajouté le ministre.

Un débat au sérieux air de déjà vu...

Ce n'est pas la première fois que les sénateurs font barrage à la volonté de fixer par la loi un "quota" de bio dans la restauration collective. On se souvient en effet que lors de l'examen de la loi Egalité et citoyenneté (LEC), à la mi 2016, les députés avaient introduit une disposition prévoyant que la restauration collective publique intégrerait à partir de 2020 40% de produits locaux, de qualité et de saison et 20% de produits issus de l'agriculture biologique et de l'agriculture "en conversion". L'amendement était notamment porté par la députée Brigitte Allain, dont une proposition de loi sur le sujet n'avait pas pu aboutir... au Sénat. Lors du passage de la LEC au palais du Luxembourg, les sénateurs s'y étaient de nouveau opposés. Leur argument était peu ou prou le même qu'aujourd'hui : "Les élus sont demandeurs d'un accompagnement de l'Etat pour favoriser l'ancrage territorial dans l'alimentation et non pas de l'introduction de nouvelles normes contraignantes."